Ricardo Blas Jr : « C’est comme si j’avais été repoussé à distance par un chevalier Jedi ou quelque chose dans ce style ! »
Le judoka Ricardo Blas Jr a été le porte-drapeau de Guam aux Jeux Olympiques de Beijing 2008, avant de devenir, quatre ans plus tard à Londres, le premier athlète de son pays à atteindre le deuxième tour d’un tournoi olympique de judo.
J’ai été nommé porte-drapeau en 2008, pour mes premiers Jeux, et je ne m’y attendais donc vraiment pas. C’est le chef de mission de notre équipe qui m’a confié cet honneur, un grand privilège. J’ai été énormément surpris d’apprendre que j’allais porter le drapeau : mes coéquipiers étaient tous de grands athlètes et chacun d’entre eux aurait pu être désigné, d’où mon étonnement.
Nous étions six dans la délégation de Guam, tous athlètes et nous formions un tout petit groupe. Je n’avais pas participé aux Jeux Olympiques avant Beijing, sans parler d’être porte-drapeau, si bien que beaucoup de personnes ont essayé de me préparer pour la suite. Ils ont fait de leur mieux, comme toujours, mais quels que soient ceux qui m’ont briefé, personne n’aurait pu me préparer pour l’expérience que j’allais vivre lorsque la cérémonie d’ouverture a commencé.
Si vous avez vu le film Gladiator avec Russell Crowe, ça y ressemble. Pas pour le côté guerre sanglante, mais davantage pour le vacarme lorsque vous commencez à défiler. On est dans un couloir sombre en attendant son tour et on peut entendre le public avant de pénétrer dans le stade. On peut entendre le bruit et les applaudissements, et les projecteurs commencent à percer l’obscurité. Tout est un peu étouffé toutefois, mais dès que vous commencez à fouler la piste, vous êtes heurté de plein fouet, comme si c’était une force physique. C’est comme si j’avais été repoussé à distance par un chevalier Jedi ou quelque chose dans ce style. Défiler en brandissant le drapeau de Guam est une expérience que je n’aurais jamais pensé pouvoir vivre, c’est donc fantastique que cela me soit arrivé. Je garderai toute ma vie en mémoire les sensations que j’ai éprouvées.
Mon père a porté lui aussi le drapeau pour Guam. Il était porte-drapeau en 1988 et avec le recul, c’est d’autant plus spécial de l’avoir été tous les deux. Avant la cérémonie de 2008, il ne m’a pas réellement donné beaucoup de conseils sur ce que je devais faire. C’est un peu comme lorsqu’on a envie d’aller voir un film au cinéma et que quelqu’un vous dévoile tout à l’avance, ça peut tout gâcher : il valait donc mieux que j’y aille et que je me rende compte par moi-même.
Quatre ans plus tard, à Londres 2012, j’ai été à nouveau choisi comme porte-drapeau, mais j’ai répercuté cet honneur sur Mari Dunn, une lutteuse de notre équipe. J’ai estimé qu’elle le méritait vraiment. Elle avait également passé quelques années à s’entraîner au Royaume-Uni avant les Jeux Olympiques. Moi je l’avais déjà fait et j’avais le sentiment que quelqu’un d’autre devait essayer. Ça aurait fait un peu vorace si j’avais réédité l’expérience et j’espère - mais je pense que c’est le cas - que ça lui a plu.
Ce qui était vraiment bien lors de la cérémonie d’ouverture de Londres, c’est que j’avais beaucoup moins de pression qu’à Beijing, où j’avais porté le drapeau. J’étais arrivé au Royaume-Uni quelques semaines avant les Jeux pour m’acclimater – je m’entraînais à Kendal, dans le district des lacs – et c’était sympa. Ça me plaisait d’être là. J’ai accordé beaucoup d’interviews à partir de ma base d’entraînement, et j’ai fait plein de choses : je suis la personne la plus lourde ayant jamais participé aux Jeux Olympiques, et ça intéressait assez les médias. C’était d’ailleurs bizarre, car on s’est plus intéressé à moi aux Jeux de 2012 qu’en 2008, où j’étais porte-drapeau.
En devenant le premier judoka de Guam à atteindre le deuxième tour aux Jeux Olympiques, j’ai obtenu l’honneur de porter notre drapeau lors de la cérémonie de clôture. C’était super, mais mon résultat n’a pas exactement correspondu à mes attentes. J’avais l’impression que j’aurais pu aller encore plus loin, mais c’était quand même un succès et porter le drapeau a été fantastique.
Quand arrive la cérémonie de clôture, tous les athlètes peuvent se relâcher, car pour la plupart d’entre eux, c’est le terme de quatre années d’entraînement acharné. Et en même temps, lorsque les Jeux sont terminés, on ressent aussi un peu de tristesse, car on sait tous qu’on partira le lendemain. Pour de nombreux athlètes, cela signifie qu’il va falloir se remettre à l’ouvrage durant les quatre années suivantes.