Turin 2006 : une nouvelle image de la ville

Les Jeux Olympiques d'hiver de Turin 2006 ont radicalement changé l'image que le monde se faisait du nord industriel de l'Italie et ont aidé à mieux faire connaître les sites touristiques, culturels et de loisirs de la région. L'image industrielle a fait place au charme touristique.

Turin 2006 : une nouvelle image de la ville
© Marco Saracco | Dreamstime.com / Panorama of the Torino city center.

Les Jeux de 2006 ont été suivis par 3,1 milliards de personnes – soit un milliard de plus que les Jeux Olympiques d'hiver de Salt Lake City 2002. Les Jeux de Turin 2006 ont été les premiers Jeux à proposer une couverture vidéo en direct sur les téléphones mobiles, un streaming (diffusion en ligne) et une retransmission télévisée haute définition (HD). À l'époque, il s'agissait de la couverture la plus large qui soit et la plus avancée sur le plan technique, toutes éditions des Jeux Olympiques confondues.

Les épreuves des sports de glace ont eu lieu dans le centre de Turin et celles des sports de neige dans les montagnes environnantes. Une structure de gouvernance participative a été mise en place, associant les autorités publiques de la ville de Turin et des différents villages de montagne qui devaient accueillir des compétitions olympiques. En montagne, la population a toutefois eu le sentiment qu'il y avait un déséquilibre entre leur région et la ville, notamment dans les reportages des médias, ce qui a freiné la collaboration pendant les Jeux. Cela étant, après les Jeux, ce modèle a été réutilisé lors de candidatures à l'organisation d'autres grands événements.

Diverses initiatives ont été lancées dans les secteurs de la formation, du volontariat et de la certification afin d'instaurer un climat de convivialité sur le territoire.

Image de la ville et attrait touristique

Améliorer le tourisme culturel et de loisirs était au cœur de la vision de Turin s'agissant de l'héritage des Jeux Olympiques d'hiver de 2006. Avant les Jeux, Turin avait l'image d'une ville "industrielle", principalement associée au secteur automobile puisque le constructeur Fiat y avait élu domicile plus d'un siècle auparavant.

Durant les Jeux de Turin 2006, la place des médailles, où se déroulaient les cérémonies des vainqueurs, était installée sur la place du Château (Piazza Castello), en plein de cœur de la ville. Une toile de fond spectaculaire pour la vaste couverture médiatique qui apportait un nouvel éclairage à Turin. Le centre historique de la ville était ainsi mis à l'honneur et pouvait faire découvrir ses œuvres d'art, son architecture et sa culture.

En 2000, en dépit de la richesse des sites touristiques turinois, la province de Turin n'avait accueilli que trois millions de visiteurs et la région du Piémont huit millions. En 2010, le nombre de touristes recensés à Turin était passé à six millions, en faisant la quatrième ville la plus visitée d'Italie après Rome, Florence et Venise. La même année, le Piémont avait attiré plus de 12 millions de personnes. En 2018, cette région était classée huitième (sur les 20 régions que compte l'Italie) en termes de fréquentation touristique, avec plus de 15 millions de visiteurs cette année-là.

Trêve olympique

Lancé en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le programme consacré à la Trêve olympique a permis de promouvoir les valeurs de paix, de coopération et de justice à travers diverses initiatives.

Preuve en est le projet Solidarité SMS qui a permis de recueillir plus de 500 000 euros pour faire vacciner contre la polio, la rougeole et la méningite 25 000 enfants vivant dans des pays en guerre. Autre exemple : la somme de 150 000 euros a été allouée au projet de déminage des sites olympiques de Sarajevo '84.

Environnement

Le comité d’organisation de Turin (TOROC) a été le premier à obtenir à la fois la certification environnementale internationale ISO 14001 et la certification EMAS (son équivalent européen) pour ses systèmes et programmes environnementaux. Cette double certification lui a été accordée pour avoir utilisé à bon escient les instruments environnementaux volontaires de l'Union européenne, notamment le système communautaire de management environnemental et d'audit (EMAS) et le label écologique européen.

Le TOROC avait également mis au point divers outils de planification afin de mettre en œuvre les mesures adoptées lors de son évaluation stratégique de l'environnement. Selon le rapport officiel de Turin 2006, chaque instrument portait sur un aspect environnemental jugé crucial pour le déroulement des Jeux Olympiques : l'eau, la prévention des risques naturels, la sécurité et l'aménagement des sites, les matériaux inertes (y compris les déchets), le transport durable, etc. Le TOROC avait par ailleurs mis en place un système d'achat respectueux de l'environnement.

Les sponsors qui avaient adhéré au programme de durabilité du TOROC et prouvé qu'ils partageaient sa vision en matière de politique environnementale ont ainsi eu le droit d'utiliser le logo du comité d'organisation "Ambiente 2006" (Environnement 2006). En 2004, Kyocera Mita Italia était la première entreprise à bénéficier de ce privilège, suivie un an plus tard d'Iveco, des Chemins de fer italiens, de McDonald's, Coca-Cola, Kodak et Fiat.

Cinq installations d'hébergement (soit 30 % de l'ensemble des logements utilisés pour les Jeux), membres du programme Ecolabel pour les services d'hébergement touristique et partisans d'un tourisme durable, avaient obtenu le label écologique européen avant le début des Jeux. En 2007, 12 structures du Piémont possédaient ce label de qualité. En 2012, leur nombre était passé à 16.

Le programme HECTOR (Heritage Climate TORino), placé sous la coordination du TOROC et regroupant la région du Piémont ainsi que le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), proposait des initiatives destinées à sensibiliser le public au changement climatique et à compenser les émissions de dioxyde de carbone et de gaz à effet de serre produites durant les Jeux Olympiques à Turin (à la suite des opérations menées pendant les 14 jours de compétitions et des cérémonies). Les organisateurs ont calculé que les Jeux de 2006 avaient généré l'équivalent de 103 500 tonnes de dioxyde de carbone, dues principalement au transport et aux opérations sur les sites olympiques ; ces émissions ont toutes été compensées.

Impact économique

L'accueil des Jeux Olympiques d'hiver de Turin 2006 a rapporté 17,4 milliards d'euros à l'économie italienne. Selon une étude menée par l'Université La Sapienza de Rome, 60 % de ces revenus ont été perçus en 2005 et 2006. Pour chaque million d'euros investi, 22 emplois à temps plein ont été créés chaque année. Le secteur de l'emploi a enregistré une hausse de 0,2 % entre 2001 et 2004, période durant laquelle le chômage a diminué d'autant.

C'est la construction qui a le plus bénéficié de l'accueil des Jeux, puisque ce domaine d'activité a représenté plus de la moitié de la croissance de la valeur ajoutée et plus de 60 % des emplois créés durant la même période. Le secteur commercial public et la restauration ont également connu une augmentation significative de la production et des emplois, tout comme les services aux particuliers et aux entreprises.

Les attentes en termes de bénéfices économiques à long terme, présentées dans le rapport officiel de Turin 2006, partaient du principe que les investissements générés par les Jeux seraient bien plus importants que les "coûts" de la manifestation, en particulier grâce à la croissance des secteurs du tourisme et de l'événementiel. La ville de Turin est devenue une destination de premier plan pour les colloques professionnels, et le retour sur investissement de ces événements est de l'ordre de 19 à 32 millions d'euros par année.

Cela étant, en dépit des retombées positives des Jeux, certaines études ont critiqué les dépenses engagées pour l'organisation de la manifestation olympique ainsi que les coûts de construction et les frais d'entretien des installations. Si le rapport de la commission de coordination du CIO indique que le budget final des Jeux de Turin était de 1,2 milliard d'euros, certains organes de presse et articles universitaires ont laissé entendre que les coûts oscillaient entre 2,8 et 3,7 milliards d'euros. Ces différences s'expliquent par l'ampleur des projets lancés dans les secteurs de l'urbanisme et du transport, lesquels n'étaient pas directement liés aux Jeux, mais qui ont été inclus dans les calculs.

Études / Formation

Vingt-cinq initiatives pédagogiques ont mobilisé plus de 600 000 écoliers avant et pendant les Jeux. Ce programme éducatif comprenait des projets en lien avec les cinq anneaux olympiques : rouge (sport et culture sportive), vert (sport et environnement), jaune (sport, science et technologie), bleu (sport et sensibilisation à la santé) et noir (sport, droits de l'homme, éducation civique et multiculturalisme).

En 2008, le projet scolaire TOP 2006 a quant à lui offert la chance à plus de 10 000 enfants de s'essayer à plusieurs sports sur différents sites de Turin 2006.

Dans le domaine de l'enseignement supérieur, le programme d'éducation olympique a permis à 515 étudiants de s'inscrire à des formations diplômantes en production télévisuelle et diffusion, 400 d'entre eux ayant ensuite travaillé comme volontaires durant les Jeux.

Sites sportifs

Le Palasport Olimpico (rebaptisé aujourd'hui Pala Alpitour), qui avait été construit pour les Jeux de Turin 2006 et avait accueilli les tournois olympiques de hockey sur glace, est devenu l'une des plus grandes salles de concert et l'un des principaux lieux de divertissement d'Italie. Ce palais omnisport a accueilli plusieurs compétitions sportives internationales, comme l'Universiade d'hiver de 2007 et les Championnats du monde de volleyball masculin de 2018. Le Pala Alpitour accueillera le tournoi ATP Finals (tennis) de 2021 à 2025.

Quant au Palavela, où s'étaient déroulées les compétitions de patinage artistique et de patinage de vitesse sur piste courte lors des Jeux de Turin 2006, c'est aujourd'hui un centre de conférences qui reçoit environ 70 000 personnes chaque année depuis 2010 et possède une patinoire où se donnent rendez-vous 30 000 patineurs tous les ans. De grands événements sportifs, comme les Championnats d'Europe de volleyball masculin de 2015, ont également eu lieu au Palavela.

Autre exemple de reconversion réussie : l'anneau de vitesse du Lingotto. Construite pour accueillir les compétitions olympiques de patinage de vitesse, cette installation était la première patinoire couverte d'Italie. Elle accueille aujourd'hui des foires, des expositions, des congrès, des colloques ainsi que des événements culturels et sportifs pour les professionnels et le grand public.

Douze des quatorze sites de compétition olympiques de Turin sont toujours ouverts au public pour des manifestations sportives ou de loisirs. Les tremplins de saut à ski et le centre de glisse sont pour leur part quasiment, voire totalement inutilisés ; une partie du village olympique de Turin a également rencontré de sérieuses difficultés au cours des 14 dernières années et son avenir est toujours incertain.

Après les Championnats du monde de luge de 2011, le centre de glisse de Cesana Pariol a fermé en raison d'un manque de financement et d'entretien. Cette installation est en "mode veille". En 2016, une section de la piste de bobsleigh, la piste de poussée couverte, a été rouverte durant les mois d'été pour les entraînements des équipes de France, de Grande-Bretagne, de Monaco et d'Italie. Les revenus ainsi générés couvrent aujourd'hui les frais d'entretien de l'installation.