Volleyball Nations League 2024 : L’équipe de France sait profiter de sa camaraderie pour transformer les frustrations en médailles

Par Nicolas Kohlhuber
7 min|
Kevin Tillie with Team France
Photo de World Volleyball

L'équipe de France de volleyball hommes entame un été qui s'annonce intense !

La VNL 2024 qui a débuté ce mardi 21 mai et les Jeux Olympiques de Paris 2024 à domicile vont s'enchaîner. Pendant trois mois, les Bleus vont vivre ensemble. Leur quotidien sera rythmé par des matchs intenses, des voyages sur trois continents et des séances d'entraînement pour monter en puissance jusqu'aux JO. Aussi chargé soit-il, ce programme n'a rien d'éreintant pour la Team Yavbou car l'ambiance qui règne dans ce groupe de potes apporte la légèreté pour faire face aux attentes les plus élevées.

« Chaque été, on passe plusieurs mois tous ensemble dans des hôtels. Je crois qu'il y a pas mal de groupes qui n'arrivent pas à gérer. Nous, on est contents de se revoir et de passer tous ces moments ensemble. On a tellement une bonne cohésion de groupe qu'on va pouvoir progresser et s'entraîner vraiment tout cet été pour arriver à notre meilleur niveau », estime Kevin Tillie dans une interview exclusive avec Olympics.com.

Chez les volleyeurs français, l'amitié est un atout aussi important que le talent. Ces frères d'armes ont répondu présent à chaque bataille depuis plus d'une décennie et en ont gagné certaines des plus prestigieuses pour écrire l'histoire. Alors qu'il y a dix ans, le volleyball français n'avait encore jamais gagné le moindre titre, l'or olympique, une couronne continentale et trois victoires en Ligue des nations (anciennement Ligue mondiale) sont désormais à son palmarès.

Mais encore plus que les trophées, ce sont les éliminations qui ont forgé le destin extraordinaire de cette équipe de France.

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Célébrer la défaite pour gagner de la confiance

Même la défaite n’arrive pas à défaire les liens fraternels qui unissent les Bleus. C'est l'inverse, elle les renforce !

Surmonter les déceptions leur a permis de goûter à la consécration selon Kevin Tillie.

« On est passés par des moments de frustration, comme la quatrième place au Championnat du monde 2014, qu'on n'a pas envie de revivre. Je pense que ça nous motive pour aller plus loin, ça nous pousse à nous surpasser et à progresser pour aller gagner des titres. »

Le joueur de 33 ans est même allé plus loin pour expliquer la mécanique de ce groupe. Au moment de choisir un événement qui symbolise l'ambiance de la Team Yavbou, il a laissé de côté les célébrations de victoires pour mettre en avant les réunions qui suivent les défaites.

« On se retrouve tous ensemble sur la terrasse de l’hôtel et on parle beaucoup, on rigole. Même après les plus grosses défaites, on est tous ensemble, presque à fêter notre défaite, à se dire qu'on va revenir et qu'on est toujours ensemble pour continuer. Ce sont des moments de cohésion qui sont vraiment importants où on se dit les choses. On est déçus, mais on en rigole presque : c'est top d'avoir cette ambiance », explique celui qui admet que cela peut paraître fou.

La folie faisant partie de l'ADN de cette équipe, cela fonctionne.

Les succès de Kevin Tillie, Earvin Ngapeth, Benjamin Toniutti & co prouvent que ce moyen d'exorciser les souvenirs les plus douloureux de leur aventure en équipe nationale est efficace. Et c'est particulièrement vrai dans leur quête du titre olympique.

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Kevin Tillie : « Chaque équipe a peur de nous parce qu'on peut gagner, même si on n'est pas à notre meilleur niveau »

La quête de la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Tokyo 2020 n’a pas commencé au Japon pour les volleyeurs français. Le départ de cette aventure hors norme a été donné cinq ans plus tôt à presque 20 000 km de l’Arena Ariake avec trois défaites en cinq matchs aux JO de Rio 2016.

Cette génération découvrait alors les Jeux Olympiques. Après 12 ans d'absence, la France était directement propulsée parmi les favoris grâce au doublé Ligue mondiale - Championnat d'Europe réalisé l'année précédente.

Ce statut n’a pas été suffisant pour éviter une élimination dès le tour préliminaire, un échec douloureux qui a construit les Bleus.

« Rio 2016 a été difficile et frustrant, mais c'est peut-être grâce à cela qu'on a gagné la médaille d'or à Tokyo 2020. Il y a des choses qui ont pu nous faire progresser et qui nous feront peut-être gagner une médaille à Paris 2024 », explique Kevin Tillie.

Il n’oublie d’ailleurs pas que le scénario aurait pu se répéter aux JO de Tokyo 2020.

Après une lourde défaite inaugurale face aux États-Unis (0-3), le groupe de Laurent Tillie s’était qualifié de justesse pour les quarts de finale. Au tour préliminaire, deux de ses trois défaites en cinq matchs avaient eu lieu dans le cinquième set, juste assez pour éviter de finir à une des deux dernières places du groupe B.

Le reste appartient à l’histoire et démontre la faculté des Français à se faire confiance pour ne jamais abdiquer. Ils se sont transcendés, car ils savaient qu’ils pouvaient compter les uns sur les autres.

« Même si on est dans les plus grosses difficultés dans un tournoi, on peut se relever. On était vraiment dos au mur, mais on a un groupe tellement fort qu'on arrive quand même à se relever, à se qualifier et à gagner jusqu'à la fin. Tous les jours dans le village, on a passé des super moments entre nous pour pouvoir gagner ces matchs. C'est ça qui est fou. On avait un objectif tous ensemble dans ce groupe : gagner cette médaille. On l'a fait et c'était dingue avec une équipe comme ça », se remémore Kevin Tillie avec le sourire.

La médaille d’or est un bonus qui vient sublimer les relations humaines. Elle prouve aussi que cette équipe n’est pas faite comme les autres. Qu’importent les difficultés, elle possède un supplément d’âme pour renverser des montagnes.

« On sait qu'on a un groupe fort et que quoi qu'il arrive, on peut gagner n'importe quel match. Et on sait que chaque équipe a peur de nous parce qu’elles savent qu’on peut gagner, même si on n'est pas à notre meilleur niveau ».

Il faudra au moins ça au moment où la « chance unique » de défendre son titre olympique à domicile se présente.

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Une camaraderie à transmettre à la nouvelle génération du volleyball français

Les JO de Paris 2024 sont un énorme défi pour cette équipe de France de volleyball. Jamais sur le podium olympique avant Tokyo 2020, elle va tenter de gagner un deuxième titre d’affilée.

Mais le vrai challenge pourrait se trouver ailleurs.

Les membres de la Team Yavbou ont tous la trentaine et certains pourraient disputer leur dernière grande compétition internationale à l’Arena Paris Sud. Une nouvelle génération emmenée par Timothée Carle est responsabilisée chez les Bleus, mais elle doit aussi s’approprier les valeurs de ce collectif.

Les anciens y veillent.

« On a cette cohésion de groupe depuis des années, il faut vraiment la transmettre et continuer dans ce sens avec les jeunes qui arrivent, leur montrer ce que c'est d'être dans une équipe pendant quatre ou cinq mois tous ensemble, d’avoir une concurrence saine », détaille celui qui a été surnommé Tonton Kev par les plus jeunes dont Barthélémy Chinenyeze au début de la VNL 2023.

Il essaie de faciliter l’intégration des jeunes. Ce rôle le stimule et est d’autant plus facile à endosser depuis que Laurent Tillie, son père, n’est plus le sélectionneur des Bleus.

« Ça m’a donné un peu plus de liberté », admet-il.

Même si le staff a changé, l’état d’esprit de l’équipe de France est resté le même. Andrea Giani s’est adapté à sa nouvelle famille et n’a pas hésité à y mettre du sien.

L’Italien avait rapidement fait un pari avec ses joueurs : en cas de victoire à la VNL 2022 pour lancer son mandat, il allait chanter en français au milieu du terrain pendant un entraînement.

Le genre de célébrations qui pourrait donner des airs de colonie de vacances à n'importe quel été de dur labeur.

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