Manel Estiarte : « Assister à la cérémonie de clôture en tant que champion olympique, c’était fabuleux »
Manel Estiarte a représenté l’Espagne en water polo lors de six éditions des Jeux Olympiques (1980, 1984, 1988, 1992, 1996 et 2000) et a remporté l’argent en 1992 et l’or en 1996. En 2000 à Sydney, il a eu l’honneur de porter le drapeau de son pays pendant la cérémonie d’ouverture.
J’ai vécu mes premiers Jeux Olympiques en 1980, à Moscou. Ce jour-là, j’ai réalisé mon rêve. Je viens d’une famille modeste et le simple fait de participer était déjà extraordinaire en soi. Le plus incroyable, c’est que ma sœur avait déjà pris part aux Jeux Olympiques : elle était membre de l’équipe d’Espagne à Montréal, en 1976. C’était très émouvant pour moi de lui succéder.
En 1980, je ne nourrissais pas de grandes ambitions. Je ne m’attendais pas à ramener une médaille de Moscou. Ma simple présence était déjà un privilège. J’étais tellement fier de vivre la cérémonie d’ouverture en tant que membre de l’équipe d’Espagne. Aujourd’hui encore, je me souviens de ce que j’ai ressenti : j’avais l’impression de vivre un rêve.
Les Jeux de Los Angeles en 1984 étaient très différents. À cause du boycott, les Jeux Olympiques de 1980 se sont déroulés dans une ambiance particulière. Quatre ans plus tard aux États-Unis, on sentait une véritable excitation.
En 1988 à Séoul, j’ai encore vécu une autre expérience. Pour l’équipe d’Espagne masculine de water polo, c’était le début d’un cycle important. J’étais le capitaine et le joueur le plus expérimenté. Il y avait beaucoup de jeunes qui venaient d’arriver en sélection à ce moment-là. J’avais l’impression qu’il se passait quelque chose de spécial au sein du groupe. Je garde un très bon souvenir de ces Jeux Olympiques de 1988 à titre personnel, mais ce qui m’a surtout marqué, c’est cette certitude que nous étions au début d’une phase cruciale pour nous.
Quatre ans plus tard, les Jeux avaient lieu à Barcelone, chez moi. C’était incroyable. J’ai vécu l’une des plus grandes expériences de ma vie pendant la cérémonie d’ouverture à Barcelone. Je me suis retrouvé devant mes compatriotes, le public espagnol, le public catalan, ma famille et mes amis... c’était tellement fort. Tous les athlètes rêvent de participer un jour aux Jeux Olympiques. Ensuite, ils rêvent de participer aux Jeux Olympiques et d’avoir la possibilité de gagner une médaille d’or. J’ai pu mesurer la chance que nous avions d’être en course pour le titre olympique chez nous.
J’ai disputé six éditions, mais les Jeux Olympiques de 1992 étaient les plus beaux pour moi. C’était fantastique. Prendre part aux Jeux Olympiques dans mon propre pays, quel bonheur ! Les Espagnols et les Barcelonais n’ont pas boudé leur plaisir. En les croisant dans les rues, on pouvait voir à quel point ils étaient heureux d’accueillir ces Jeux. Ce sont mes Jeux favoris, et j'ai adoré y participer.
À Barcelone, nous avons perdu contre l’Italie en finale, après un match magnifique. La partie s’est terminée quelques heures avant le début de la cérémonie de clôture. J’étais si déçu d’avoir raté l’or que je n’y suis pas allé. D’autres joueurs m’ont imité. Avec le recul, aujourd’hui, je le regrette. Mais à l’époque, j’étais tellement triste d’être passé à côté de la médaille d’or. Toute l’équipe était persuadée d’avoir raté une chance unique de remporter le titre.
Nous avons finalement obtenu l’or à l’issue de mes cinquièmes Jeux Olympiques, en 1996 à Atlanta. C’est le plus beau moment de ma carrière. Assister à la cérémonie de clôture en tant que champions olympiques, c’était fabuleux. Nous étions tous là, ensemble, avec nos médailles d’or autour du cou. Ce soir-là, nous avons fêté dignement l’événement.
J’ai vécu mes sixièmes et derniers Jeux Olympiques à Sydney, en 2000. On m’a fait un grand honneur en me proposant de porter le drapeau espagnol. C’était tellement émouvant d’entrer dans le stade avec le drapeau à la main. Je pourrais en parler pendant des heures sans trouver les mots justes pour décrire ce que vécu. C'était un immense honneur et je me suis senti vraiment très fier. Ce moment est venu couronner 24 années de participations olympiques. Mes coéquipiers étaient ravis pour moi. Nous étions ensemble depuis si longtemps, nous avions vécu tant de choses... des hauts et des bas, des moments de bonheur et des déceptions. En pénétrant dans le stade avec ce drapeau, toutes les images de ma carrière me sont revenues en mémoire. Je me souviens très bien de ce que j'ai éprouvé. Je me sentais calme et incroyablement fier. C'était inimaginable.
J'étais aussi très ému car je savais que ces Jeux seraient les derniers pour moi. Mais j'ai eu l'immense chance de concourir pendant très longtemps et de vivre énormément de choses tout au long de ma carrière.