JOJ de Dakar 2026 | Seyni Ndir Seck : « Le football, c'était plus fort que tout »
Ancienne internationale de la sélection sénégalaise, Seyni Ndir Seck a ouvert la voie à une génération d’athlètes qui se rêvent footballeuses. Olympics.com est parti à la rencontre de la désormais présidente de la commission de football féminin, qui rêve d’ouvrir le ballon rond à toutes les jeunes filles du continent africain.
Seyni Ndir Seck n’est pas du genre à rester en place.
Alors lorsqu’on lui demande de la prendre en portrait après un entretien de 30 minutes avec Olympics.com, l’ancienne capitaine du Sénégal préfère se dégourdir les jambes et bondir sur un rocher. La photo est prise, le sourire est toujours aussi vivace.
Cette spontanéité, cette énergie, c’est ce qui a permis à Seyni Ndir Seck de vivre sa passion contre vents et marées.
« Je vis mon rêve, je suis toujours dans mon rêve, je suis passionnée de foot et je travaille dans le foot. C'est toujours un plaisir de se réveiller, d'aller à la fédération, d'aller sur le terrain, d'aller à des activités avec les jeunes filles. Pour moi, il n'y a pas meilleur que ça. Je suis toujours dans mon rêve. »
Combat des stéréotypes, football des quartiers, Platoche… Embarquez dans le rêve de Seyni Ndir Seck, rencontré au Sénégal lors de l’édition 2023 du Festival Dakar en Jeux.
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Seyni Ndir Seck a taclé les stéréotypes pour réussir dans le football
Si en 2002, le Sénégal vibre aux exploits de son équipe de football masculine qui se qualifie en quarts de finale de la Coupe du monde, les Sénégalaises rentrent aussi dans l'histoire.
Pour la première fois, une sélection nationale féminine sénégalaise est créée et participe à la phase éliminatoire de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Dans cette sélection, on trouve une certaine Seyni Ndir Seck.
« En 2002, je suis dans cette équipe-là. C'est une grande victoire pour tous les combats que j’ai dû mener durant mon enfance pour convaincre les gens que c'est un sport comme les autres, que j'avais le droit de faire du foot. »
Rien n’a été facile pour l’ancienne capitaine du Sénégal, qui a dû faire accepter à sa famille sa passion et combattre de nombreux stéréotypes pour continuer à simplement jouer au football.
« J'ai débuté le football, comme beaucoup de jeunes Africains, dans la rue. J’ai directement senti que c'était ça que je voulais faire et je me suis donné tous les moyens pour ça. Pour mes parents, ce n'était pas évident. Pour la communauté, ce n'était pas évident. Mais, j'ai été têtu et je me suis accrochée. »
« Ici, le football est vu comme un sport d'hommes. Il y a beaucoup de stéréotypes qui font que quand tu fais du foot, on dit que ‘tu vas être musclé, tu vas être un garçon manqué et dans la rue, tout le monde va te montrer du doigt’. Mes parents, ça ne leur faisait pas plaisir. Mais, j'ai fait des compromis avec eux et ils l'ont utilisé positivement. Genre si tu as de bonnes notes, tu peux faire du foot. »
Au début de sa carrière de footballeuse qui l’emmènera jusqu’au capitanat du Sénégal, Seyni Ndir Seck est également soutenue par ses frères qui lui ont octroyé un surnom qui la poursuit encore aujourd’hui : Platoche, en hommage à Michel Platini.
« Mes frères ont été mes premiers supporters. Un jour, ils jouaient, je passais par là et j'ai donné un coup de tête dans le ballon et ils m'ont applaudi. Ils ont dit Platoche et c'est parti de là, je savais même pas qui était Platini et toute mon enfance, je passais mon temps à me bagarrer parce qu'on m'appelait Platini. Puis, de fil en aiguille, c'est devenu mon surnom. À l'école, dans mon quartier, partout, les gens m'appelaient Platoche et je me suis familiarisée avec ça, donc c'est vraiment drôle. »
Au fur et à mesure de son parcours, Platoche réussit à se faire un nom au Sénégal et intégrer des équipes 100 % féminines, chose rare à l’époque.
« J'ai toujours joué avec les garçons dans mon quartier, il n'y avait pas d'équipe de filles. Le jour où la première fois que j'ai joué avec une équipe de filles, personnellement, c'était déjà une victoire ! »
Seyni Ndir Seck : « Je veux qu'il y ait une multitude de Seyni au Sénégal »
Désormais, Seyni Ndir Seck veut utiliser son expérience et son parcours au profit des jeunes filles sénégalaises qui se rêvent footballeuses et qu’elles puissent obtenir autant de chance de réussite qu’un garçon.
« Le parcours que j'ai eu m'a donné une certaine motivation. J'ai beaucoup galéré pendant mon enfance pour faire du foot. Je m'étais toujours dit que le jour où j'arrête le football, je vais tout faire pour que les filles des quartiers puissent avoir l'opportunité d'aller jouer, sans gêne, sans que leurs parents leur disent non, prétextant que le foot, c'est un sport de garçons. »
Ainsi, l’ancienne footballeuse a créé l'association Ladies' Turn, le football féminin au cœur du quartier. Le but ? Rendre le football accessible à toutes les jeunes filles sénégalaises.
« Ladies’ Turn, c'est mon petit bébé. C'est le foot qui m'a donné l'estime que j'ai pour moi, la confiance que j'ai. Tous les défis que j'ai, c'est le foot, mon caractère, mon tempérament. Tout est foot. »
« Mon rêve, c'est aujourd'hui de voir les filles jouer au football partout au Sénégal, comme les jeunes garçons. C'est mon rêve le plus grand. »
Ainsi, Seyni Ndir Seck et son association parcourent les quartiers pour faire découvrir le football féminin à tous, même les plus récalcitrants. Un grand coup de pied aux stéréotypes.
« On voulait vraiment jouer au cœur des quartiers pour montrer aux parents que le football, c'est un sport comme les autres et qu’ils soient plus indulgents envers leurs enfants pour faire du foot. »
« Dans les quartiers, il fallait déjà s'imposer et avoir une part de terrain. Nous sommes allés vers eux, on a fait des compromis et à la fin, ce sont eux qui nous arbitrent, qui nous prépare le terrain au jeu. »
Depuis 2009, Ladies’ Turn parcourt les quartiers, mais désormais l’ambition se tourne vers les écoles, le socle éducatif de la jeunesse sénégalaise.
« Il est possible de réussir à l’école et dans le sport. Tout dépend de l’environnement et de l'accompagnement. Moi, mon combat, c'est vraiment ça. Maintenant, notre slogan, c'est le football féminin dans les murs de l’école. »
Avide de partager son vécu, la présidente de la commission de football féminin au sein de la fédération sénégalaise reste conscience des obstacles qui subsistent pour les jeunes filles sénégalaises.
« Si une jeune fille vient me voir, je lui dirai qu’il faut être tenace, il faut s'accrocher. Ça ne va pas être facile de croire en ses rêves et de ne pas tout le temps écouter ce qui se dit, mais à la fin, tu vas avoir un résultat positif. »
« Je veux qu'il y ait une multitude de Seyni au Sénégal, qu'elles puissent se surpasser et aller au bout de leur rêve. »
Alors que Dakar s’apprête à accueillir les Jeux Olympiques de la Jeunesse en 2026, Seyni Ndir Seck démontre une nouvelle fois que l’hospitalité du peuple sénégalais.
« On sera prêt et on va accueillir tout le monde à grands bras. Ils vont manger du thieb, il y a de beaux poissons et on est contents d'accueillir les gens ici dans la terre sénégalaise, le pays de la Teranga. »