Day Jobs: Ward, entre foulées et statistiques en attendant Tokyo

Spécialiste du fond, l’Américain Jared Ward a pris l’habitude de repousser ses limites, aussi bien physiques que mentales. Quand il ne prépare pas son prochain marathon, notre homme enseigne les statistiques à la Brigham Young University (BYU)  dans l’Utah. Jongler entre ses obligations universitaires, sportives et familiales tient parfois « du numéro d’équilibriste » à en croire notre interlocuteur, mais Ward n’échangerait sa place pour rien au monde. « Parfois, j’ai l'impression d'avoir énormément de chance car je peux faire des choses que j’aime tout au long de la journée », lance-t-il avec enthousiasme. 

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Day Jobs:  Ward, entre foulées et statistiques en attendant Tokyo
(2016 Getty Images)

Athlète et universitaire

Si Ward a choisi la BYU, c'est justement en raison de sa réputation de pépinière de talents. En revanche, sa décision de travailler sur les statistiques n'est pas le fruit d'une longue réflexion. 

« Quand je me suis inscrit à la BYU en tant qu'athlète, on m'a demandé de choisir ma matière principale. J'ai répondu : 'Vous n'avez qu'à écrire statistiques. On verra bien ce que ça donne.' »

Malgré une orientation un peu bâclée, Ward pense aujourd'hui que son métier de statisticien exerce une influence positive sur ses performances sportives. « Mes deux univers ont fini par fusionner... mes choix, mes entraînements et mes stratégies en course s'appuient sur les statistiques. »

Le département de statistiques de l'université lui a proposé un poste de professeur à temps partiel à l'issue de son premier cycle – une opportunité que Ward n'a eu qu'à se féliciter d'avoir saisie.

Une affaire de foulées

Après avoir obtenu son master en statistiques en 2015, il s'est attelé à une thèse sur l'importance de la foulée dans les marathons. Sa conclusion est sans appel : les coureurs dont la foulée est la plus régulière obtiennent de meilleurs résultats que ceux dont la foulée fluctue. Inutile de préciser qu'il utilise le fruit de ses travaux à chacune de ses sorties.

Ses étudiants peuvent également témoigner de la « valeur ajoutée » produite par la juxtaposition des deux mondes de leur professeur.

« Il se projette toujours vers la fin », confie l'un d'entre eux. « Quand il s'agit d'avoir un A, il nous demande toujours de finir très fort car c'est ce qu'il fait lui-même en course. »

Grâce au soutien des entraîneurs professionnels de la BYU et aux dernières technologies, Ward a depuis longtemps adopté une approche résolument scientifique. Les analyses biomécaniques lui permettent, par exemple, d'identifier les groupes de muscles à renforcer pour optimiser ses performances.

Une longue route vers le succès

Ward a participé à sa première course chronométrée à l'école primaire, mais c'est à la BYU qu'il a fait ses preuves en tant que marathonien. Ses sorties en demi-fond avec les  BYU Cougars ont éveillé l'intérêt de son entraîneur Ed Eyestone, double champion olympique de marathon et spécialiste du fond.

« Mon premier marathon a été très difficile. Sur la fin, je n'avais plus de vision périphérique. J'ai appris beaucoup de choses sur la foulée et l'énergie. Lors du marathon suivant, j'ai pu me livrer à quelques expériences. »

Devenu professionnel en 2014, Ward a terminé deuxième du championnat américain de marathon cette année-là. 2015 reste son année de référence : en quelques mois, il a remporté les titres USATF 25km et 20km pour s'adjuger la première place du classement général du marathon. Sur sa lancée, il a décroché la troisième place des qualifications olympiques, ce qui lui a valu d'intégrer l'équipe américaine pour Rio 2016.

Eyestone lui a fixé comme objectif de terminer dans les dix premiers au Brésil et le jeune homme a relevé le défi. Après avoir retrouvé un second souffle dans les derniers kilomètres, il a arraché la sixième place, signant au passage un nouveau record personnel en 2:11:30.

« Je me souviens avoir parlé aux journalistes peu de temps après. Ils m'ont chambré parce qu'ils n'avaient jamais vu quelqu'un d'aussi heureux d'avoir fini à la sixième place des Jeux Olympiques. »

Tokyo en ligne de mire

Ward se veut optimiste quant à ses chances d'être du voyage à Tokyo en 2020. « J'espère continuer à progresser au fil des ans. Si c'est le cas, je serai plus fort en 2020 qu'aujourd'hui. »

En attendant, il continue à partager son temps entre des activités qu'il adore. « Quand je me réveille le matin, j'ai hâte d'aller courir. J'ai hâte d'aller étudier. J'ai hâte d'aller enseigner. Tout me passionne ! »