Etonnant : cavaliers et chevaux se mesurent en saut en longueur et hauteur à Paris 1900!
Les sports équestres débutent au programme olympique lors des Jeux de la IIe olympiade en 1900 à Paris. Parmi les cinq épreuves disputées sur le terrain de la Place de Breteuil, il y a, pour la première et la dernière fois, le saut en longueur et le saut en hauteur !
A une époque où le cheval reste encore, mais plus pour très longtemps, un moyen central de mobilité des humains, en selle ou en attelage, les sports équestres font leurs débuts olympiques aux Jeux de Paris 1900. Les compétitions sont organisées sur trois jours, fin mai et début juin sur le terrain de la Place de Breteuil au centre de la capitale (entre les 7e et 15e arrondissements).
Dans le cadre des "concours d'exercices physiques et de sports" de l'Exposition Universelle de Paris 1900, les épreuves sont primées. Chaque "premier prix" reçoit "un objet d'art ou une somme de…" qui va de 4 000 à 6 000 francs. Ces épreuves sont au nombre de cinq, dont trois seront reconnues par le Comité International Olympique : le saut d'obstacles, et les championnats de saut en longueur et de saut en hauteur ! Auxquelles s'ajoutent l'"Attelage à quatre chevaux" et le "prix international de selle".
En saut d'obstacles, la seule compétition olympique d'équitation à Paris 1900 appelée à traverser les siècles, les trois premiers prix sont attribués à des cavaliers tous auteurs du sans-faute et qui sont classés au temps : le Belge Aimé Haegeman sur Benton II l'emporte et devient le premier médaillé d'or de la discipline. Il se montre plus rapide que son compatriote Georges Van der Poele (Windsor Squire) et que le Français Louis de Champsavin (Terpsichore).
Victoire en longueur à 6,10 m et en hauteur à 1,85 m
Mais voici ces deux épreuves, originales, qui existent en athlétisme, mais qui sont pour la première et unique fois au programme des Jeux en équitation : le "saut en largeur" et le "saut en hauteur". Dans le "championnat en largeur", il faut tout d'abord franchir une rivière large de 4,50 m. Tous les dix-sept inscrits y parviennent mais plusieurs d'entre-eux sont éliminés avec une marque de 4,90 m. Finalement, la jument Extra Dry montée par l'officier belge Constant van Langhendonck bondit à 6,10 m et remporte le premier prix. Il est suivi par l'Italien Giovanni Giorgio Trissino dont la monture Oreste réalise 5,70 m et par le Français Camille de La Forgue de Bellegarde, 4,90 m avec Tolla.
Le dernier jour de compétition, dix-huit concurrents participent aux "championnat de saut en hauteur". Qui aboutira à une victoire partagée entre le Français Dominique Gardères en selle sur Canella, et le comte Giovanni Giorgio Trissino toujours sur Oreste, qui devient ainsi le tout premier champion olympique italien. Les deux chevaux l'un de 1,59 m (Canella), l'autre d'1,64 m (Oreste), effacent tous deux une barre placée à une hauteur d'1,85 m. Le troisième, Georges van der Poele saute 1,70 m avec Ludlow,
Et les humains ?
Ces performances sont à comparer avec celles des athlètes, qui parviennent très rapidement, en saut en hauteur à franchir les 2 m (dès 1912). La technique s'affine, le rouleau dorsal est popularisé en 1968 par Dick Fosbury, sacré champion olympique à Mexico en 1968, et le record du monde s'élève jusqu'à 2,45 m par le Cubain Javier Sotomayor en 1993. Quant au record olympique, il est détenu par l'Américain Charles Austin avec une barre à 2,39 m à Atlanta en 1996.
En saut en longueur, si le premier champion olympique à Athènes en 1896 est l'Américain Ellery Clark avec un bond à 6,35 m, les spécialistes dépassent les 7 m dès le début du XXe siècle. Jesse Owens établit en 1935 un record du monde à 8,13 m qui tient durant 25 ans. Mais c'est le saut de Bob Beamon à Mexico le 18 octobre 1968 qui reste dans toutes les mémoires. Un incroyable bond à 8,90 m qui reste à ce jour le record olympique.
Sa marque mondiale n'est améliorée qu'une fois, lors des championnats du monde IAAF de Tokyo en 1991 par l'Américain Mike Powell qui au terme d'un match d'anthologie avec son compatriote Carl Lewis, atterrit à 8,95 m.
Battus à plate couture, les chevaux ? Il faut souligner que le terrain lourd à Breteuil ne favorisait en aucun cas la battue d'appel (ou battue des postérieurs, le moment où le cheval emmène ses membres postérieurs sous lui et prend son appel), ce qui explique le niveau de performance.
Il n'en reste pas moins que ces concours originaux sont inscrits au palmarès olympique et ont offert en cette fin de printemps 1900 à Paris, un spectacle superbe… et unique.