Surmonter les obstacles est une seconde nature pour Melissa Seidemann, multiple championne américaine de water-polo

La domination de l’équipe américaine féminine de water-polo est sans partage. Deux fois championne olympique, la sélection américaine a remporté tous les titres mondiaux depuis 2015. Et si une ultime défaite face à l'Australie juste avant le confinement et le stress de la crise de la COVID-19 ont apporté leur lot de défis, la défenseure vedette Melissa Seidemann est confiante sur ses chances de succès dans les compétitions à venir...

Surmonter les obstacles est une seconde nature pour Melissa Seidemann, multiple championne américaine de water-polo
(Getty Images)

Aucune équipe n'aime perdre, mais la défenseure expérimentée Melissa Seidemann, pilier de l'équipe américaine de water-polo, est certaine que la défaite en janvier face à l'Australie est survenue au bon moment. Avec ses coéquipières, elle a remporté 31 matchs successifs en 2018, 37 en 2019 et le premier match de 2020. À cela s'ajoutent 12 victoires consécutives dans des championnats majeurs.

Mais cet enchaînement de victoires commençait à peser lourd.

"Nous ne jouions plus en équipe pour les mêmes raisons", admet Melissa Seidemann, qui n'a jamais quitté la sélection après avoir découvert le haut niveau une dizaine d'années plus tôt. "Il ne s'agissait plus de toujours essayer de gagner. Petit à petit, nous avons eu l'impression de devoir défendre un statut et cela rongeait un peu notre équipe."

"L'équipe n'y a pas prêté attention. Mais c'est arrivé à un point où c'était devenu tellement médiatisé que le groupe se disait : 'Mince, on peut vraiment atteindre cet objectif, impossible de perdre notre invincibilité. On essaye ?'"

Évidemment, à Brisbane, il régnait une atmosphère étrange dans le vestiaire après la défaite. Les joueuses ne savaient pas trop comment gérer "la frustration et la tristesse", des émotions qu'elles avaient tenu à distance pendant si longtemps.

L'onde de choc qui a suivi dans le monde entier à cause de la pandémie de COVID-19 a donné à Melissa Seidemann et à ses coéquipières tout le temps nécessaire pour y réfléchir. Et si la défaite a été digérée depuis longtemps (Melissa Seidemann a même hâte de rejouer contre ces "Australiennes incroyablement talentueuses"), le confinement a créé toute une série de nouveaux obstacles à surmonter.

La Californienne, diplômée en psychologie de l'Université de Stanford en 2013, a l'honnêteté d'admettre qu'elle a ressenti "un stress et une anxiété" considérables, en particulier au début de la pandémie. Cependant, si ses années d'entraînement en tant qu'athlète de haut niveau lui ont donné les outils pour affronter cette épreuve, elle a toujours quelques interrogations sportives sur le long terme.

"Aujourd'hui, la COVID-19 nous divise plus que jamais, juste parce que chacun y réagit différemment, pas forcément en bien ou en mal, mais un peu différemment. La structure familiale de chacun est unique ; aussi tout le monde doit-il gérer son quotidien et son temps de manière différente", analyse Melissa Seidemann.

"Évidemment, personne ne se lance dans une telle aventure sans avoir envie de gagner, donc c'est un objectif que nous avons toujours en tête, mais pour nous, tout sera si différent de ce que nous avons connu par le passé."

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La trentenaire espère que l'équipe puisse à nouveau se réunir plus tard dans l'année ou au début de 2021 et lorsque cela arrivera, elle pense que cette expérience peut servir à les unir. En tant que joueuse d'expérience emblématique, tout comme Maggie Steffens, Melissa Seidemann sait qu'elle endossera la responsabilité de l'unité de l'équipe.

Être une leader au cœur d'une culture qu'elle a elle-même aidé à bâtir n'est pas chose facile.

"Je mentirais si je disais que c'était le cas, mais cela ne me déplaît pas, c'est juste que l'expérience est très différente", rit la poloïste. L'un des aspects de notre programme auquel nous attachons le plus d'importance est l'individualité de chacune et la possibilité d'exercer ses capacités de leader. Nous attendons de nos jeunes joueuses qu'elles fassent entendre leur voix et aient leur mot à dire sur les événements."

"C'est difficile pour quelqu'un comme moi, qui a été témoin de l'évolution de l'équipe et qui a fait confiance à la culture et aux bases que nous avons établies. Mais en même temps, nous souhaitons que la dynamique de notre équipe soit fondée sur les athlètes."

Championnes du monde en 2015, 2017 et 2019, victorieuses de la Coupe du monde FINA en 2010, 2014 et 2018 et gagnantes de la Ligue mondiale FINA chaque année depuis 2014, Melissa Seidemann et ses coéquipières américaines ont tout gagné. Malgré tout, ce sont les deux médailles d'or aux Jeux Olympiques qui ressortent de cette impressionnante armoire à trophées. 

"Lorsque je repense aux points communs entre les deux, la seule chose qui me vient à l'esprit c'est à quel point l'équipe était préparée. En 2012, nous avions des leaders incroyables, des athlètes qui étaient déjà passées par là et savaient exactement comment se préparer pour les JO. Du coup, pendant la compétition, j'étais convaincue que nous avions toutes les informations nécessaires et que nous avions fait tout ce que nous pouvions."

"J'ai ressenti la même chose à Rio, mais pour des raisons différentes. À Rio, nous avions un groupe plus jeune, beaucoup moins expérimenté, mais nous avons travaillé sans relâche. Nous jouions à fond chaque minute de jeu."

"Petite nouvelle aux yeux écarquillés" aux JO de Londres, comme elle l'avoue elle-même, la poloïste a vécu une expérience personnelle très différente à Rio de Janeiro. Sa mère a subi un AVC dans l'avion lors du vol vers le Brésil.

"Pendant les Jeux, j'essayais juste de survivre. C'est difficile de relier mon expérience à ce qui s'est passé avec l'équipe", avoue Melissa Seidemann d'une voix encore très émue. "Pour être honnête, nous nous étions entraînées pour cela. Nous nous étions entraînées à affronter l'adversité. J'avais suffisamment étudié dans le cadre de mes études de psychologie du sport pour pouvoir compartimenter ce qui m'arrivait. Ce n'est qu'à la fin des Jeux que j'ai essayé de comprendre ce qui s'est passé, et c'est toujours le cas aujourd'hui d'ailleurs."

"Par conséquent, il m'est difficile de parler de ce que j'ai vécu. C'était un tel aboutissement pour l'équipe, deux médailles d'or consécutives. Beaucoup d'athlètes ont eu tellement de succès pendant ces Jeux, mais pour moi personnellement, mes émotions n'étaient pas du tout de cet ordre."

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Sa mère est en fauteuil roulant à vie et ne fera vraisemblablement pas partie du voyage à Tokyo pour voir sa fille tenter de remporter son troisième titre olympique successif. Mais elle sera représentée par son mari et saura que sa fille est prête à tout.

"Mon rêve est différent à présent. Au cours de ces quatre dernières années, j'ai beaucoup réfléchi à ce que le water-polo signifiait pour moi. J'ai toujours été la sportive obstinée qui ne voulait pas laisser son sport la définir, mais plus j'approche de la fin de ma carrière, plus je comprends que de nombreux moments clés de ma vie ont été définis par le water-polo", observe la championne.

"J'ai hâte d'être en 2021, pas tant pour les succès sportifs, mais surtout pour toutes les petites réussites qui jalonneront le parcours."

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