Le judo à Rio 2016 riche en moments de légende !

Des premiers titres historiques pour le Kosovo et la République Tchèque, une victoire brésilienne particulièrement émouvante, le retour du Japon au tout premier plan, un poids lourd français au sommet de l’Olympe… le judo à Rio 2016 a offert une série d’instants spectaculaires et inoubliables !

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Le judo à Rio 2016 riche en moments de légende !
(2016 Getty Images)

Les compétitions de judo de Rio 2016, avançant jour après jour chez les dames comme chez les hommes de la catégorie de poids la plus légère à la plus lourde, ont démarré au lendemain de la cérémonie d’ouverture, le samedi 6 août, avec les -48kg dames et les -60kg hommes. Paula Pareto, première médaillée de l'histoire du judo argentin à Beijing en 2008 (bronze), souvent placée dans les grands championnats, a atteint la consécration à 30 ans, un an après sa conquête du titre mondial. Elle a pris les devants en finale sur un waza-ari et a su gérer son avance pour s'imposer face à Jeong Bok-yeong (République de Corée) bien aidée par les bruyants supporters argentins présents dans les gradins de l'Arena Carioca 2.

« J’ai beaucoup rêvé de ce moment et je suis ravie d’avoir partagé ça avec tant de gens. J’ai commencé doucement mais je me suis améliorée au fur et à mesure et je suis très heureuse d’avoir battu une adversaire si forte ! Je n’ai pas de plans dans l’immédiat. Pour le moment, je veux juste oublier le judo ! », a déclaré Paula Pareto. Les deux médailles de bronze ont été obtenues par la Japonaise Ami Kondo et la Kazakh Otgontsetseg Galbadrakh. La tenante du titre brésilienne Sara Menezes a été dominée en quarts de finale par la Cubaine Dayaris Mestre Alvarez.

Chez les hommes, le Russe Beslan Mudranov a remporté en -60 kg aux dépens du Kazakh Yeldos Smetov, champion du monde 2015, offrant à la Russie un premier titre à Rio. Mudranov, triple champion d'Europe, succède au palmarès olympique à un autre Russe, Arsen Galstyan, vainqueur de cette même catégorie il y a quatre ans à Londres. Face à Smetov, Mudranov a su se montrer patient. Et il a attendu la prolongation pour placer un mouvement décisif qui lui a valu la victoire. Le Japonais Naohisa Takato et l'Ouzbek Diyorbek Urozboev ont remporté les deux médailles de bronze.

Majlinda Kelmendi remporte le premier titre du Kosovo, Fabio Basile fait le spectacle

Le 7 août, Majlinda Kelmendi (-52 kg) a inauguré le palmarès olympique du Kosovo avec la toute première médaille d'or du jeune pays des Balkans, dont c'est la première apparition dans une telle compétition. Ultra-favorite dans sa catégorie, Kelmendi a tenu son rang de double championne du monde en dominant en finale la jeune Italienne Odette Giuffrida (21 ans). La Kosovare a maîtrisé le combat en marquant d'entrée un yuko sur un fauchage puis en contenant son adversaire, invitée surprise de la finale. « Je suis si contente ! » a-t-elle déclaré, « Pour être honnête, j’étais venue ici pour gagner le titre, mais c’est quand même fou ! Je suis tellement heureuse pour moi, pour mon entraîneur et pour tout mon pays. Le Kosovo est aux Jeux pour la première fois, et je pense  que l’or, c’’est énorme ! ».  La Japonaise Misato Nakamura et la Russe Natalia Kuziutina ont décroché les médailles de bronze.

Majlinda Kelmendi s’est vu remettre sa médaille d’or par le président du CIO Thomas Bach, venu assister à la finale. « Certaines choses n'arrivent qu'une fois dans la vie et c'est ce qui est arrivé aujourd'hui. Monsieur Thomas Bach a toujours été un grand soutien pour le Kosovo et le sport kosovar », a commenté la judoka. « Lorsqu'il m'a remis la médaille, il m'a dit: « Vous vous souvenez, nous avions un accord. J'attendais de vous que vous gagniez la médaille d'or et vous l'avez fait. » Ses mots m'ont fait pleurer. »

Du côté des hommes, en -66kg, le judoka italien Fabio Basile a décroché l'or olympique au nez de tous les favoris en infligeant en finale un ippon spectaculaire au champion du monde en titre, An Baul (république de Corée). Pour sa première finale dans un championnat majeur, Basile (21 ans) n'a pas tremblé et a fait basculer son adversaire grâce à un fauchage impeccable. L'Ouzbek Rishod Sobirov et le Japonais Masashi Ebinuma ont décroché les médailles de bronze de la catégorie. Membre de l'armée italienne, Basile est monté en puissance tout au long de la journée. Et le médaillé de bronze aux Championnats d'Europe 2016 s'est gagné les faveurs du public de l'Arena Carioca 2 en concluant quatre de ses cinq combats du jour sur ippon, un style spectaculaire qui lui a valu des "Italia! Italia!" en tribunes.

Rafaela Silva ouvre le compteur du Brésil, Shohei Ono lave l’honneur du Japon

Lundi 7 août, Rafaela Silva, originaire d'une favela à Rio, a fait chavirer de bonheur le Brésil en décrochant domicile le titre des -57 kg, la première médaille d'or du pays hôte de ces Jeux. « Que quelqu'un comme moi qui vient de la Cité de Dieu (célèbre favela de Rio) et a commencé le judo à cinq ans comme une plaisanterie devienne championne olympique, c'est inexplicable », a réagi Rafaela Silva. Si tous les enfants brésiliens ont un rêve, ils doivent avant tout penser qu'il se réalisera. Je dédie cette médaille au peuple brésilien. »

Âgée de 24 ans, Silva a dominé en finale la Mongole Sumiya Dorjsuren, N.1 mondiale, en marquant un waza-ari au bout d'une minute et en tenant son avantage jusqu'au bout avec le soutien de son bouillant public. Cette première médaille d'or brésilienne a des airs de conte de fées: c'est à Rio que Rafaela Silva a grandi et c'est à Rio qu'elle a décroché en 2013 le titre mondial, devenant la première judoka brésilienne à y parvenir. Elle a ainsi effacé lundi la déception de son élimination aux Jeux de Londres en 2012, où elle avait été disqualifiée précocement pour avoir touché les jambes de son adversaire avec les bras, un geste interdit en judo. Tout au long de la journée, elle a montré sa pugnacité et son mental de fer pour venir à bout de ses adversaires. « Le public m'a beaucoup aidée », a commenté Rafaela Silva. « Le tatami a même tremblé par moment, donc je pensais que je ne pouvais pas décevoir tous ces gens qui sont venus me voir », a-t-elle ajouté.

La favorite japonaise Kaori Matsumoto, championne olympique en 2012 et championne du monde en 2015, a pour sa part échoué dans sa quête d'une seconde médaille d'or aux Jeux et doit se contenter du bronze. L'autre médaille de bronze a été décrochée par la Portugaise Telma Monteiro, bourreau de la Française Automne Pavia en repêchages.

Le Japonais Shohei Ono a de son côté été champion olympique dans la catégorie des -73 kg, effaçant le fiasco nippon subi en 2012 sur les tatamis de Londres où son pays n'avait décroché aucun titre en judo chez les messieurs. Ono, âgé de 24 ans, s'est imposé en finale face à l'Azerbaïdjanais Rustam Orujov, qu'il a expédié d'un splendide ippon. Le Géorgien Lasha Shavdatuashvili et le Belge Dirk van Tichelt ont décroché les médailles de bronze.

Double champion du monde en titre (2013, 2015), Ono était le grand favori du tournoi olympique. Il avait d'ailleurs remporté le premier de ses deux titres mondiaux à Rio en 2013. « J’ai ressenti beaucoup de pression, mais j’ai réussi à le faire. Je pense que l’équipe du Japon est très forte et je suis fier de ça. En finale, j’ai essayé de rester cool et de montrer du respect à mon adversaire » a déclaré Ono.

Ippons en série sur le tatami de l’Arena Carioca avec Tina Trstenjak et Khasan Khalmurzaev

La judoka slovène Tina Trstenjak a remporté le 8 août la médaille d'or des -63 kg aux en battant en finale la Française Clarisse Agbegnenou. L'Israélienne Yerden Gerbi et la Néerlandaise Anicka van Emden ont décroché les médailles de bronze.

La championne du monde 2015 a immobilisé au sol son adversaire championne du monde 2014 pour s'imposer par ippon au bout d’une minute et 45 secondes de combat. « Fantastique, super, super, je n’ai pas de mots ! » a dit Tina Trstenjak. « Au départ, je n’ai pas été très bonne. Mais vers la fin, ça a été de mieux en mieux.  Et dans le dernier combat, c’était vraiment très bon ! ». Et en effet la championne  slovène a expédié ses dernières rivales (la Chinoise Yang Junxia en quart de finale, puis la Brésilienne Maria Silva en demi-finale) par ippon, avant de récidiver en finale.

Médaillée d’argent, Clarisse Abegnenou n’a pas caché son désarroi : « Je suis déçue, je suis très déçue de moi. Après, je repars quand même avec une médaille d’argent. J’ai essayé de la faire tomber, de trouver des brèches, mais j'étais trop pressée. Il ne faut plus me parler de judo là. »

Le judoka russe Khasan Khalmurzaev a pour sa part remporté le titre des -81kg en battant en finale par ippon l'Américain Travis Stevens. Le judoka des Emirats arabes unis Sergiu Toma et le Japonais Takanori Nagase ont décroché les médailles de bronze.

Né il y a 22 ans à Nazran, la capitale de la république russe d'Ingouchie, dans le Caucase, Khalmurzaev est champion d'Europe en titre. Il a fait parler sa puissance en retournant son adversaire américain, âgé de 30 ans, qui avait enclenché un mouvement. Khalmurzaev a contré avec un superbe uchi-mata après 2 minutes 42 secondes de combat, une victoire nette et sans bavure: « Je connais ce partenaire d'entraînement, il est très fort. J'ai fait tout ce que j'ai pu pour remporter cette médaille d’or », a sobrement commenté Khalmurzaev. « Je ne peux pas y croire. Je suis heureux pour tout le peuple russe ». Il n’aura connu qu’une seule alerte dans son parcours à Rio, lors d’une demi-finale face à Sergiu Toma qui ne s’est décidée qu’au golden score.

Le judo japonais au sommet avec Haruki Tachimoto et Mashu Baker

Le 9 août a été la journée du judo japonais qui a frappé un grand coup sur le tatami de l’Arena Carioca 2 en raflant deux médailles d'or avec Haruka Tachimoto chez les dames (-70 kg) et Mashu Baker chez les hommes (-90 kg). « Les Japonais ne désirent que la médaille d'or, donc nous devons être orgueilleux et puissants pour tenter d'obtenir l’or », a résumé Haruka Tachimoto. Avec Mashu Baker (21 ans), Haruka Tachimoto (26 ans) incarne une nouvelle génération, au même titre que Shohei Ono (24 ans), le vainqueur en -73 kg.

En finale des -90 kg, Baker a eu fort à faire pour dompter le Géorgien Varlam Liparteliani (27 ans) et son judo si imprévisible. Mais le jeune Japonais a su s'imposer avec autorité, marquant un yuko sur un o-uchi-gari (fauchage) avant de gérer son avantage. Gwak Dong-han (République de Corée) et le Chinois Cheng Xunzhao ont décroché les médailles de bronze.

« Je voulais gagner par ippon. Mais connaissant la grosse différence entre la médaille d'or et celle d'argent, j'ai peut-être combattu un peu défensivement », a analysé Baker. « J'en rêvais depuis que j'ai six ans. Je suis vraiment ravi », a ajouté le tout nouveau champion olympique, né à Tokyo d'un père américain et d'une mère japonaise. Cette dernière, qui a élevé son fils seule, était présente en tribunes.

Chez les dames (-70 kg), Haruka Tachimoto a fait aussi bien en battant par ippon la Colombienne Yuri Alvear, triple championne du monde. Tachimoto a réussi à maîtriser son adversaire au sol et à l'emporter sur immobilisation (ippon) au bout de seulement 2 minutes et 19 secondes de combat. La Britannique Sally Conway, bourreau de la championne du monde en titre française Gévrise Emane en huitièmes, et l'Allemande Laura Vargas Koch ont décroché les médailles de bronze.

Kayla Harrison et Lukas Krpalek dans la légende du judo!

L’Américaine Kayla Harrison avait ému le monde entier à l'heure de conquérir l'or olympique en 2012 à Londres. Quatre ans plus tard, le 11 août, elle a impressionné par son sang-froid en montant à nouveau sur la plus haute marche du podium dans la catégorie -78 kg.

« C'est mon héritage, je me retire en étant deux fois championne olympique et l'une des plus grandes athlètes de ce sport », a lancé la numéro 1 mondiale. Epatante de conviction et d'énergie, quittant le tatami au petit trot après chaque combat, Harrison a vécu une journée parfaite: elle a eu le bonheur d'éviter de rencontrer sa grande rivale, la Brésilienne Mayra Aguiar, battue en demi-finales et finalement médaillée de bronze au même titre que la Slovène Anamari Velensek.

Et l'Américaine a ensuite triomphé en finale de la Française Audrey Tcheuméo sur une clé de bras (Ude-hishigi-juji-gatame), ippon après 3 minutes et 54 secondes de combat, pour décrocher l'or.

« Ce qu'on ne voit pas aujourd'hui, c'est tout le travail effectué pendant quatre ans pour arriver ici. Ce titre est appréciable, il est deux fois meilleur », a commenté Harrison. L'Américaine, qui réside à Boston, avait déjà obtenu la première médaille d'or de l'histoire du judo américain et elle est logiquement devenue la première double championne olympique des Etats-Unis.

La soirée sur le tatami de l’Arena Carioca 2 a aussi été marqué par première médaille olympique jamais obtenue par la République tchèque en judo. Et pour ne rien gâcher, cette médaille est d'or, puisque le champion du monde 2014 Lukas Krpalek a dominé en finale des -100 kg l'Azerbaïdjanais Elmar Gasimov (25 ans) sur ippon. « C’est fabuleux ! Je suis le premier judoka tchèque à remporter une médaille olympique en judo, et pour couronner le tout, c’est la plus belle », a noté Lukas Krpalek. « C’est un truc énorme pour notre pays, et aussi pour notre sport. C’est une victoire de la plus haute importance. »

Lukas Krpalek a renversé son adversaire en finale sur O-Uchi Gari, un magnifique fauchage intérieur, au bout de 4 minutes et 37 secondes de combat. Les deux judokas se sont ensuite sportivement enlacés, déclenchant les viva du public de l’Arène Carioca 2. « Nous nous connaissons depuis que nous sommes juniors et nous sommes amis. Nous sommes des rivaux sur le tatami, mais dans la vraie vie, on s’entend bien ».   Le Français Cyrille Maret, qui fêtait ses 29 ans le même jour, et le Japonais Ryunosuke Haga se sont adjugés les médailles de bronze.

Jour de gloire pour la France chez les poids lourds

Lors de la dernière journée de compétition, le 13 août, le Français Teddy Riner est entré au panthéon des Jeux Olympiques avec un deuxième sacre chez les poids lourds. C’était le jour de la France sur le tatami de l’amena Carioca 2 puisqu’Emilie Andreol s’est imposée chez les dames !

Double champion olympique et octuple champion du monde à seulement 27 ans, Riner dispose désormais du plus beau palmarès de l'histoire dans la catégorie reine (+100 kg). Et il n'a pas tremblé en finale face au Japonais Hisayoshi Harasawa, battu aux pénalités (2 à 1). Ce final rêvé, pour Riner, était attendu: invaincu depuis 2010, le géant français (2,03 m, 137 kg) a survolé la journée, étirant sa série d'invincibilité à 98 combats internationaux. Le porte-drapeau des « Bleus » à Rio devient le troisième poids lourd de l'histoire à remporter deux titres olympiques en judo après Douillet (1996, 2000) et le Japonais Hitoshi Saito (1984, 1988).

Comme souvent depuis son tout premier titre de champion du monde, en 2007 et déjà à Rio, il y a eu Riner et les autres. Déterminé, le Guadeloupéen a rendu une copie parfaite avec pour seul accroc notable un ongle retourné en quarts de finale ou un doigt dans l'oeil reçu en demies. Et en finale, il a maîtrisé Harasawa qui avait pourtant dit vouloir être le premier à faire tomber Riner. Avec cette deuxième médaille d'or, Riner  rejoint le petit cercle des judokas ayant décroché trois podiums olympiques puisqu'il avait aussi obtenu le bronze en 2008 à Pékin.

Et il ne tient qu'à Riner de devenir encore plus grand en devenant le premier poids lourd triple champion olympique en 2020 à Tokyo, au Japon, pays d'origine de ce sport qui l'a fait roi. Mais le colosse a aussi ses failles. Et malgré son ultra-domination, cette deuxième médaille d'or est venue effacer quatre années ponctuées de blessures et de moments de doute, où Riner continuait à gagner en serrant les dents et en attendant des jours meilleurs. « Ça fait plaisir parce que le travail est récompensé. J'ai eu une Olympiade difficile avec des opérations, des remises en question, et voilà... je suis content que ça passe », a-t-il commenté.

Jamais citée parmi les favorites, chez les +78kg dames, Emilie Andéol, âgée de 28 ans, a battu en finale la championne olympique en titre, la Cubaine Idalys Ortiz, au bout d'un combat étouffant: contrainte d'aller jusqu'au « golden score » (score décisif), la Française a immobilisé la double championne du monde au sol et l'a emporté. On a alors vu cette grande fille très émotive, capable de pleurer avant et après un combat, hurler de joie et brandir les poings en l'air, tout en ayant l'air de ne pas croire à son triomphe, elle qui participait à ses premiers Jeux.

« Au début de la journée, je n'aurais jamais pensé être championne olympique. Décrocher une médaille oui être championne olympique non. Et voilà, je l'ai fait », a commenté Emilie Andéol.  La double championne d'Europe et médaillée de bronze aux Mondiaux 2014 est la première française à décrocher l'or olympique de la catégorie la plus lourde du judo féminin. Très proche de sa famille établie près du bassin d'Arcachon (Gironde), celle qui se définit comme « une pile électrique » aura gagné ce titre au forceps puisque trois de ses quatre combats du jour se sont terminés en prolongation. La Japonaise Kanae Yamabe et la Chinoise Yu Song ont décroché les médailles de bronze.

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