Volleyball | Earvin Ngapeth : « Pouvoir défendre la médaille olympique à Paris, c'est une chance incroyable »
Dans un entretien exclusif avec Olympics.com, la star de l’équipe de France de volleyball s’est confié sur ses ambitions pour les Bleus, les leçons tirées des échecs passés, sa relation avec le sélectionneur Andrea Giani et nous révèle ce qu’il nous prépare pour l’après-carrière. En toute simplicité.
Earvin Ngapeth n’est pas rassasié.
L’un des plus beaux palmarès du volleyball français compte bien réussir le doublé olympique aux Jeux de Paris 2024. S’il rêve grand pour l’équipe de France, Earvin Ngapeth connaît les sacrifices nécessaires pour répéter l’exploit d’un titre olympique.
« Il va falloir être dans sa bulle, rester ensemble, rester ensemble tout le temps. C’est quelque chose qui va être primordial à Paris. »
Leader et tête d’affiche de son sport dans l'Hexagone, Earvin Ngapeth, s’apprête, à 32 ans, à disputer ses troisièmes Jeux.
C’est donc avec toute son expérience, que l’international français s’est épanché sur les recettes qui pourraient mener les Bleus une nouvelle fois au sommet de l'Olympe, mais également sur les écueils à éviter ainsi que ses ambitions pour le prochain Championnat d'Europe masculin de volley-ball 2023 (28 août - 16 septembre). Le tout en nous révélant quelques indices précieux sur sa fin de carrière. Avec le sourire, forcément.
Earvin Ngapeth : « Jouer à la maison, un avantage qui peut vite devenir un inconvénient… »
Si certains athlètes évoquent les futurs Jeux Olympiques de Paris 2024 de manière très succincte, par superstition ou par crainte de dévoiler leurs futures ambitions, ce n’est pas le cas d’Earvin Ngapeth. Il ne cache pas son impatience de défendre le titre olympique acquis à Tokyo 2020, où il avait fini meilleur joueur du tournoi, mais toujours en abordant les Jeux de manière collective.
« On en parle beaucoup (des Jeux Olympiques à Paris) avec notre équipe. On a hâte d'y être, ça va être un truc incroyable. Pouvoir défendre la médaille olympique à Paris, c'est une chance. »
Earvin Ngapeth pense groupe, réfléchit collectif, le « on » et le « nous » prennent le pas sur le « je ». Comme sur le terrain, il a un coup d’avance, anticipant les éventuels obstacles qui pourraient se dresser sur la route des Bleus.
« Il va falloir se préparer mentalement parce que jouer à la maison, c'est un avantage, mais ça peut vite devenir un inconvénient avec les sollicitations : les journalistes, la famille, les copains… Il va falloir rentrer vite dans notre bulle pour aller défendre notre titre. »
Bulle, mental, groupe… Earvin Ngapeth tient un discours proche d’une formule gagnante dans les sports collectifs. Ses deux précédents JO l’ont aidé à savoir appréhender le mieux possible une échéance comme la défense d'un titre olympique à domicile. Aux Jeux de Rio 2016, l’équipe de France, championne d’Europe en titre, avait été éliminée dès la phase de groupe. Un échec qui a marqué Earvin Ngapeth.
« Les Jeux, c’est quelque chose qui se prépare. À Rio 2016, on n'était pas du tout prêt au truc. On s'est fait manger par les Jeux à Rio, on s'est fait manger par le village, on s'est fait manger par tout ce qui se passait autour, on s'est fait manger par vouloir aller voir les Américains jouer au basket, l'athlétisme avec Usain Bolt. On voulait aller voir tout le monde. »
Cinq ans plus tard, l’équipe de France ira remporter son premier titre olympique à Tokyo. À Paris, elle sera encore sous pression : celle qui accompagne un favori à la médaille d'or.
« À Tokyo, on était prêt par contre. Ce qui a été important à Tokyo, c'était de rester ensemble, tout le temps. Donc ça, c'est quelque chose qui va être primordial à Paris. Et à Paris, c'est même pas prêt qu'il faut être. Paris, chez toi, il faudra être dans ta bulle sans rien regarder autour. Il faut se préparer […] parce que c'est vraiment quelque chose. Rio nous a servi pour Tokyo et Tokyo, nous servira pour Paris. »
Earvin Ngapeth, un leader d’expérience
La réussite d’Earvin Ngapeth se situe également dans son plaisir du jeu. Son style créatif et brillant offensivement se nourrit d’un certain détachement à l’enjeu, le rendant capable de sortir des attaques inédites à des moments sous haute pression. « Pour moi, le volley, c'est kiffer. Faire le spectacle, faire le show, sourire, rigoler avec l’adversaire… Je prends le volley comme un jeu, comme une partie de plaisir. C'est comme ça que je joue le mieux et que je me sens le mieux. Si on me voit le visage serré pendant un match, ça veut dire que c'est pas bon. »
Mais sous le sourire d’Earvin Ngapeth se cache également un leader capable de transmettre aux jeunes promesses de l’équipe de France ou d’aider Andrea Giani, sélectionneur de l’équipe de France, à prendre ses marques à la tête des Bleus, notamment en remportant la Ligue des Nations 2022 quelques mois après son arrivée.
« (Andrea Giani), c’est mon coach en club. Il a coaché beaucoup de joueurs de l'équipe, en club, donc il nous connaît super bien. Il a ce truc là de l'humain, qui pour nous est super important. Ça fonctionne super bien, On se comprend vite. Moi en ayant ce poste de leader, même si je ne suis pas le seul dans l'équipe, c'est plus facile pour communiquer au groupe. »
Avant les Jeux Olympiques de Paris 2024, la France disputera le Championnat d'Europe de volley-ball 2023 du 28 août au 16 septembre 2023.
« L'Euro, c'est un objectif super important pour nous, parce que le dernier Euro que l'on a gagné, c'est 2015. Après, on a eu la chance de pouvoir organiser un Euro en 2017, où on perd à Bercy dans une salle pleine de joie. Une défaite qui nous a fait mal. Et depuis, on n'a pas fait un seul bon Euro. Après pour les Jeux, on aura le temps de faire la préparation, le temps de se préparer vraiment pour les JO. »
Si le Championnat d’Europe est un objectif majeur pour Earvin Ngapeth, il sera surtout le dernier terrain de jeu avant les Jeux Olympiques de Paris 2024 et pourrait permettre au groupe qui défendra son titre olympique de se structurer.
« On a la chance d'avoir au moins la moitié de l'équipe qui va faire ses troisièmes Jeux, qui peut transmettre, expliquer nos expériences. Mais surtout, on a la chance d'avoir des jeunes à l'écoute et motivés, pas seulement par le fait d'arriver en équipe de France, mais de gagner. Et ça, c'est super important. »
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Earvin Ngapeth sur l’après-JO : « Je pense qu’on a envie d’arrêter ensemble »
À l’évocation d’une éventuelle retraite internationale après les JO de Paris 2024, Earvin Ngapeth ralentit. Comme avant un service smashé, l’un de ses points fort, il prend son temps avant de s’élancer dans une réponse et choisit précautionneusement ses mots.
« Je ne sais pas parce que physiquement, je suis bien. Mentalement, je suis bien. Le seul truc, c'est de se dire que tu repars sur (un cycle de) quatre ans. Et repartir sur quatre ans jusqu'à Los Angeles 2028, je trouve que ça va être dur. Ça fait depuis 2010 que je suis en équipe de France, que je fais tous les étés. Pas de vacances. Je ne m'arrête jamais. Et j'ai des enfants qui grandissent... Donc partir chaque été, c'est compliqué. Mais tant qu'il y a le physique, la passion et le mental, tu continues. »
De réflexion individuelle, sa retraite internationale prend ensuite la dimension collective. « Je pense que ce sera une décision vachement collective ça. Avec les autres collègues qui sont là depuis longtemps, car je pense qu'on a envie d'arrêter ensemble. Donc on aura une discussion à un moment donné. “On fait quoi ? On repart pour quatre ans, on ne repart pas pour quatre ans ?” On verra. »
Une chose est certaine, Earvin Ngapeth saura soigner sa sortie de scène.
« À un moment donné, moi, si je sens qu'il y a un jeune qui arrive, qui est prêt, je lui laisserai ma place. Pour moi, c'est logique. Mais tant que je ne sens pas qu'il y en a un qui est prêt, je ne bouge pas. (rires) »
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