Iga Swiatek : "J’ai toujours rêvé des Jeux Olympiques !"
À seulement 19 ans et classée 54e joueuse mondiale, la Polonaise Iga Swiatek a impressionné tous les spécialistes de tennis en remportant son premier titre du Grand Chelem sur la terre battue de Roland Garros sans perdre un set. Fille d’un ancien rameur olympique, elle s’était révélée il y a deux ans en obtenant la médaille d’or en double lors des Jeux Olympiques de la Jeunesse à Buenos Aires. Désormais Tokyo est dans sa ligne de mire.
Dans ce Roland Garros 2020, repoussé à octobre pour cause de crise sanitaire, Iga Swiatek - prononcer Shfiantek - a déboulé comme un ouragan sur le devant de la scène. Rien ne l’a perturbée, ni la pluie, ni le froid, ni les adversaires. Elle les a surclassées les unes après les autres, de Marketa Vondrousova, finaliste du tournoi en 2019, au premier tour 6/2, 6/1 en passant par Simona Halep, n°2 mondiale, victorieuse à Paris en 2018, sur le même score 6/2, 6/1 ou encore l’Américaine Sofia Kenin, la gagnante du dernier Open d’Australie, en finale, 6/4, 6/1. En sept matches, elle n’a pas cédé le moindre set, ce que personne n’avait fait depuis Justine Hénin en 2007, ne laissant que 28 jeux au total à ses rivales.
"Je suis fière de moi, a-t-elle commenté. J’ai fait du bon travail au cours de ces deux semaines. Je ne m’attendais pas à remporter le trophée. C’est quelque chose d’incroyable qui va changer mon existence. J’ai l’impression que j’ai un peu écrit l’histoire en devenant la première Polonaise à remporter un titre du Grand Chelem."
Née à Varsovie le 31 mai 2001, cette joueuse à la grande intelligence de jeu, d’une précision millimétrique, était loin d’être une parfaite inconnue même si elle n’avait encore jamais gagné de tournoi sur le circuit féminin. Elle s’était déjà illustrée lors des Jeux Olympiques de la Jeunesse de Buenos Aires 2018, en remportant la médaille d’or du double, associée à la Slovène Kaja Juvan. Sur la terre battue du Buenos Aires Lawn Tennis Club, elles avaient arraché le titre de haute lutte en finale face aux Japonaises Naito et Sato 6/7, 7/5, 10-4. Quelques mois plus tôt, elle avait gagné le tournoi junior de Wimbledon en dominant la Suissesse Mirena Kung en finale 6/4, 6/2.
"En fait, j’avais gagné les Jeux Olympiques de la Jeunesse en double, mais je pense que je suis avant tout une joueuse de simple, analyse-t-elle. Cela avait une grande signification pour moi parce que je représentais mon pays. J’avais 'Pologne' écrit sur mon dos. Donc c’était incroyable. Mais je pense que ma victoire à Wimbledon chez les juniors avait encore plus d’importance. C’était une épreuve du Grand Chelem et ça m’a fait franchir un palier."
Avec le statut de gagnante d'un tournoi du Grand Chelem, ce qu’aucun Polonais – homme ou femme – n’avait accompli jusqu'ici, elle se projette vers les Jeux de Tokyo l’année prochaine avec beaucoup de gourmandise. En effet, son père Tomasz, un rameur, a pris part aux Jeux de Séoul en 1988, terminant à la 7e place du quatre sans barreur après avoir été éliminé en demi-finales. L’équipe finit 5e des championnats du monde la même année.
"J’ai toujours rêvé des Jeux Olympiques à cause de mon père, explique-t-elle. Je sais que ce n’est pas la même chose pour les autres joueurs de tennis mais pour moi, c’est vraiment quelque chose de spécial. Je me battrai pour une médaille."
Elle essaiera de tirer avantage de son expérience de Buenos Aires où elle avait été éliminée en quarts de finale du simple par la Française Clara Burel (une des autres surprises de ce Roland Garros 2020 avec une place au 3e tour) avant de remporter le double avec la Slovène Kaja Juvan.
"Gagner pour son pays, c’est toujours quelque chose de spécial, se souvient-elle. Je pense que c’est bien parce que l’année prochaine, il y aura les Jeux Olympiques de Tokyo. Et les Jeux Olympiques ont toujours été importants pour moi parce que mon père a été olympien à Séoul et sachant ça, les Jeux Olympiques représentent l’événement sportif le plus important à mes yeux. Je pense que j’aurai beaucoup de pression surtout après ma victoire en Grand Chelem, mais les Jeux Olympiques de la Jeunesse m’ont permis d’acquérir de l’expérience."
Même si elle est encore très jeune - la plus jeune gagnante de Roland Garros depuis Monica Seles en 1992, Iga Swiatek travaille depuis deux avec une psychologue du sport, sa compatriote et ancienne navigatrice Daria Abramowicz. Et si l’on en juge par son calme lors de la finale, ce travail est diablement efficace. "Elle me comprend de A à Z et elle me rend plus intelligente, souligne-t-elle. Grâce à elle, je gère beaucoup mieux mes émotions."
Ces émotions, elle a eu quelques difficultés à les contenir quand elle a évoqué son père dans son discours après la remise du trophée. "Mon esprit était un peu confus, explique-t-elle. J’ai l’habitude de parler à mon père en polonais et cela aurait été plus facile pour moi. Mais il a fait tellement de choses pour nous aider ma sœur et moi [sa sœur Agata est également joueuse de tennis]. Il a fait des sacrifices pour qu’on puisse faire ce que l’on aime. Il nous a vraiment tout donné. Je lui suis tellement reconnaissante de tout ce qu’il a fait pour moi."
Désormais, pour rendre hommage à Tomasz Swiatek, il ne lui reste plus qu’à poursuivre sa route jusqu’à Tokyo où une médaille olympique serait le plus beau cadeau qu’elle puisse offrir à son papa…