Né le 17 juillet 1920 à Barcelone (Espagne), troisième de six enfants (deux filles et quatre garçons), le jeune Samaranch s'intéressa très tôt au sport. Adolescent, il pratiqua le hockey, la boxe et le football. Plus tard dans sa vie, il était bien connu pour son autodiscipline constante et le régime de sport quotidien, aux haltères et autres exercices, auquel il s'astreignait dans les chambres d'hôtel du monde entier chaque fois qu'il voyageait.
Juan Antonio Samaranch entra d'abord à l’école des Hautes Études Commerciales de Barcelone puis partit étudier à Londres et aux États-Unis. Il obtint un diplôme de l’Institut d’études supérieures de gestion d’entreprise (IESE) de Barcelone. Pendant ses études, il pratiqua notamment le hockey sur patins, dont il créa les championnats du monde en 1951. La première édition de ces championnats eut lieu dans sa ville natale et l’équipe espagnole remporta le titre.
Une fois ses études achevées, il s'associa à la gestion des affaires familiales tout en développant sa passion pour l'administration sportive et la politique. En 1954, il devint conseiller municipal en charge des sports, puis membre du Parlement espagnol en 1967. Il fut nommé délégué national à l’éducation physique et aux sports et le resta pendant trois ans. En 1973, il devint président de la "Diputación" (gouvernement provincial) de Barcelone, poste dont il démissionna en 1977 quand il fut nommé par le roi Juan Carlos Ier ambassadeur d'Espagne auprès de l’Union soviétique et de la Mongolie, après la reprise des relations diplomatiques entre les deux pays.
C'est en 1952 que Juan Antonio Samaranch vécut sa première expérience directe des Jeux Olympiques lorsqu'il a couvert les Jeux de la XVe Olympiade à Helsinki pour le quotidien du soir de Barcelone, La Prensa ; il a également couvert les principaux matchs de football de la ligue espagnole. Il avait très vite compris que sans les médias, le sport en général et le Mouvement olympique en particulier ne pourraient pas atteindre le haut niveau de visibilité indispensable pour exercer une influence sur la société moderne. Il est ensuite devenu président de la commission de presse du CIO.
Les graines de sa carrière au sein du Mouvement olympique étaient ainsi semées, et il ne s'en jamais détourné, y consacrant plus de 50 ans de sa vie. Il a été élu vice-président du Comité International des Jeux Méditerranéens (CIJM) lors de la deuxième édition des Jeux tenus à Barcelone en 1955. En 1956, il fut chef de mission de la délégation espagnole aux Jeux Olympiques d'hiver à Cortina d'Ampezzo, rôle qu'il reprendra à deux reprises : aux Jeux Olympiques de 1960 à Rome et aux Jeux Olympiques de 1964 à Tokyo.
Élu membre du Comité olympique espagnol en 1956, il en assura la présidence de 1967 à 1970. Il fut élu membre du CIO en 1966. Deux ans plus tard, le président du CIO de l'époque, Avery Brundage, le nomma chef du protocole (fonction qu'il occupa de 1968 à 1975 puis de 1979 à 1980). Il siégea à la commission exécutive du CIO (de 1970 à 1978 puis de 1979 à 1980) et assura la vice-présidence du CIO de 1974 à 1978. Il fut élu président du CIO le 16 juillet 1980 lors de la 83e Session à Moscou.
Juan Antonio Samaranch accéda à la présidence du CIO à un moment très tendu de l'histoire de l'organisation. Les Jeux Olympiques de 1980 à Moscou subissaient un boycott mené par les États-Unis en protestation à l'invasion soviétique de l'Afghanistan en décembre précédent. En conséquence, seuls 80 CNO participèrent aux Jeux. Entre-temps, l'édition suivante des Jeux Olympiques de 1984 avait déjà été attribuée à Los Angeles et l'on craignait un boycott de représailles quatre ans plus tard.
Mais ce n'était pas là la seule difficulté à laquelle l'organisation était confrontée. À l'époque, le CIO avait des biens estimés à deux millions de dollars (USD) mais ne disposait que de 200 000 USD de réserves. Dans le même temps, les Jeux Olympiques étaient confrontés à la forte concurrence des championnats du monde organisés dans chacun des sports, tant en termes d'audience que de possibilités de revenus.
N'étant pas homme à se laisser décourager, Juan Antonio Samaranch se mit immédiatement à la tâche pour régler ces problèmes. Contrairement aux précédents présidents qui avaient dirigé l'organisation depuis leur pays d'origine, il s'installa à Lausanne et assuma le rôle de président exécutif sur le terrain.
L'une des premières réformes sous sa présidence fut d'augmenter la représentation des femmes au sein du CIO. En un an déjà, deux femmes devinrent membres de l'organisation, Pirjo Haggman et Flor Isava-Fonseca. À la fin de sa présidence, elles étaient 17 à en faire partie ou à en avoir été membres. Aujourd'hui, les femmes représentent plus d'un tiers des membres du CIO. Sa conviction que les femmes devaient obtenir une meilleure reconnaissance dans le sport l'amena à créer en 1995 un groupe de travail qui deviendra plus tard la commission femme et sport chargée de conseiller la commission exécutive sur ce thème. Il a également supervisé l'augmentation importante du nombre d'épreuves et de disciplines féminines, comme le marathon, le cyclisme sur piste et le judo.
Convaincu par ailleurs que les concurrents aux Jeux devaient être mieux représentés au sein du CIO, il invita un groupe d'athlètes au Congrès olympique tenu en 1981 à Baden-Baden. Il en résulta la création de la commission des athlètes, puis plus tard la décision de nommer des concurrents actifs comme membres du CIO. Cette pratique perdure aujourd'hui plus que jamais, les athlètes ayant une voix forte au sein du Mouvement olympique.
Sous sa présidence également, des sportifs professionnels ont été admis aux Jeux Olympiques et le nombre de sports et d'épreuves au programme a considérablement augmenté. Le nombre total d'épreuves est ainsi passé de 221 aux Jeux Olympiques d'été de 1984 à 300 en 2000, et de 39 aux Jeux d'hiver en 1984 à 68 en 1998. C'est également sous la présidence de Juan Antonio Samaranch que la décision fut prise de déplacer les Jeux d'hiver. Tenus traditionnellement la même année que les Jeux d'été, ils passèrent en 1994 à l'autre année paire de l'Olympiade. Parallèlement, le nombre de Comités Nationaux Olympiques participant aux Jeux se multiplia sous sa présidence pour atteindre 199 aux Jeux Olympiques de 2000 à Sydney et 72 aux Jeux Olympiques d'hiver de 1998. Conscient de l'importance de cette communauté mondiale, Juan Antonio Samaranch fit l'effort de voyager beaucoup pour rencontrer personnellement les représentants des CNO. Quand il se retira de ses fonctions, il avait rendu visite à l'ensemble des 199 CNO existants.
Son entregent et son habileté relationnelle lui ont permis, lorsque les Jeux Olympiques furent à nouveau sous la menace en 1984, d'utiliser ses compétences diplomatiques pour éviter que le boycott de Moscou ne se reproduise.
La présidence de Samaranch s'est également déroulée dans un contexte de changements géopolitiques majeurs. Il y a eu la participation de la Chine et de Chinese Taipei pour la première fois aux Jeux. Les années 1990 ont également vu la fin de l'apartheid et la réadmission de l'Afrique du Sud dans le giron olympique, ainsi que l'éclatement de l'Union soviétique en 15 États indépendants. C'est sous la houlette de Samaranch que le CIO a réussi à faire accepter à douze anciennes républiques de l'Union soviétique de faire partie d'une même “Équipe unifiée” aux Jeux Olympiques de 1992 à Barcelone, avec toutefois leur propre drapeau national hissé aux cérémonies de remise des médailles.
C'est également sous sa présidence qu'a été institué le Tribunal Arbitral du Sport (TAS), installé à Lausanne, lequel continue d'être aujourd'hui un acteur majeur dans la résolution des litiges spécifiques au sport. Autre héritage encore, la création de l'Agence Mondiale Antidopage (AMA) en 1999. Composée de représentants du Mouvement olympique (Comités Nationaux Olympiques, Fédérations Internationales et athlètes) et d'organisations gouvernementales et non gouvernementales, elle demeure le fer de lance de la lutte contre le dopage dans le sport. Autre réalisation à l'actif du dirigeant catalan et non des moindres, la Solidarité Olympique a été instituée en 1981 dans le but de venir soutenir les pays les plus modestes dans leur développement sportif. La Solidarité Olympique est aussi importante pour le Mouvement olympique aujourd'hui qu'il y a près de 40 ans et continue de venir en aide aux pays qui en ont le plus besoin. Pour la période quadriennale 2017-2020, le budget de la Solidarité Olympique s'élevait à plus de 500 millions d'USD.
Juan Antonio Samaranch avait aussi à cœur de créer le Musée Olympique. Une collection de souvenirs du fondateur du CIO, Pierre de Coubertin, avait trouvé place dans la Villa Mon-Repos à Lausanne, peu après que le baron eut fait transférer le siège de l'organisation en Suisse. Un musée temporaire avait ouvert en 1982. Mais sous la présidence de Samaranch, un nouvel édifice fut construit à Ouchy et inauguré lors de la Journée olympique du 23 juin 1993. Ce Musée Olympique préserve l'héritage culturel, éducatif et artistique du Mouvement olympique et abrite le Centre d'études olympiques au service des chercheurs, étudiants et boursiers. En 2019, il a accueilli 319 000 visiteurs. Le Musée a été créé en grande partie grâce aux dons de 40 sociétés et de 22 institutions privées. C'est ce lien avec le milieu des affaires et les compagnies de radio-télédiffusion qui a favorisé et soutenu nombre des initiatives de la présidence de Juan Antonio Samaranch tout en conférant au Mouvement olympique la stabilité financière qui est encore si importante aujourd'hui.
Les revenus provenant de la télévision ont augmenté de manière significative entre 1980 et 2001. En 1980,les Jeux Olympiques d'hiver à Lake Placid rapportèrent 20,7 millions d'USD, et les Jeux Olympiques d'été à Moscou 88 millions d'USD. En 1998 et en 2000, ils étaient passés à 513,5 millions d'USD et 1,331 milliard d'USD respectivement. Toutefois, Juan Antonio Samaranch ne cherchait pas à doper les recettes à tout prix. Selon ses propres paroles : "Le principe que l'on doit bien garder à l'esprit, c'est que l'objectif du Mouvement olympique, dans sa négociation avec les réseaux de télévision, n'est pas seulement d'obtenir des fonds, c'est aussi d'assurer la couverture la plus vaste possible des Jeux et de chacun des sports." Cette optique reste très actuelle aujourd'hui.
Juan Antonio Samaranch a également supervisé le programme des partenaires olympiques, ledit programme TOP, qui offre à des sponsors de premier plan l'exclusivité dans différentes catégories de produits et services. Le programme quadriennal TOP a débuté à 96 millions d'USD en 1985. Pour la période 2001-2004, il était passé à 663 millions d'USD. De nos jours, ce programme continue de gagner en attractivité et en puissance, avec l'adhésion de 15 grandes entreprises mondiales, preuve véritable de la confiance qu'inspire le Mouvement olympique. Pour la période quadriennale 2013-2016, le programme TOP a généré des revenus d'environ 1 milliard d'USD.
La présidence de Juan Antonio Samaranch fut certes marquée par des réalisations majeures, mais elle ne fut pas sans difficultés. À la fin des années 1990, un scandale éclata à propos du vote sur l'attribution des Jeux Olympiques d'hiver de 2002 à Salt Lake City, qui aboutit à la démission ou l'expulsion de dix membres du CIO. Le président Samaranch prit les choses en main et guida l'organisation pour la sortir de la plus grave menace de son existence. En un peu moins de six mois, il conduisit une série de réformes et fit réviser la Charte olympique. Grâce au calme et à la diplomatie de Samaranch, le CIO a pu résister à la tempête et en est sorti bien plus fort.
La vision de Juan Antonio Samaranch pour le Mouvement olympique, ainsi que son talent pour relever les défis, lui ont valu d'être réélu à deux reprises à la présidence du CIO - en 1993 et en 1997 – faisant de son mandat de président le plus long de l'histoire du CIO après celui de Pierre de Coubertin. En transmettant les rênes à son successeur nouvellement élu le 16 juillet 2001, il laissait une organisation dans une position forte et saine, une situation qui perdure jusqu'à aujourd'hui. Les réformes qu'il a entreprises et les programmes qu'il a mis en place ont contribué dans une très large mesure à faire des Jeux Olympiques l'événement planétaire qu'ils sont aujourd'hui.
Rendant hommage à son prédécesseur, le président Thomas Bach a dit ceci : "Juan Antonio Samaranch a accédé à la présidence du Mouvement olympique à une époque où ce dernier était sur le point de s’effondrer. Il a profondément modernisé les Jeux Olympiques, les a soutenus pour qu’ils deviennent une manifestation véritablement planétaire et les a hissés vers de nouveaux sommets. Grâce à sa détermination, pratiquement le monde entier concourt aujourd'hui aux Jeux. Grâce à son succès, l'idéal olympique s'est répandu, par le truchement d'athlètes bien entraînés et formés et à travers des programmes conçus par les 206 Comités Nationaux Olympiques. Grâce à sa volonté réformatrice, les Fédérations Internationales, les CNO et les athlètes sont désormais représentés au sein du CIO, ce qui renforce et unit le Mouvement olympique. Ces remarquables accomplissements font de Juan Antonio Samaranch le président du CIO qui a le plus contribué à donner forme au Mouvement olympique. Il survit dans son œuvre et nous laisse à la fois un héritage précieux et une immense responsabilité."
Juan Antonio Samaranch est décédé le 21 avril 2010 à Barcelone, en Espagne. En 1955, il avait épousé María Teresa Salisachs Rowe, décédée le 16 septembre 2000, lors des Jeux Olympiques de Sydney 2000. Le couple a eu deux enfants, une fille prénommée Maria Teresa (née en 1956) et un fils, Juan Antonio Samaranch junior (né en 1959), membre du CIO depuis 2001 et actuellement vice-président.