Une herbe plus verte à Paris ? Andrea Giani, le sélectionneur italien de l’équipe de France de volleyball revient sur son adaptation aux Bleus

Plusieurs Fédérations françaises ont fait appel à des spécialistes étrangers pour optimiser leurs chances de médailles aux Jeux Olympiques de Paris 2024. Fernando Rivas en badminton, Oh Seon Tek en tir à l'arc... Olympics.com vous présente ces experts reconnus dans le monde entier chargés de mener les athlètes français vers des sommets. Avant l'étape d'Orléans de la Volleyball Nations League (VNL) 2023, apprenez-en plus sur Andrea Giani et comment une légende du volleyball italien s'est adapté à son rôle de sélectionneur des Bleus.

6 minPar Gisella Fava et Nicolas Kohlhuber
Andrea Giani is the Volleyball French head coach since 2022
(FFVolley)

« Il n’y a pas eu d’hésitation. Quand l’opportunité d’entraîner l’équipe de France s’est présentée, j’ai sauté dessus. »

Andrea Giani est le sélectionneur des volleyeurs français depuis mars 2022 et à en croire ses confidences à Olympics.com, ce défi l’a tout de suite séduit.

Le challenge est pourtant de taille. L’Italien a été nommé à la tête d’une équipe nationale qui n’est pas la sienne et qui reste sur une médaille d’or aux Jeux Olympiques de Tokyo 2020 avant d’évoluer à domicile pour les JO de Paris 2024. La pression est énorme mais elle ne l’effraie pas, car il en a vu d’autres.

Alors que le quinquagénaire part d’une page blanche en France, ses 474 sélections, trois titres mondiaux et trois médailles olympiques en font une légende de l’autre côté des Alpes.

Pour pouvoir pleinement utiliser son vécu, réussir son adaptation est la clé. La présence de joueurs entraînés à Modène comme Earvin Ngapeth ou régulièrement croisés en SuperLega l’aide, mais elle ne fait pas tout…

Pour Andrea Giani, comprendre la culture et aussi important qu’apprendre la langue

La langue est évidemment le premier obstacle pour un entraîneur qui opère loin de son pays natal. Au quotidien, Andrea Giani jongle entre l'italien parlé par de nombreux joueurs, l'anglais pour échanger avec son staff et le français utilisé dans la vie de groupe et qu'il apprend. Ses progrès ont déjà été remarqués, mais cela ne lui suffit pas.

Le tacticien compte profiter de sa saison 2023/24 dédiée à l'équipe de France pour progresser au point de répondre aux obligations médiatiques dans la langue de Molière quand les JO débuteront. S'il se donne du temps, c'est parce que selon lui, la langue n'est pas la priorité pour réussir son adaptation.

« Je crois que la différence en entraînant des athlètes d'un autre pays n'est pas d'ordre technique, mais d'apprentissage de la culture sportive de ce pays. Si vous ne l'apprenez pas, vous n'entrez pas dans la dynamique de votre équipe. »

Pour l'ancien entraîneur de Modène, comprendre l'organisation de la fédération, les relations entre les différentes entités et les athlètes est la clé du succès. Le sélectionneur a autant à apprendre de ses joueurs que l'inverse et c'est encore plus vrai quand il est question d'adopter une nouvelle culture.

« La structure sociale et sportive du pays est la première chose que vous devez apprendre, afin de ne pas apporter et transférer toute votre expérience et votre caractère italien à votre groupe. C'est vous qui apprenez d'eux. Une fois que nous avons commencé à comprendre les mécanismes et à apprendre, nous commençons à mélanger les expériences. »

L'apprentissage d'Andrea Giani en Bleu n'est pas terminé. Après avoir compris que les Bleus formaient une véritable famille et qu'il en faisait désormais partie, son baptême se fait toujours attendre. À l'image des néo-internationaux, son groupe attend qu'il chante au milieu du terrain lors d'un regroupement.

Ce défi qui le fait sourire s'est corsé l'an passé quand la Volleyball Nations League, sa première compétition avec l'équipe de France, s'est terminée par un succès. Désormais, c'est en français qu'il doit chanter !

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Mettre ses joueurs dans les meilleures dispositions mentales

Si Andrea Giani n’a aucun souci pour se faire comprendre des joueurs tricolores, c’est aussi parce que sa communication est non-verbale. Sa vision du rôle d’entraîneur est très claire, surtout quand il est question de coacher certains des meilleurs volleyeurs de la planète.

Pour lui, son rôle est surtout celui d’un accompagnateur dont la place est en retrait une fois l’heure du match arrivée.

« Je participe au jeu parce que je suis sur la touche, que je suis l'action. Je me réjouis quand l'un de mes joueurs marque parce qu'il y a une véritable énergie commune, mais je pense que la communication doit se faire à un niveau différent. Parfois un simple geste dit tout. Si vous entrez dans l'approche compétitive du joueur, alors vous allez être confus et l'entraîneur doit éviter ça. L'entraîneur est important dans la semaine pour planifier, tracer le parcours jusqu'au match, mais dès que l'engagement a été donné, c'est à l’athlète de jouer. »

La liberté qu’il donne à ses joueurs leur permet de s’épanouir. C’est l'un des grands objectifs du natif de Naples qui est conscient que pour être au top physiquement et techniquement, un athlète doit aussi l’être mentalement.

Pour que cela soit le cas, il a travaillé à la mise à disposition d’un coach mental pour les internationaux français, un apport extérieur déjà apprécié.

Andrea Giani sait ce dont ces joueurs ont besoin, car il a été à leur place dans le passé. Il tente aujourd’hui d’être l’entraîneur qu’il aurait aimé avoir.

« Ce qui me dérangeait, c'étaient les entraîneurs qui me criaient dessus pendant le match. Ce n'est pas comme si tu faisais exprès de faire une erreur... Tu perds en lucidité et tu te fais attaquer, ça ne va pas aider à la retrouver. C'est même une charge supplémentaire qui peut te faire couler. C'est pour ça que j'essaie d'être calme. Quand le joueur me regarde, il doit retrouver ma tranquillité d’esprit, je ne dois pas lui transmettre une nervosité supplémentaire. »

Une longue expérience olympique au service des champions olympiques en titre

Le détenteur du record de sélections en équipe d’Italie a joué pendant deux décennies au plus haut niveau, participant même aux Jeux Olympiques à cinq reprises. Il faisait partie des cadres de la Generazione di fenomeni, vice-championne olympique à Atlanta 1996 et Athènes 2004 et médaillée de bronze à Sydney 2000.

Un tel palmarès lui confère une légitimité importante et l’expérience nécessaire à l’approche des Jeux Olympiques de Paris 2024. Tenants du titre et à domicile, les Bleus sont très attendus. Cette pression aux airs d’obligation de gagner, Andrea Giani l'a déjà connue.

« La préparation sera importante pour trouver un moyen d'alléger cette pression au cours des dix prochains mois. Je l'ai vécu en tant que joueur, savoir qu'il faut gagner n'est pas facile, c'est donc un domaine où je peux aider avec mon expérience. »

Une telle compétence est aussi rare que le doublé ambitionné par les Tricolores. En cas de deuxième médaille d’or consécutive aux JO, la France serait la première nation à conserver son titre olympique en volleyball hommes depuis les États-Unis à Séoul 1988. À l’époque, les volleyeurs français et Andrea Giani avec l’Italie participaient aux JO pour la première fois.

Neuf olympiades plus tard, ils en sont des habitués et leurs destins sont liés.

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