L'histoire des Jeux Olympiques de l'Antiquité

Le site d’Olympie était au cœur de la civilisation grecque. Ce lieu sacré, régulièrement utilisé pour des cérémonies religieuses, accueillait les Jeux Olympiques de l’Antiquité. Paul Christesen, expert renommé, nous emmène à la découverte d’Olympie et retrace l’évolution du site au fil de l’expansion des Jeux.

«À la base, les Jeux Olympiques de l’Antiquité étaient une fête religieuse, organisée dans un sanctuaire sacré», explique Paul Christesen, professeur d’histoire de la Grèce antique au Dartmouth College (États-Unis).

«Il n’était donc pas uniquement question de sport.» Le site lui-même tenait une place essentielle dans le concept de l’événement. Olympie se trouvait dans le quart nord-ouest du Péloponnèse (actuellement dans la région administrative de «la Grèce Occidentale»). Niché au pied d’une colline escarpée et entouré d’eau sur ses trois autres côtés, ce grand centre religieux offrait un spectacle extraordinaire aux visiteurs. Avec ses platanes et ses oliviers sauvages, ce lieu était exclusivement consacré aux dieux et à leur adoration... jusqu’à l’arrivée des Jeux Olympiques.

Zeus, roi des dieux grecs, aurait élu résidence à Olympie vers 1 200 av. J.-C., à l’époque où les anciens Éléens ont conquis les régions avoisinantes. L’histoire raconte que Zeus aurait marqué son ascension en lançant la foudre dans le bois sacré, depuis le sommet du Mont Olympe.

La ville-État d’Élis, dont le centre administratif se trouvait à près d’un jour de marche au nord d’Olympie, a organisé les Jeux pendant la majeure partie de leur histoire. Les Éléens ont pris un ascendant décisif sur leurs rivaux, les Pisatains, en 572 av. J.-C.. Au sommet de leur popularité durant le deuxième siècle, les Jeux pouvaient attirer jusqu’à 40 000 spectateurs dans le stade. Malgré cet engouement, le site a toujours su préserver son aspect rural.

«On sait qu’ils plantaient du blé dans le stade, poursuit Christesen. La plupart du temps, c’était simplement une vaste étendue inutilisée. Un peu avant le début des Jeux, ils nettoyaient tout mais le reste du temps, ce n’était qu’un champ de blé.»

De la première édition en 776 av. J.-C. jusqu’à 550 av. J.-C., les Jeux se sont déroulés dans le sanctuaire proprement dit. L’olivier sacré de Zeus, à partir duquel les couronnes des vainqueurs étaient tressées, marquait la ligne d’arrivée de toutes les courses. Le premier stade tirait simplement mais habilement parti des talus voisins, afin de respecter les limites de la zone sanctifiée. La découverte de 150 puits creusés à cette époque prouve que les Jeux Olympiques n’ont pas tardé à susciter un vif intérêt.

La troisième version du stade a vu le jour au milieu du quatrième siècle av. J.-C.. Spacieuse, beaucoup plus moderne dans son apparence et dans ses installations, cette nouvelle enceinte a entraîné une augmentation de l’affluence de près de 50 %. Le stade ayant été déplacé, les compétitions ne se terminaient plus à l’autel de Zeus.

En un peu plus d’un millénaire de Jeux Olympiques, le site d’Olympie n’a cependant rien perdu de sa puissance religieuse. S’il a résisté à l’épreuve du temps, il le doit avant tout à sa diversité.

«Les Grecs étaient des polythéistes convaincus, souligne Christesen. Olympie était consacrée à Zeus, mais nous savons qu’il n’était pas le seul dieu adoré ici. On a dénombré plus de 70 autels différents. En venant sur le site, vous pouviez vous adresser à pratiquement n’importe qui.»

Les Éléens n’ont jamais quitté Olympie, comme en témoignent leurs sacrifices mensuels. Mais chaque année, pendant une semaine, le site abandonnait sa tranquillité méditative pour devenir le centre de la Grèce, avec tout ce que cela suppose d’excitation.

«Tous ceux qui voulaient toucher une large audience venue de toute la Grèce se rendaient à Olympie. Il y avait des peintres, des artistes, des orateurs... bien décidés à montrer ce qu’ils avaient d’unique.»

«On sait que, pendant une semaine, il régnait une énorme pagaille, car tous ceux qui aspiraient à devenir quelqu’un se devaient de venir ici.»

La quatrième mouture du stade a été réalisée au premier siècle. Portée par le retour des courses de chars, la popularité des Jeux connaît à cette époque une forte croissance. La passion monte encore d’un cran au siècle suivant, ce qui entraîne la cinquième et dernière rénovation des lieux.

Tout au long de ces différents travaux, la longueur de la piste dans le stade n’a jamais changé. De nombreuses légendes tentent d’expliquer ce choix de 192,2 m exactement. La plus merveilleuse prétend qu’il s’agissait de la distance que le héros Hercule pouvait parcourir sans reprendre son souffle.

En marge des compétitions, les athlètes s’entraînaient également à Olympie. Dans un premier temps, les ateliers avaient lieu en plein air, mais la palestre et le gymnase ont ensuite été construits pendant la période hellène (de 323 av. J.-C. à 31 av. J.-C.). La palestre était une grande cour intérieure carrée, qui accueillait les spécialistes de la lutte, de la boxe, du pancrace et du saut en longueur. Elle était bordée de colonnes et disposait d’un réseau de bains dans les salles adjacentes. Le gymnase était un rectangle étiré en longueur, avec suffisamment d’espace pour que les lanceurs de javelots et de disques puissent s’entraîner. Les deux bâtiments étaient aussi des lieux de débats et d’instruction. En effet, les philosophes et les professeurs aimaient profiter de l’ombre et de la présence de jeunes esprits pour dispenser leur savoir.

Durant la période romaine, ces installations sont devenues une véritable attraction touristique en elles-mêmes, bien au-delà de l’aspect religieux.

«Les gens y installaient des œuvres d’art magnifiques et des objets consacrés. Les amateurs d’art grec venaient en nombre, conclut Christesen. À l’époque romaine, il existait sans doute des personnes qui gagnaient leur vie en proposant des visites guidées des lieux.»