Jean Vuarnet révolutionne le ski de descente

Installé avec sa famille à Morzine, station de ski des Alpes françaises, alors qu’il est encore bébé, Jean Vuarnet, né à Tunis le 18 janvier 1933, devient un étudiant en droit à Grenoble, et un skieur de haut niveau au sein du GUC (Grenoble Université Club) et de l’équipe de France, qui se signale au niveau international en remportant le bronze en descente lors des championnats du monde FIS de Bad Gastein (Autriche) en 1958.

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Jean Vuarnet révolutionne le ski de descente
(1960 CIO)

Il met ensuite au point une technique révolutionnaire de recherche de vitesse, qui sera baptisée « position de l’oeuf » : buste plié, jambes fléchies, les deux bras tirés vers l’avant, les poings réunis, et qui deviendra commune à tous les skieurs de descente pour les décennies à venir. Mais en 1960, Jean Vuarnet est encore le seul à dévaler les pistes de compétition de cette façon, et le 22 février sur la « Squaw Peak » sa victoire dans la descente olympique va résonner comme un coup de tonnerre. Et pas seulement pour cette simple raison !

Lors de l’hiver 1959-1960, le fabricant français fournisseur de l’équipe nationale lui avait livré des skis en bois trop souples. « Une catastrophe ! Alors je me précipite à leur usine de Voiron, je fouille et je finis par dénicher une paire de skis à ma taille, métalliques, qui me semblent pas mal. Sauf qu'ils étaient au rebut… Je les prends quand même et je les essaye à Megève, pour la Coupe Émile Allais : l'un des skis était voilé. Comme j'avais malgré tout terminé 5e, j'ai vite téléphoné au fabricant pour qu'on m'en fournisse des neufs du même modèle, car les Jeux approchaient », a-t-il raconté à la presse française.

Il reçoit sa nouvelle paire à Squaw Valley quelques jours avant la descente, et va s’imposer avec, devenant aussi le premier skieur de l’histoire à gagner le titre avec des skis métalliques. «Il faisait très beau, j'étais en grande forme et j'avais, enfin, le bon matériel », a-t-il poursuivi. « À 60 m du départ, j'ai fait une faute, j'étais parti trop vite, et j'ai dérapé. Je me suis dit : “C'est fichu…”. J’arrive en bas, j'écoute : rien. Le haut-parleur qui annonçait le temps des coureurs était tombé en panne ! Le public était muet et le tableau d'affichage immobile, avec le numéro 7, de l'Allemand Hans Peter Lanig, au sommet. Soudain, le tableau s'est mis à bouger, le 7 a glissé vers le bas et le 10 l'a remplacé en première ligne. Le 10, c'était moi.»

En 2:06.0, Jean Vuarnet, « flashé » en position de l’oeuf à 115 km/h dans la portion la plus rapide de la piste, devance Lanig d’une demi-seconde, alors que son compatriote Guy Périllat vient compléter le podium à 9/10e.

La victoire de Vuarnet à Squaw Valley a un retentissement considérable. Après son retour en France, il s’associe avec un fabricant de lunettes de soleil et lance, autour d’un nouveau verre, une marque à son nom qui va connaitre un succès international. Jean Vuarnet devient directeur de l’office du tourisme de Morzine et crée la station d’Avoriaz sur ses hauteurs, puis promeut l’idée d’un domaine skiable à cheval sur la France et la Suisse, qui deviendra les « Portes du Soleil ». Il est également aux commandes de l’équipe de France de ski alpin au début des années 1970, et vice-président de la Fédération Française de ski.

En 2010, une sculpture de 4,5m de haut faite de verre et d’acier est inaugurée à Morzine en la présence de Jean Vuarnet : elle le représente dans la position qui a révolutionné le ski de descente 50 ans plus tôt.