Selon Karin Harjo, nouvelle entraîneure en chef de Mikaela Shiffrin, le rôle d'un entraîneur consiste à créer un environnement propice à la réussite

Dans le but d'inspirer les jeunes générations de femmes à assumer des fonctions d'entraîneur, le CIO met à l'honneur des entraîneures qui ouvrent la voie à d'autres femmes. C'est le cas de Karin Harjo qui, un an après avoir été nommée entraîneure en chef de l'équipe féminine canadienne de ski alpin, relève un autre défi passionnant en devenant l'entraîneure principale de Mikaela Shiffrin, la détentrice du record de victoires en Coupe du monde.

Selon Karin Harjo, nouvelle entraîneure en chef de Mikaela Shiffrin, le rôle d'un entraîneur consiste à créer un environnement propice à la réussite
© Getty Images / Valerie Grenier (L) with Karin Harjo (R)

"Chaque fois que j'accepte un nouveau poste, je le fais pour deux raisons", explique Karin Harjo. "Premièrement, le défi que cela représente ; deuxièmement, les personnes avec lesquelles je vais avoir l’occasion de travailler. C'est ce qui m’importe vraiment. Il n'est jamais question de titre, mais de travail et de plaisir"

Les deux rôles – celui tenu avec l'équipe féminine canadienne, où elle a été la seule femme à occuper un poste d'entraîneure en chef lors de la Coupe du monde de ski alpin, et sa mission auprès de Mikaela Shiffrin - répondent à ces deux motivations. Arrivée à ce niveau après avoir été entraîneure pendant plus de 20 ans, Karin Harjo déclare : "Cela n'a jamais été un objectif que je me suis fixé, mais je n'ai jamais pensé que c'était impossible. J'ai toujours eu pour philosophie de m’efforcer de faire de mon mieux là où je me trouve et quoi que je fasse."

© IOC

"L’entraînement transcende toute notion de genre et d’origine"

Alors qu'elle se destinait à une carrière scientifique, Karin Harjo a reconsidéré l'avenir qu'elle envisageait juste avant d'obtenir son diplôme universitaire. Elle “aimait skier par-dessus tout", mais aussi le fait d’apprendre.

Avec l’entraînement Karin Harjo a réussi à concilier ces deux passions. "L'art et la science d’entraîner sont ce que je préfère, car il y a tellement d'aspects techniques mais aussi d'études et d'analyses qu’il est possible de faire pour trouver les centièmes qui permettront d'obtenir l'avantage, mais l'aspect artistique est également très intéressant. C'est ce qui fait la différence, car l’on a affaire à un être humain, et non à une machine"

À l’évidence, une combinaison d'authenticité dans la façon de communiquer et un désir sincère d'aider les autres à découvrir leur véritable potentiel ont été des éléments tout aussi importants de son évolution et de ce qui motive des athlètes de haut niveau comme Mikaela Shiffrin à la vouloir à leurs côtés.

La nomination de Karin Harjo a été annoncée peu après que Mikaela Shiffrin a battu le record de 86 victoires en Coupe du monde détenu par Ingemar Stenmark . Toutes deux viseront encore plus de succès dans les années à venir.

"Je pense que le fait d’entraîner une personne concerne ce qu’elle est vraiment et transcende toute notion de genre et d’origine", explique Karin Harjo. "Ce qui m'a motivée, c'est qu'il y a toujours quelque chose à découvrir. C'est ce qui fait la beauté du travail avec un être humain : il n'existe pas de recette universelle", ajoute Karin Harjo. "Chaque individu est unique. C'est à vous, en tant qu'entraîneur, de trouver le moyen de créer un environnement propice à la réussite de chacun."

"Je me souviens d'y avoir songé lorsque je travaillais en laboratoire. Je voulais devenir médecin parce que je souhaitais aider les gens à aller mieux - et c'est la même chose pour l’entraînement. Je ne contribue peut-être pas à guérir le cancer, mais j'aide les gens à donner le meilleur d'eux-mêmes. C'est l'une des plus belles choses que l'on puisse faire de sa vie, et c'est pour cela que je me lève chaque jour."

Posez-vous cette question : pourquoi pas moi ?"

Ayant passé une grande partie de son enfance en Norvège, Karin Harjo, née à Tokyo, s'est épanouie dans une culture où c'était la norme que garçons et filles fassent du sport ensemble. On ne lui a jamais dit qu'elle ne pouvait pas accomplir quoi que ce soit en raison de son genre, et elle n'a donc jamais pensé différemment. C'est cette conception de la vie qui l'a aidée à parvenir au stade où elle en est aujourd'hui.

"En Norvège, il n'y avait aucune séparation entre les enfants. Vous faisiez tout ce que vous vouliez faire, ensemble", raconte Karin Harjo. "Ce qui m'a toujours habitée, c'est la conviction qu'en tant qu'être humain, rien n'est impossible. Je n'ai jamais pensé que je n'arriverais pas à faire telle ou telle chose parce que j'étais une fille."

Si Paris 2024 sera les premiers Jeux Olympiques de l'histoire à parvenir à une parité numérique entre les athlètes, un long chemin reste encore à parcourir pour les entraîneurs, puisque seuls 13 % des entraîneurs de Tokyo 2020 étaient des femmes, et seulement 10 % l'étaient à Beijing 2022.

Karin Harjo pense qu'il est possible de faire davantage pour défendre l’idée que l’entraînement au plus haut niveau du sport est accessible à chacun. "Il y a différents choix de vie qui peuvent expliquer qu’il n'y ait pas plus de femmes au plus haut niveau, mais peut-être devons-nous redoubler d’efforts pour transmettre cette conviction", déclare Karin Harjo. "Ce que j'aime dire à tous ceux qui essaient de gravir les échelons dans le domaine du sport, c'est de trouver le moyen de donner le meilleur d'eux-mêmes et de se fixer des objectifs ambitieux. Plus vous serez performant, plus les portes s'ouvriront.

"Toutefois, pour les jeunes femmes qui souhaitent devenir entraîneures au plus haut niveau, il est beaucoup plus facile de l'envisager si elles voient d'autres femmes le faire. "Je dis toujours aux femmes : posez-vous cette question : pourquoi pas moi ? Le fait d'être visibles est le plus grand impact que nous puissions avoir pour ouvrir ces portes aux femmes talentueuses."

Ouvrir les portes pour les générations futures

C'est précisément pour créer des passerelles pour ces femmes talentueuses que le CIO a financé le programme Women in Sport High Performance Pathway (WISH), un programme de mentorat et de formation conçu pour former plus de 100 entraîneures de haut niveau au cours des quatre prochaines années.

"Je pense que le programme WISH est un excellent exemple d'occasions offertes aux femmes de travailler en réseau, de se rencontrer et d’évoluer", a déclaré Karin Harjo.

"Les programmes tels que WISH sont remarquables parce qu'ils permettent aux femmes d’avoir le pied à l’étrier. Ce qui est souvent le plus difficile.

"De plus, je pense que les nombreuses initiatives du CIO et d'autres organisations comme la FIS suscitent une prise de conscience croissante de l'importance de l'équité entre hommes et femmes et de la diversité.

"Je dirais que le meilleur moyen d'y parvenir est de rechercher les candidates et candidats les plus qualifiés et de ne priver personne d'une opportunité en raison de son origine, de son genre et de son orientation sexuelle mais de considérer les personnes disposant des meilleures qualifications. Et je pense que cela relèvera le niveau pour tout le monde"

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