Tennis de table | Alexis et Félix Lebrun évoquent leurs duels fraternels : « Je regarde des vidéos de lui »
Demi-finales des Championnats de France 2022, finale des Championnats de France 2023, quarts de finale du Top 16 européen 2024 : les duels entre Alexis et Félix Lebrun deviennent une habitude.
Les deux frères qui ont tant gagné l’un avec l’autre pourraient jouer de plus en plus souvent l’un contre l’autre. C’est le revers d’une médaille aussi brillante que le parcours de cette fratrie qui bouleverse le tennis de table mondial.
En prétendant aux mêmes titres, en participant aux mêmes compétitions et en faisant tous les deux partie du top 25 mondial, leurs chemins sont destinés à se croiser autant sur le circuit mondial que dans la maison familiale. Et ce n'est pas toujours pour plaire à leur entourage.
« En finale, je suis forcément contente parce qu’ils auront été au bout de ce qu’ils pouvaient faire avant de se retrouver, mais on ne profite pas autant. On espère du beau ping, du spectacle, on apprécie chaque point et que le meilleur gagne », explique Dominique Legoût-Lebrun, leur maman, avant de poursuivre.
« On est content pour celui qui gagne mais triste pour celui qui perd. C’est un sentiment mitigé mais on est heureux de les voir jouer ensemble à ce niveau. »
Le constat est le même pour Nathanaël Molin, leur coach de toujours. Celui qui a été élu entraîneur de l'année de l'année 2023 par l'ITTF explique même se mettre en retrait quand l'heure est venue pour les deux prodiges du ping de s'expliquer.
« On ne prépare pas ce genre de matchs, ils se débrouillent, c’est leur moment à eux, ce sont leurs histoires. C’est le seul moment où je n’interviens pas du tout. »
Si cela rend ces duels fraternels encore plus spéciaux, les deux frangins font tout pour les banaliser. Un peu comme ils ont fait des performances exceptionnelles leur quotidien depuis maintenant deux ans.
LIRE AUSSI - Alexis et Félix Lebrun, aussi forts dans la tête qu’avec une raquette
Alexis Lebrun contre Félix Lebrun : Un frère ? Quel frère ?
De leur cave à Montpellier jusqu'aux entraînements à l'INSEP, Alexis et Félix Lebrun ont joué des milliers de matchs l'un contre l'autre. Mais quand vient le moment de préparer des retrouvailles en compétition, il n'y a plus de famille qui tienne et ils tentent de mettre ce passif de côté.
« J'essaye de me préparer comme quand je joue contre un autre adversaire », avoue Félix Lebrun dans une interview exclusive avec Olympics.com. « Je regarde des vidéos de lui, même si je le connais par cœur, juste pour me mettre vraiment en mode match dans ma tête. Comme on joue tout le temps à l'entraînement ensemble, il faut réussir à se mettre dans ce mode-là parce que c'est un peu différent. C’est comme ça que je joue le mieux, c’est comme ça que j’y arrive : en faisant vraiment tout comme si je jouais un adversaire différent. »
Son grand frère confirme que même si ces matchs sont « un peu particuliers », il faut les aborder comme tous les autres. La manière dont ils se donnent dans l'échange et crient entre les points prouve que les sentiments n'ont plus d'importance quand la domination familiale est en jeu.
« Quand on doit se jouer, on se donne à fond et on essaye de se faire la guerre pendant le match. Pendant le temps du match, c’est un match comme un autre, c’est un adversaire comme un autre et après ça redevient comme avant et on se soutient. »
Ce même point de vue sur ces matchs épiques prouve que même dans la confrontation, ils sont d'accord. Un véritable symbole de leur entente qui les tire vers le haut. Il faut pourtant être fort mentalement pour oublier toute une vie passée ensemble, de l'école primaire au podium des Jeux européens 2023.
« Il faut essayer de couper un peu le lien qu'on a pendant une demi-heure, pendant la durée du match, parce qu’il faut réussir à se battre à 100 % », détaille Féfé.
Malgré cet état d'esprit, le cadet de la fratrie court toujours après une première victoire en compétition sur son aîné...
LIRE AUSSI - Calendrier du tennis de table aux JO de Paris 2024
Le classement pour Félix Lebrun, les confrontations directes pour Alexis Lebrun
Félix Lebrun est désormais 5e au classement mondial et n’a perdu que 4 matchs face à des joueurs européens au cours des 12 derniers mois. Parmi ces quatre défaites, deux ont eu lieu face à son grand frère.
La série d'invincibilité d'Alexis Lebrun s'étire dans cette rivalité familiale qui les transcende plus qu'elle ne les oppose.
« C'est un petit truc entre nous, un petit défi. J'ai envie de pas le perdre et lui a envie de me gagner, donc ça nous pousse vers le haut. Et puis ça me permet de le chambrer un peu plus parce que maintenant qu'il est passé devant au classement, il faut bien que je trouve des trucs pour pouvoir le chambrer. Au moins je peux continuer à me défendre quand il me taquine », avoue en rigolant le pongiste de 20 ans qui est dans une situation paradoxale : 22e mondial, champion de France en titre et pourtant pas le numéro 1 dans sa famille.
Son petit frère n’est pas frustré par cette série sans victoire qui a débuté au plus jeune âge. Malgré ses 17 ans, il a même la maturité suffisante pour l’expliquer.
« Depuis tout petit, quand je jouais, il a toujours été meilleur que moi et il a toujours été plus grand. Donc vraiment, au départ, il y avait un grand écart. L'écart s'est réduit un petit peu, mais il a quasiment toujours été devant, donc je pense que ça fait que deux ou trois rencontres qu'on commence vraiment le match à ‘50-50’. »
Si ces raisons semblent évidentes, d’autres sont bien plus pointues. Et elles reposent pour la plupart sur leur proximité et la connaissance de leur jeu respectif.
« Il me connaît par cœur. Un de mes gros points forts, c'est le service. Je gagne énormément de points avec mon service et sur Alexis j’en gagne zéro. Forcément pour moi c'est dur parce qu'on va dire que dans l'échange, pour l'instant, je ne suis pas au niveau de mon service. En tout cas par rapport aux meilleurs joueurs du monde », détaille le récent demi-finaliste du WTT Smash Singapore.
Alors que Félix Lebrun a l’habitude de rivaliser avec les meilleurs pongistes du monde, ce sont bien les duels familiaux qui pourraient lui permettre de progresser le plus. Jusqu’à finalement battre son grand frère ? C’est son objectif depuis de long mois.
« Pour moi, ça va arriver un jour. Je ne sais pas quand, mais j'espère que ça va arriver un jour et si j'arrive à le battre, c'est que je ne joue trop mal », disait-il à Olympics.com en janvier 2023.
LIRE AUSSI - Alexis et Félix Lebrun, un changement de statut pour aller encore plus haut