L’athlète musicienne
Jours J-2 pour celle qui aurait fêté son 85e anniversaire ce dimanche 23 décembre. Sport et musique ont rythmé la vie de la française Micheline Ostermeyer. Sa force musculaire mêlée à son adresse, sa finesse et sa dextérité lui ont conféré le talent d’être une brillante pianiste autant qu’une athlète hors pair.
Un don familial pimenté d’une pointe de talent
Sa réussite, Micheline la doit à son caractère persévérant et à ses proches. Née dans une famille littéraire et musicienne, Micheline embrasse toute jeune sa vocation. Dès l’âge de 4 ans, elle commence par apprendre les rudiments du solfège et à pianoter au côté de sa mère, professeur de piano. Sur le Steinway familial, les dons de Micheline s’épanouissent rapidement. À 13 ans, elle a la maturité pianistique pour entrer au Conservatoire National de musique de Paris qui forme à l’excellence artistique. À 16 ans, alors que la seconde Guerre Mondiale menace, Micheline interrompt provisoirement son cursus pour rejoindre ses parents et son frère Roland à Tunis (Tunisie). La famille y réside depuis 1929. Ce retour dans le giron familial favorise le développement des capacités athlétiques de l’aînée de la famille Ostermeyer.
Le sport, une soupape à la musique
En Afrique du Nord, parallèlement à ses études et à la pratique du piano, elle se découvre une passion pour le sport. Sa morphologie (73 kg pour 1,79m) l’oriente naturellement vers la pratique du basket et de l’athlétisme. Encouragée par son père, elle développe rapidement un deuxième talent : celui de sportive. En athlétisme, elle se distingue dans le saut en hauteur, le lancer du poids et du disque. Elle n’abandonne pourtant pas son piano et choisit de concilier les deux univers, souvent jugés incompatibles par les professionnels des deux bords. Pour Micheline, même si elle doit veiller à ne pas se casser ni poignet ni doigt, il n’y a pas incompatibilité. Ses aptitudes sportives complètent ses qualités pianistiques et inversement : puissance dans le lancer autant que dans le phrasé forte des morceaux, souplesse dans la rotation du corps autant que dans le toucher des doigts sur le clavier. Le sport est sa manière à elle de s’évader des heures passées au piano : "Je pratiquais le sport par plaisir, le piano a toujours été ma priorité ". Micheline s’épanouit dans les deux domaines et ses brillants résultats − prix du Conservatoire, plusieurs fois championne de France d’athlétisme − sont autant l’expression de son corps que de son âme.
Une virtuose symbole de féminité olympique
En 1948, Micheline Ostermeyer participe aux premiers Jeux Olympiques d’après-guerre à Londres. Sachant que les premières épreuves féminines d’athlétisme ont été introduites au programme des Jeux de 1928 à Amsterdam et que les Jeux n’ont pas eu lieu en 1940 et 1944 à cause de la guerre, l’athlète pianiste de 25 ans a beaucoup de mérite de prendre part à ces compétitions. En effet, à Londres, les femmes ne représentent que 390 athlètes sur un total de 4 104. Quelque 56 ans plus tard en 2004, elles seront 4 306 sur 10 568 athlètes à participer aux Jeux Olympiques d’Athènes.
Les femmes commencent leur épopée olympique aux Jeux Olympiques de Paris en 1900, en participant à un petit nombre de sports comme le tennis et le golf. Elles la poursuivent en accédant, au fur et à mesure des éditions des Jeux Olympiques, à d’autres sports, tels la natation et l’escrime, avant de participer en 1928 aux épreuves d’athlétisme des Jeux d’Amsterdam.
En 1948, les femmes marquent les Jeux de leur présence. Des athlètes comme Fanny Blankers-Koen et Micheline Ostermeyer sont la preuve que sport et féminité peuvent s’accorder. Pour sa première et unique participation olympique, celle qui a fait de la musique un sport et du sport une distraction remporte deux médailles d’or (lancer du disque et du poids) et une médaille de bronze (saut en hauteur).