"La forêt olympique va bien au-delà de la simple suppression du carbone dans l'atmosphère" – Tree Aid, partenaire de mise en œuvre du CIO

En réponse à la crise climatique qui s'aggrave, le Comité International Olympique (CIO) s'efforce de réduire considérablement son empreinte carbone, en mettant en place un plan visant à réduire ses émissions de 30 % d'ici 2024 et de 50 % d'ici 2030, conformément à l'Accord de Paris. Grâce au projet de forêt olympique, le CIO s'est également engagé à aller plus loin en éliminant plus de carbone de l'atmosphère qu'il n'en émet.

"La forêt olympique va bien au-delà de la simple suppression du carbone dans l'atmosphère" – Tree Aid, partenaire de mise en œuvre du CIO
© IOC

Alors que la première série de plantations d'arbres touche à sa fin, le CIO s'est entretenu avec Georges Bazongo, directeur des programmes de Tree Aid, organisation partenaire du CIO pour la mise en œuvre du projet de forêt olympique, afin de lui poser les questions suivantes : que faut-il pour qu'un projet de plantation d'arbres réussisse et comment pouvons-nous nous assurer que les communautés locales en bénéficieront pendant des décennies ?

Q. Ce projet a fait l'objet de nombreuses réflexions. Mais pourquoi ne pas commencer par la question de départ : à quoi servent les arbres ?

Au Mali et au Sénégal, nous travaillons avec des communautés qui luttent massivement contre le double impact du changement climatique et de l'agriculture non durable. À la base, ce sont déjà des terres difficiles à cultiver, car le climat y est chaud et sec.

Mais la hausse des températures et l'évolution des schémas climatiques, associées à des techniques agricoles non durables, font que les sols de la région deviennent moins fertiles et que la productivité agricole diminue. Cela a également un impact sur l'eau, car les terres arides ne retiennent pas l'eau aussi efficacement que les sols fertiles. Dans toute la région, les populations ont du mal à produire suffisamment de nourriture. La pauvreté et les flux migratoires augmentent.

Les arbres offrent cependant une solution importante. En plus d'absorber le dioxyde de carbone, ils fournissent de l'ombre, empêchent l'érosion des sols et améliorent également leur fertilité. Ils peuvent aussi offrir des sources alternatives de nourriture, de sorte que lorsque les récoltes habituelles sont mauvaises, les agriculteurs peuvent toujours manger ou vendre les fruits, les noix ou les graines de leurs arbres.

© IOC/Christophe Moratal

Q. En quoi consiste réellement le projet de forêt olympique ?

D'une part, il s'agit de planter des arbres pour éliminer 200 000 tonnes d'équivalent dioxyde de carbone (CO2e) de l'atmosphère sur une période de 25 ans. Cela signifie que le CIO éliminera plus d'émissions de carbone de l'atmosphère qu'il n'en émet.

Nous étudions également la manière dont le projet pourrait être élargi pour éliminer 600 000 tonnes supplémentaires sur une période similaire.

Mais il est évident que ce projet est bien plus que cela. En restaurant les forêts et les terres agricoles dégradées, le projet génère également de nouveaux revenus pour les communautés locales.

Il le fait de plusieurs façons. Certains arbres sont plantés pour restaurer les terres dégradées et renforcer la fertilité et la résilience des sols. C'est ce que nous appelons la "plantation d'enrichissement". Cette technique aide le sol à retenir plus d'eau et fournit un habitat vital aux animaux. Dans le même temps, nous planterons davantage d'arbres pour produire des fruits, des noix et des graines, lesquels pourront être consommés.

Parce que nous voulons que cette forêt résiste à l'épreuve du temps, nous passons énormément de temps à travailler avec les communautés locales. Ces dernières veulent ce projet parce qu'elles en comprennent les avantages, mais nous travaillons avec elles pour introduire des techniques agricoles nouvelles et alternatives. Nous œuvrons également avec des entreprises locales qui peuvent contribuer à la réalisation de ce projet, par exemple en produisant et en prenant soin des jeunes arbres jusqu'à ce qu'ils soient prêts à être plantés.

Vous serez peut-être surpris d'apprendre que nous cherchons également à attirer davantage d'animaux sauvages dans les régions concernées. C'est pourquoi nous discutons avec la Royal Society for the Protection of Birds (RSPB) du Royaume-Uni et ses partenaires au Sénégal, l'association Nature-Communications-Développement (NCD). Nous essayons de voir comment nous pouvons travailler à leurs côtés.

Q. Comment décidez-vous de l'endroit où vous allez faire les plantations d'arbres ?

Nous planifions ce projet depuis plusieurs années maintenant, en nous engageant d'abord auprès des autorités locales, puis auprès des communautés elles-mêmes. Cela signifie que la préparation de la première plantation d'arbres a été délibérément lente et méthodique. Cela signifie également que nous avons conclu un vaste accord avec les communautés locales portant sur le type d'arbres et le lieu où les planter.

Les sites ont été sélectionnés en fonction de l'intérêt manifesté par les diverses communautés, des connaissances scientifiques et de notre expérience de la plantation d'arbres sur tout le continent [africain]. Ensemble, nous avons identifié un total de 1 860 hectares pour la plantation d'arbres dans les deux pays, dont 1 600 hectares de plantation d'enrichissement et 260 hectares d'agroforesterie.

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Q. Comment allez-vous vous assurer que les arbres survivent ?

Les villageois se sont très clairement exprimés à ce sujet. Leurs solutions comprennent, par exemple, des patrouilles villageoises afin de vérifier l'absence de feu et la mise en place de coupe-feu dans les forêts. Les villageois veulent également utiliser des espèces d'arbres que le bétail n'aime pas manger. Nous avons accepté toutes leurs suggestions à cet égard.

N'oubliez pas que les communautés ont une certaine expérience des arbres et de l'agroforesterie, et qu'elles savent comment les arbres leur seront bénéfiques. La principale valeur ajoutée que nous pouvons apporter est de les aider à gérer les arbres, par exemple en partageant avec elles de nouvelles techniques de gestion et d'agroforesterie.

Nous prévoyons actuellement de planter 590 000 arbres, en utilisant une vingtaine d'espèces indigènes, soigneusement sélectionnées en collaboration avec les communautés locales. Nous avons ainsi retenu les arbres disposant des meilleures chances de survie et les mieux adaptés à la région. C'était un processus long mais très important.

Nous travaillons par ailleurs avec les communautés pour organiser un inventaire annuel des arbres plantés afin de consigner combien d'entre eux survivent ou non. Si les taux de survie sont faibles, nous travaillerons avec les communautés pour comprendre ce qui se passe et trouver des solutions pour y remédier.

Q. Planter les mauvais arbres peut avoir un impact négatif sur les écosystèmes. Êtes-vous sûr que nous avons les bonnes espèces d'arbres ?

C'est vrai, cette question a d'ailleurs été soulevée par les agriculteurs. Lors d'une discussion, d'aucuns ont dit qu'ils voulaient planter des eucalyptus, mais nous avons dû refuser cette demande. Ces arbres sont en effet envahissants et nécessitent beaucoup d'eau. Dans un contexte agroforestier, ils peuvent donc faire plus de mal que de bien.

Après avoir consulté les communautés, et en nous appuyant sur notre propre expérience, nous avons établi une liste d'environ 20 espèces. Ces dernières ont soit une valeur nutritionnelle, soit une valeur commerciale, soit les deux. Il s'agit notamment de l'anacardier, du manguier, du citronnier et de l'acajou, ainsi que d'arbres moins connus : le jujubier, le caroubier, le pommier cannelle, la liane goïne et le palmier éventail, pour n'en citer que quelques-uns.

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Q. Quels autres risques avez-vous gérés ?

Nous avons vraiment accordé toute notre attention à deux questions. Il s'agissait tout d'abord de s'assurer que les communautés étaient enthousiasmées par ce projet et qu'elles le souhaitaient. Nous avons travaillé d'arrache-pied pour trouver les communautés qui voulaient de ce projet et, avec elles, nous avons identifié les terres, sélectionné les espèces et discuté de la manière de gérer les terres. Le consentement mutuel est très important pour nous.

Nous nous sommes ensuite constamment demandé si ce projet n'allait pas susciter des conflits entre les communautés. Allaient-elles finir par se battre pour l'accès aux arbres que nous plantions, par exemple, ou pour leurs fruits ? C'est pourquoi, lors de nos visites sur le terrain, nous nous sommes efforcés de trouver les villages où il n'y avait pas de conflits existants. Nous n'avons pas retenu plusieurs endroits pour cette raison.

Jusqu'à présent, les chefs de village ont été heureux de pouvoir identifier les frontières entre leurs villages, ce qui nous permet de mettre en place notre projet de manière à renforcer – et non à saper – les frontières existantes et largement acceptées.

Q. Quelles sont les prochaines étapes ?

Le projet se déroule dans deux endroits qui sont tous deux essentiels pour le fleuve Sénégal. Le premier – au Mali – est le sous-bassin versant de Kolimbiné-Lac Magui (KLM). Le second est le sous-bassin versant de la Falémé au Sénégal. Ils sont tous deux importants pour l'eau potable, ainsi que pour les activités locales et agricoles. Ces deux régions sont confrontées à une grave dégradation de l'environnement.

L'année dernière, nous avons mis en place des équipes nationales dans les deux pays. Puis, cette année, nous avons travaillé avec les communautés afin de convenir des sites de plantation et commencer la plantation à proprement parler. Le travail est un peu plus avancé au Sénégal, des sanctions économiques ayant été imposées au Mali en janvier 2022.

Nous continuerons à planter l'année prochaine, bien sûr, et j'espère que nous utiliserons des semis produits dans les pépinières locales. Nous devons également finaliser notre théorie du changement en coopération avec les villages et élaborer des plans de gestion forestière.

Il reste encore énormément de travail à faire.

Forêt olympique

La forêt olympique fera partie de la Grande Muraille verte, une initiative qui a pour ambition de restaurer les écosystèmes dégradés dans la région du Sahel en Afrique. Quelque 590 000 arbres indigènes seront ainsi plantés dans près de 90 villages du Mali et du Sénégal – hôte des Jeux Olympiques de la Jeunesse de Dakar 2026 – sur une superficie totale de 2 000 hectares environ.