Comment l'accueil des JO d'hiver a transformé Turin

Peu nombreuses sont les villes qui réussissent à se réinventer complètement grâce à l'accueil d'une édition des Jeux Olympiques, mais Turin en fait partie. 

Comment l'accueil des JO d'hiver a transformé Turin
© 2006 Getty Images

Si la plupart des personnes connaissaient les plus grandes attractions touristiques de Londres, Rio ou encore Vancouver avant même que ces villes aient organisé des Jeux, les Jeux Olympiques d'hiver de 2006 ont en revanche radicalement changé la façon dont le monde percevait le nord industriel de l'Italie. Aussi l'édition de Turin 2006 a-t-elle permis de mettre au jour le charme touristique méconnu de la ville.

"Après plus de dix ans, Turin est l'un des exemples les plus frappants d'une gestion réussie de l'héritage post-olympique", a déclaré un porte-parole du parc olympique de Turin. "L'impact sur l'image de la ville a été réellement bénéfique. Jusqu'en 2006, Turin était considérée comme une ville fermée, incapable d'accueillir le changement, la diversité et les touristes."

"Grâce à 2006, tout a changé. Les données montrent à quel point le travail a été bien fait. Jusqu'en 2006, Turin comptait à peine un million de touristes par an. Une fois les Jeux terminés, ce nombre s'est littéralement envolé et a atteint près de six millions. Forte de cette augmentation, Turin est devenue l'une des villes les plus touristiques du pays, juste après Rome, Venise et Florence. Avant 2006, seuls 40 % des clients du domaine skiable franco-italien appelé la Voie lactée étaient des étrangers. Aujourd'hui, ce chiffre est d'environ 85 %."

Les Jeux de Turin 2006 ont été novateurs : ils ont en effet été les premiers Jeux d'hiver organisés en Europe à adopter un modèle d'accueil ville/montagne. Les sports de glace se sont disputés au cœur de la ville, tandis que les compétitions des sports de neige ont été organisées en montagne. L'unité du territoire olympique a ainsi permis de positionner la région comme une destination plus touristique.

© Richard Juilliart

La "Fondation du 20 mars 2006" a été créée pour gérer plusieurs sites de compétitions olympiques, désormais ouverts au public comme sites sportifs et de loisirs. Cette agence privée à but non lucratif a aidé le Palasport Olimpico (qui a accueilli le hockey sur glace à Turin en 2006) à devenir l'un des principaux lieux de concerts et de divertissement en Italie, avec des artistes tels que U2, Madonna ou encore Bob Dylan qui se sont produits sur cette scène emblématique. Le Palasport Olimpico a également accueilli des essais de qualification olympique de la FIBA.

Le Palavela (patinage artistique) est un centre de conférence qui possède également une patinoire publique accueillant 30 000 patineurs chaque année. C'est aussi dans ce complexe que se sont tenus les Championnats du monde de patinage artistique.

"À partir de 2011, le site de Pala Alpitour a pu accueillir près de 369 000 personnes par an, près de 7 000 sur une moyenne de 57 événements par an", a ajouté le porte-parole.

Mais ce sont peut-être les enfants et les jeunes de la région qui ont tiré le meilleur parti des Jeux de Turin 2006.

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Vingt-cinq "initiatives d'éducation sur les anneaux olympiques" ont mobilisé plus de 600 000 écoliers, avant et après les Jeux. Ce programme éducatif a consisté en un ensemble diversifié de projets, tous axés autour des cinq anneaux. Par exemple, le "cercle rouge du sport et de la culture sportive" a permis à 6 500 élèves d'écoles du Piémont de visiter le Musée Olympique de Lausanne entre 2002 et 2006. En 2008, le "projet scolaire TOP 2006" a quant à lui permis à plus de 10 000 enfants de s'essayer au sport sur différents sites de Turin 2006.

"Il est difficile d'évaluer le nombre d'enfants qui ont commencé à pratiquer les sports d'hiver ou qui se sont intéressés à ces sports suite à la tenue des Jeux de Turin 2006, mais ce qui est sûr, c'est que la popularité des sports d'hiver dans cette ville a augmenté", a indiqué le porte-parole.De fait, en 2015, Turin a été nommée capitale européenne du sport. S'agissant du ski alpin, deux millions de skieurs pratiquent ce sport en Italie, principalement dans les régions du nord."

"Les athlètes qui pratiquent à un tel niveau, dans un lieu qui leur est familier, ont dû être une source d'inspiration pour beaucoup d'autres. Après 2006, la délégation italienne a connu un grand renouvellement d'effectif. Plusieurs des nouveaux athlètes qui l'ont intégrée étaient très jeunes et on pouvait voir qu'ils avaient été inspirés par le fait d'avoir été témoins d'un événement d'une telle envergure, qui plus est disputé à domicile. Sofia Goggia, Marta Bassino, Nadia Delago, Dominik Paris et Alex Hofer étaient encore adolescents. Difficile d'imaginer qu'ils n'aient pas été influencés par un événement aussi unique."

Le volontariat a également été dynamisé par les étudiants universitaires, dont bon nombre ont travaillé aux côtés d'experts en multimédia pour la préparation des Jeux. En tout, 515 étudiants se sont inscrits à des formations diplômantes en production télévisuelle et diffusion et 400 d'entre eux ont travaillé comme volontaires pendant les Jeux.

D'autres programmes ont également été couronnés de succès. Turin a été la première ville olympique européenne à adopter le système de gestion environnementale et d'audit (EMAS) afin de mettre en œuvre des lignes directrices dans le domaine de l'environnement, lesquelles ont contribué à compenser les deux tiers des émissions de gaz à effet de serre des Jeux.

Un programme de Trêve olympique a par ailleurs permis de récolter plus de 500 000 euros, grâce auxquels 25 000 enfants vivant dans des pays en guerre ont été vaccinés contre la polio, la rougeole et la méningite. En outre, le projet visant à débarrasser les sites olympiques de Sarajevo 84 des mines terrestres a permis d'aider la ville avec une contribution de 150 000 euros du comité d'organisation de Turin et des municipalités du Piémont.

Le centre régional antidopage Alessandro Bertinaria a également été créé à l'occasion des Jeux et sert encore aujourd'hui de centre de recherche scientifique. Afin de protéger les athlètes intègres et confondre les tricheurs, le centre concentre principalement ses recherches sur les méthodes et procédures visant à déceler la prise de substances dopantes.

Parmi les facteurs les plus importants des Jeux figure le sentiment de bien-être, lequel perdure.

"Outre les infrastructures et toutes les initiatives lancées, l'esprit olympique est toujours présent", a commenté le porte-parole du parc olympique. "Toute la perception d'une ville, autrefois considérée comme étroite d'esprit, a changé. Treize ans plus tard, la fierté n'a pas disparu. Peut-être que les souvenirs ne sont plus aussi clairs qu'avant, mais tout un chacun s'en souvient comme d'un moment historique pour la ville, et partant pour tout le pays."

C'est un changement que Milan-Cortina d'Ampezzo pourrait à son tour connaître en 2026.

"Compte tenu de l'environnement florissant de Milan, où de nombreux investisseurs et entreprises s'installent, les Jeux Olympiques sont la cerise sur le gâteau", a précisé le porte-parole.

Et de conclure : "Outre les nombreux débouchés offerts à Milan, Cortina tirera également fortement parti des Jeux sur le plan économique. Depuis de nombreuses années, Cortina est l'une des étapes préférées des athlètes sur l'ensemble du circuit de ski alpin. C'est de plus un lieu emblématique de par son histoire."