Anne Heggtveit ouvre le compteur canadien en ski alpin
Originaire d’Ottawa (Ontario), Anne est la fille de Halvor Heggtveit, né en Norvège, grand champion canadien de ski de fond dans les années 1930, et la nièce de Bud Clark, olympien qui a participé aux épreuves de fond, de combiné nordique et de ski alpin à Lake Placid en 1932 et à Garmisch-Partenkirchen en 1936. Mise sur les planches à l’âge de 2 ans, Anne fait preuve d’une précocité extraordinaire.
Elle remporte ses premières compétitions à 7 ans, et quelques années plus tard, elle devient la plus jeune gagnante du slalom géant du festival de ski d’Holmenkollen en Norvège, en 1954, à 15 ans. Toujours adolescente, Anne participe à toutes les épreuves de ski alpin des Jeux de Cortina d’Ampezzo en février 1956, où son meilleur résultat est une 22e place en descente. Mais ses années 1950 sont également ponctuées de blessures qui retardent sa progression vers le plus haut niveau.
Enfin en pleine possession de ses moyens physiques en 1959, Anne Heggtveit peut préparer activement ses Jeux 1960, avec notamment deux mois d’entraînement en Europe et aux Etats-Unis durant l’hiver au terme desquels elle déclare en janvier « Je pense que j’ai de bonnes chances pour les Jeux ». A Squaw Valley, son parcours commence par deux 12e places, d’abord en descente, puis dans le slalom géant.
« C’est la course que je vise » dit-elle à propos du slalom qui se dispute le 26 février en deux manches piquetées de 53 portes chacune sur le Little Papoose Peak. Anne Heggtveit porte le dossard N°3. Bien qu’elle estime s’être trouvée quasiment à l’arrêt en négociant la 10e porte, son style tout en attaque s’avère payant. Son chrono de 54 secondes en première manche lui donne une avance considérable sur ses poursuivantes : seule l’Autrichienne Marianne Jahn parvient à s’approcher à 1 seconde 1/2, les autres sont à plus de 3 secondes.
« Je n’avais pas de stratégie, ce n’était pas le problème. Avec un tel niveau de concurrence, il n’était pas question de se retenir, il me fallait juste m’élancer pour gagner chaque manche » expliquera Anne Heggtveit. Marianne Jahn n’arrive pas en bas du second tracé, elle est disqualifiée. L’Américaine Betsy Snite réussit le meilleur chrono en 55.5. La championne canadienne s’élance décidée à prendre à nouveau tous les risques, et en pensant « ou je reste debout, ou je tombe ».
Là encore, elle estime être passée un peu bas sur une porte en début de parcours, ce qui lui a fait perdre « quelques dixièmes ». Mais dans l’aire d’arrivée, elle signe le 2e temps à seulement 1/10e de seconde de Snite, et la devance à l’addition des deux manches de plus de trois secondes. L’Allemande Barbi Henneberger vient prendre le bronze à 7 secondes tout rond de la première médaillée d’or olympique canadienne (homme et femmes confondus) en ski alpin.
Et ce n’est pas tout ! Du côté de la FIS, Anne Heggtveit est également double championne du monde 1960 : du slalom, bien sûr, mais également du combiné grâce à sa 12e place en descente. Elle remporte du coup le prestigieux trophée Arlberg-Kandahar, ainsi que le prix Lou Marsh qui récompense le meilleur sportif canadien de l’année.
Le succès d’Anne Heggtveit a un retentissement considérable. Elle est emportée dans un tourbillon médiatique, puis est accueillie par une foule imposante à son retour à Ottawa. Retirée de la compétition à 21 ans après avoir atteint son but, elle est introduite au temple de la renommée sportive du Canada dès 1960, puis au « hall of fame » olympique en 1971 et est faite Membre de l’ordre du Canada en 1976. Dans sa station de Camp Fortune, la plus difficile des pistes noires porte son nom.