Une nouvelle philosophie pour Tyler Wright

Malgré son talent hors du commun, Tyler Wright, championne du monde 2016 de la World Surf League (WSL, Ligue mondiale de surf), a fini par céder. Elle a pris son premier cours de surf l’année dernière. Les bénéfices ne se sont pas fait attendre et la meilleure surfeuse du monde n’a plus qu’un objectif en tête : Tokyo 2020.

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Une nouvelle philosophie pour Tyler Wright
(Getty Images)

Il n'est pas fréquent de voir un sportif de haut niveau atteindre les sommets sans l’aide d’un entraîneur. En même temps, l’Australienne Tyler Wright n’est pas une sportive comme les autres.

En 2008, Wright remporte le Beachley Classic de surf à l’âge de 14 ans. Elle devient ainsi la plus jeune concurrente à triompher dans un tournoi du circuit mondial féminin. Cinq ans plus tard, alors qu’elle n’a pas encore soufflé ses 20 bougies, elle est à deux doigts de décrocher le titre de championne du monde WSL. La saison suivante, elle termine encore deuxième du classement final, après deux victoires. Et tout ça, sans l’aide de personne !

Le surf est sans doute le sport qui repose le plus sur le talent inné. L’instinct, l’équilibre et la capacité naturelle à réagir aux changements constants d’environnement sont sans aucun doute cruciaux. Petite mais extrêmement solide, Tyler Wright fait partie d'une famille de cinq passionnés de surf. C'est ainsi qu'elle est rapidement devenue une surfeuse aussi agressive que rapide, avec du talent à revendre. Mais il lui manquait encore un petit quelque chose pour passer le dernier obstacle. Alors, après le choc d’une cinquième place au classement général WSL en 2015, Tyler Wright décide de changer. Radicalement.

"Psychologiquement, il s’est passé quelque chose et c’est ce qui est à l'origine de toutes les décisions que j’ai prises depuis, explique Tyler. J’ai trouvé mon entraîneur, Glenn ‘Micro’ Hall, qui m’a enseigné des choses et m’a poussée à apprendre de moi-même. Il m’a aidée dans tous les aspects du surf – quoi, quand, où et comment – et m’a toujours dit privilégier l’équilibre dans la vie."

"C’était complètement différent pour moi car personne ne m’avait entraînée avant."

Les résultats sont aussi spectaculaires qu’instantanés. Âgée de 22 ans à l’époque, Tyler Wright décroche cinq victoires sur le circuit l’année dernière et remporte le championnat au terme d’une domination sans partage. Cette année, avec une victoire, deux places de deuxième et trois places de troisième, elle peut se targuer de n’avoir jamais fini en dehors du Top 5 lors des six tournois disputés à ce jour.

Glen Hall, qui a évolué sur le circuit masculin de la WSL entre 2013 et 2015, dirige la Micro Surfing Academy (MSA). La clé du succès selon lui ? Les gains marginaux. D’autres entraîneurs s’appuient eux aussi sur cette philosophie, comme Sir Clive Woodward, le sélectionneur de l’équipe d’Angleterre vainqueur de la Coupe du monde de rugby 2003.

"La WSL utilise des critères bien pensés sur lesquels nous basons pas mal notre préparation, explique Tyler à propos du style adopté par Hall. Ça a évolué au fil du temps, mais c’est comme ça qu’on peut marquer beaucoup de points. L'implication, le niveau de difficulté, l’innovation et les manœuvres de progression, l’enchaînement de manœuvres majeures, la variété dans les manœuvres, la vitesse, la puissance et la fluidité… On travaille sur tous ces aspects."

Chacune a son propre style, sa façon à soi d’approcher une vague. Le style est aussi une façon de faire ressortir sa personnalité. Tyler Wright -Tyler Wright

Les surfeurs professionnels sont jugés sur ces critères et seules leurs deux meilleures vagues de chaque tour à élimination directe comptent. C’est ainsi que le style et le panache peuvent ressortir, une fois les qualités intrinsèques maîtrisées, comme l’explique Tyler Wright.

"On est toutes très fortes. J’aime bien me poser sur la plage et regarder un échauffement ou une séance matinale avant le début d’une compétition. J’apprécie toutes les approches proposées par les différentes concurrentes. Chacune a son propre style, sa façon à soi d’approcher une vague. Le style est aussi une façon de faire ressortir sa personnalité."

En ce moment, le surf est une discipline largement dominée par les Australiens. Si la surfeuse de 23 ans est proche de sa deuxième couronne mondiale d'affilée, son compatriote Matt Wilkinson est lui aussi en tête, chez les hommes. Quatre autres Australiens figurent dans le Top 10, dont le frère de Tyler, Owen.

"De grands athlètes australiens nous ont montré la voie et maintenant qu’on a passé quelques années sur le circuit, on commence à bien s’adapter à cette vie", estime Tyler.

Cependant, la terrible expérience que son grand frère Owen a vécue nous rappelle les obstacles que les surfeurs doivent surmonter au quotidien, quel que soit leur niveau. Alors qu’il s’entraînait lors d’un tournoi de fin de saison à Hawaï en 2015, Owen est tombé de sa planche et a reçu la célèbre vague de Pipeline en pleine tête. À l’hôpital, les médecins lui ont diagnostiqué une commotion et une hémorragie cérébrale. Owen (27 ans à l’époque) a finalement fait son retour sur le circuit en début d’année.

Mikey, un autre membre de la fratrie Wright, évolue aussi en WSL. Tyler espère donc bien représenter l’Australie aux Jeux Olympiques de Tokyo 2020 aux côtés de ses deux frères.

"Pour moi, l’arrivée du surf au programme des Jeux Olympiques est due à plusieurs facteurs : des personnes sérieuses qui croient en notre sport, qui connaissent son potentiel et qui comprennent sa dimension humaine", dit-elle.

Le surf s'apprête à faire son entrée aux Jeux Olympiques alors qu'il traverse une période faste. Surtout, la WSL offrira des cagnottes identiques aux hommes et aux femmes.

"Ça en dit long sur les personnes qui ont rendu ça possible, ajoute Tyler Wright, qui a remporté 420 000 USD de gains l’an dernier. La WSL et les surfeurs ont un mental d'acier et ils visent toujours à faire mieux."

En bonne santé, talentueuse, bien rémunérée et aujourd’hui suivie par un coach de haut niveau… Une chose est sûre : Tyler Wright est prête à partir à la poursuite de la première médaille d’or olympique de l'histoire du surf.

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