Le parcours vers l'or de David Boudia ne fut pas seulement une bataille physique, mais aussi une bataille psychologique
Il se souvient lorsqu'il avait sept ans et était un tout jeune gymnaste, avoir regardé ses premiers Jeux Olympiques, à Atlanta en 1996, et avoir rêvé de participer à des compétitions sur la scène internationale. Il n'a pas tardé à se tourner vers le plongeon, un sport qui lui permettra plus tard de remporter une médaille d'or aux Jeux Olympiques de Londres 2012 et qui jouera également un rôle essentiel dans sa lutte contre la dépression.
Pour atteindre son plein potentiel, il faut voir grand, mais exiger toujours autant de soi-même peut avoir un prix. La pression pour atteindre ses objectifs peut être paralysante et dans les moments où nous ne réussissons pas, être trop critique envers nous-mêmes peut nous faire sombrer dans la dépression. Si cette situation vous est familière, sachez que vous n'êtes pas seuls. En effet, un jeune Américain sur cinq est actuellement aux prises à des problèmes de santé mentale.
David Boudia est bien placé pour le savoir. Dès son plus jeune âge, il a toujours été motivé par ce qu'il considère aujourd'hui comme des objectifs superficiels : la renommée, la richesse et la notoriété. Mais il n'était pas préparé à l'impact que cela aurait sur sa santé mentale et la dépression profonde qui accompagnerait son nouveau succès.
Le parcours vers le sommet
À l'âge de 11 ans, dans la banlieue d'Indianapolis, les ambitions de David Boudia ont commencé à prendre forme alors qu'il s'efforçait de devenir un athlète de haut niveau. Il a eu une enfance heureuse dans le centre-ouest des États-Unis. Sa famille, laquelle était déjà fan des Jeux Olympiques, l'a beaucoup soutenu et leur éthique professionnelle l'a inspiré à viser très haut. Son père le préparait avec un pré-entraînement tous les jours à six heures du matin et sa mère le conduisait à la piscine pour s'entraîner. Malgré les encouragements de ses parents, il a toujours été très indépendant, voulant tout comprendre tout seul. Mais il est vite devenu évident que ce mode de vie avait des répercussions négatives.
Je voulais réussir et réaliser mon rêve, et j'ai passé des heures à réfléchir à la manière d'y parvenir. David Boudia - David Boudia
Surmonter les obstacles
La santé mentale de David Boudia a commencé à se détériorer après avoir représenté les États-Unis aux Jeux Olympiques, où il était alors âgé de 19 ans à peine. Participer aux JO était une expérience en dents de scie durant laquelle il a connu l'euphorie d'être au sommet de la compétition aux côtés des meilleurs athlètes du monde, mais aussi des jours où il se sentait inexplicablement déprimé. Vu de l'extérieur, les autres pensaient qu'il avait tout. Mais concentrer tous ses efforts sur l'objectif éphémère de gagner était préjudiciable à sa santé mentale.
L'été précédant le début de sa deuxième année à l'Université Purdue, il est devenu de plus en plus déprimé. Quelques semaines auparavant, il avait côtoyé l'équipe olympique d'élite des États-Unis, atteignant les objectifs qu'il s'était fixés tout petit et maintenant il marchait dans le campus comme tout le monde.
"Les projecteurs se sont éteints et j'étais à nouveau monsieur Tout-le-monde."
Dans le pire des cas, la dépression peut être débilitante. David Boudia avait du mal à sortir de son lit et évitait de parler à ses amis ou d'aller en cours et de s'entraîner. "Je voulais juste rester au lit et ne penser à rien, ça a tellement empiré que j'ai envisagé de me suicider." C'est à ce moment-là que David Boudia a compris qu'il avait besoin d'aide.
"À quoi bon ? Pourquoi suis-je ici ? Qu'est-ce que je fais ? Quel est l'intérêt ?"
Le chemin de la réussite
Si David Boudia pouvait donner un conseil au jeune David pour remonter la pente mentalement, ce serait de s'ouvrir. Son premier pas pour retourner au plongeon olympique a commencé en parlant simplement de ses difficultés à son entraîneur, Adam, et à Sonnie Brand, son épouse depuis maintenant dix ans.
Être ouvert et honnête sur ce qu'il ressentait lui a permis de commencer le processus de guérison, étape par étape. Cela a commencé par reconnaître que le succès dépend autant de l'objectif final que du parcours et qu'il faut en profiter sans se soucier de ce qu'on ne peut pas contrôler. Tout au long de ce processus, il a également appris l'importance de trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour éviter de s'épuiser à nouveau.
C'est un conseil sur lequel David Boudia a dû s'appuyer à nouveau depuis qu'il s'est remis de la dépression car, comme il l'a découvert, la vie n'est pas un fleuve tranquille. Après ses troisièmes Jeux Olympiques à Rio en 2016, David Boudia a subi une commotion cérébrale alors qu'il plongeait d'une plateforme à 10 m, ce qui l'a forcé à réévaluer sa discipline et finalement à choisir d'abandonner sa carrière de plongeur de plateforme à 10 m et de poursuivre le tremplin de 3 m pour Tokyo.
"Appréciez l'expérience et pas seulement la médaille que vous pourriez gagner."
L'expérience de David Boudia n'est pas rare. Ces vingt dernières années, le taux de suicide chez les personnes âgées de 10 à 24 ans a augmenté de manière spectaculaire de plus de 50 %. D'après un rapport des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, c'est aujourd'hui la deuxième cause de décès chez les jeunes Américains. Il est plus important que jamais de parler de ce que nous ressentons et de demander conseil à ceux qui nous entourent.
Si vous avez des problèmes concernant votre santé mentale, vous avez souvent l'impression qu'il n'y a personne à qui vous pouvez vous confier. Or selon David Boudia, le seul fait de reconnaître vos émotions et d'oublier les attentes de votre parcours de vie est la meilleure décision que vous puissiez prendre.