TQO européen de lutte : Rakhim Magamadov à la quête d'un quota olympique pour poursuivre son irrésistible ascension 

Par Nicolas Kohlhuber
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86Kg FS -  Rakhim MAGAMADOV (FRA) 267
Photo de United World Wrestling / AmirrezaAliasgari

Médaillé européen et mondial cadets, vice-champion du monde juniors, double champion d'Europe U20, double champion du monde U20 et champion d'Europe U23 : Rakhim Magamadov est monté sur tous les podiums possibles dans les catégories de jeunes.

Mais à 21 ans, le lutteur français veut maintenant passer à la vitesse supérieure en s’affirmant chez les seniors. Il n’a pas de temps à perdre et en cette année olympique, quoi de mieux que les JO de Paris 2024 pour y arriver ?

Il va participer au TQO européen à partir du 5 avril pour tenter de décrocher un quota. Il est le plus jeune inscrit en lutte libre -86 kg hommes, mais celui qui admet être encore « un petit bébé » après sa première année seniors a des ambitions élevées. Il voit déjà plus loin qu’un simple top 2 à Bakou.

« Je m’imagine les Jeux Olympiques de Paris 2024 tous les jours. Quand je me lève le matin, je ferme les yeux et parfois, je me vois devenir champion olympique, le public qui m'encourage et tout ça. Je me dis que ça va être incroyable, magnifique », avoue Rakhim Magamadov dans une interview exclusive avec Olympics.com.

La France court après une médaille olympique en lutte libre depuis Mexico 1968 et l’argent de Daniel Robin. Alors qu’une telle statistique peut effrayer, elle n’est pas du genre à le freiner.

Au contraire même. Le lutteur de Montauban aime la difficulté au point de se demander parfois s'il n'est pas fou et cherche toujours un moyen d'avancer. Il possède une musculature pour déplacer des montagnes, mais c'est dans son mental que se cache la puissance de le faire.

« Je suis toujours motivé et déterminé. Je ne baisse jamais la tête, même quand je perds, je reviens encore plus fort. C'est ça qui fait ma force. Même quand je me blesse, je m'entraîne et je reviens encore plus fort. Je n'arrête pas de grimper, de grimper », explique-t-il avec pugnacité.

Pour comprendre d’où vient cette volonté, découvrez le parcours hors du commun de Rakhim Magamadov.

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« Je me suis dit ‘je suis foutu, je vais rentrer chez moi et aller travailler au chantier avec mon père’ »

Rakhim Magamadov est un acharné de travail, mais c’est une période loin des tapis de lutte qui a cultivé sa ténacité. Il était prometteur et a intégré l’INSEP de manière précoce, à seulement 16 ans. Dès sa première année au Bois de Vincennes, une rupture des ligaments croisés est venue mettre un coup d’arrêt à sa progression.

« C’est le plus gros challenge que j'ai eu dans ma vie », admet-il avant de poursuivre.

« En me faisant les croisés à 16 ans, je me suis dit ‘ça y est, ma carrière est finie, je suis foutu, je vais rentrer chez moi et aller travailler aux chantiers avec mon père.’ »

Difficile d’imaginer ce colosse douter. Et pour cause, ça n’a pas duré longtemps. Grâce au soutien des coachs, de ses proches et de ses amis, Rakhim Magamadov s’est rapidement remobilisé. Tellement vite que sa convalescence s’est passée à vitesse grand V.

Ses premières séances de technique ont eu lieu quatre mois après sa blessure et seules quelques semaines de plus ont été nécessaires avant son retour à la compétition.

« Je me suis dit ça ne pouvait pas se terminer comme ça. Je pense que cette blessure a fait ma force. C'est un mal pour un bien finalement. Heureusement que j'ai eu cette blessure parce qu'elle a forgé mon caractère. »

Son apprentissage ne s’est pas terminé avec son retour. Une autre étape a définitivement façonné le lutteur obstiné qu’il est aujourd’hui : les Championnats du monde juniors 2021.

Deux mois seulement après sa reprise, Rakhim Magamadov a décroché une médaille d’argent planétaire. Alors que beaucoup de lutteurs auraient été satisfaits d’une telle performance, ce n’était pas son cas. Il espérait que ses efforts pour surmonter la blessure allaient être récompensés par un titre mondial.

La déception qui a été énorme après sa défaite en finale le suit encore aujourd'hui.

« Cette défaite m’a touchée au fond de moi. Le sentiment que j'ai ressenti, je ne voulais plus jamais le ressentir de ma vie parce que ça m'a vraiment fait mal », explique-t-il en avouant que cette épreuve a servi à la quête de ses futurs titres.

Depuis, il n’a plus jamais levé le pied. Ni dans sa trajectoire, ni dans ses combats où son style offensif fait d’attaques incessantes a raison de ses adversaires. Il ne s’arrête jamais et n’a pas l’intention de le faire avant d’avoir rempli l’objectif qu’il poursuit depuis tout petit : être champion olympique.

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La lutte, un héritage familial à faire fructifier pour Rakhim Magamadov

Rakhim Magamadov est né en Tchétchénie, où la lutte est le sport national. C’était aussi une zone en guerre pendant son enfance, d’où le départ de ses parents pour la France quand il n’avait que quatre ans.

Il ne garde aucun souvenir de cette période, mais a perpétué la tradition locale en se mettant à la lutte sur les conseils de son père, ancien pratiquant et éternel passionné.

« Il m'a dit soit tu feras de la lutte, sois tu ne feras rien. Moi, je voulais faire du foot comme tous les autres petits, donc il ne m'a pas laissé le choix et j'ai dû faire de la lutte. Aujourd'hui, je le remercie parce que c'est grâce à lui que j'en suis arrivé là », s’amuse l’international français.

Il a tout de suite été plus fort que les autres et a logiquement gravi les échelons. La présence de son père a joué un rôle clé dans sa progression. Honteux d’avoir perdu devant lui lors des Championnats du monde juniors 2021, il sait à quel point il lui doit les titres qui ont suivi.

Parmi eux, le premier aux Mondiaux U20 est le plus beau selon lui. « Et ce qui est bien, c’est que je l'ai gardé l’année d’après », rappelle l’insatiable combattant.

Le lutteur de 21 ans est reconnaissant et sait que rien de tout cela n’aurait été possible sans son entourage. Il puise une véritable force du soutien familial, comme si son inépuisable moteur avait besoin d’un surplus d’énergie pour aller encore plus haut, encore plus vite. S’il rêve tellement d’une médaille olympique, c’est aussi pour eux.

« Je remercie mon père et j'essaierais de le remercier à ma façon, en décrochant une belle médaille aux JO. »

Le palmarès de Rakhim Magamadov est déjà impressionnant, mais la quête de son plus beau titre débute à peine.

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