Finale de Grand Prix de taekwondo : Magda Wiet-Hénin est prête à briller aux JO : « Je vais être une lionne enragée ! »
Récente championne du monde 2023, Magda Wiet-Hénin voit la vie rose. Avant d’attaquer le défi des Jeux Olympiques de 2024, elle est revenue en exclusivité avec Olympics.com sur sa saison 2023, ses objectifs et comment elle a progressé mentalement pour connaître la meilleure période de sa carrière.
Le pas rapide, le regard aiguisé, Magda Wiet-Hénin descend rapidement un escalier de l’INSEP à la recherche d’un endroit calme.
Attrapée entre deux séances de kiné, la championne du monde de taekwondo 2023 en -67 kg s’est confiée en exclusivité à Olympics.com avant de s’envoler vers Manchester, en Grande-Bretagne, théâtre de la finale du Grand Prix de taekwondo 2023 (2-3 décembre).
Gênée par une déchirure au mollet, la Française de 28 ans ira se tester lors de cette compétition, celle « qui ressemble le plus aux Jeux Olympiques », sans la pression du résultat ou d’une course à la qualification olympique.
Portée par son énergie caractéristique, la fer de lance du taekwondo français est revenue sur les différentes étapes de sa carrière qui l’ont menée progressivement à son titre de championne du monde et à son statut de numéro 1 mondiale de sa catégorie.
Sans se cacher, Magda Wiet-Hénin a également évoqué ses doutes, sa confiance en elle fluctuante et son mental, « mon point fort et mon point faible », qu’elle travaille au quotidien.
Mature et déterminée, la voilà prête à écrire l’histoire, en visant le premier titre de championne olympique de l’histoire du taekwondo français.
Partez à la découverte de la taekwondoïste Magda Wiet-Hénin, qui rêve d'or aux Jeux Olympiques de Paris 2024,
LIRE AUSSI :
Magda Wiet-Hénin, une championne qui a pris son mal en patience : « J'ai pas de talent... »
Elle lui tournait autour depuis un certain moment. Comme un adversaire insaisissable, bloquant toutes ses attaques.
Abonnée aux podiums internationaux depuis sa médaille de bronze aux Championnats d’Europe en 2014, Magda Wiet-Hénin est devenue championne du monde des - de 67 kg, le 30 mai 2023 à Bakou en Azerbaïdjan.
« Je l'ai attendu tellement longtemps. […] J’étais déterminée… Je me rappelle de toute la journée et je me rappelle de la musique que j'écoutais, l'échauffement que j'ai fait. Quand je gagne mon quart de finale, je tape par terre, je jette mon casque. »
Un titre qui la consacre comme numéro 1 de sa catégorie, mais qui récompense surtout son travail de tous les instants. Car si la native de Nancy est une référence, c’est au bout de presque dix ans de compétitions seniors et d’entraînements intenses qu’elle a pu toucher l’or mondial.
« Ma progression a pris du temps. Je pense que là, j'ai atteint un niveau qui me permet d'arriver sur les compétitions et partir avec des médailles presque à chaque fois. Ça a vraiment été beaucoup de boulot parce que… j'ai pas de talent... voilà, je ne suis pas grande, je n'ai pas des jambes hyper souples, mais j'ai vraiment bossé et ça paye au bout de pas mal d’années. »
En remportant ce titre de championne du monde, Magda Wiet-Hénin rejoint une personne qui lui est chère et qui l’inspire au quotidien : sa mère, Valérie Hénin. Véritable ambassadrice des sports de combats en France, elle fut championne du monde de kick-boxing, de full contact et de boxe anglaise ainsi que triple championne de France de… taekwondo, la discipline de sa fille.
« Quand j'ai été championne du monde, je me suis dit, j'ai enfin réussi à rattraper maman, à atteindre son niveau. Ma maman a été championne du monde de boxe et du coup, j'ai toujours baigné dans l'univers du sport. J'ai commencé le taekwondo à six ans et j'ai tout de suite accroché. »
« Je me suis inspirée d’elle. Dans ma carrière actuelle, elle m'épaule beaucoup. Sa présence me booste, me donne la niaque », confie-t-elle dans un sourire qu’elle ne lâchera pas durant cet entretien.
Outre l’introduction au sport et plus précisément aux sports de combat, Magda Wiet-Hénin se voit transmettre par sa mère l’amour pour les Jeux Olympiques.
« Depuis toute petite, j'y pense (aux JO) parce que ma maman n'a pas fait de sport olympique et du coup, on sentait que le petit truc qui lui manquait c'étaient les Jeux. Pour elle, les Jeux Olympiques, ça représentait quelque chose. Et, pour moi aussi, ça a été important dès toute petite. »
Les Jeux Olympiques, Magda Wiet-Hénin les dispute pour la première fois à Tokyo 2020. Éliminée dès les huitièmes de finales alors qu’elle visait l’or olympique, ils restent une petite blessure pour la numéro 1 de la catégorie des - 67 kg.
Magda Wiet-Hénin : Mon mental ? « Mon point fort et mon point faible »
À Chiba, à une trentaine de kilomètres de Tokyo, au Japon, le rêve olympique de Magda Wiet-Hénin vient de s’envoler en ce 26 juillet 2021. Dominée par l’Égyptienne Hedaya Wahba, la Française s’arrête dès son entrée en lice alors qu’elle était remplie d’espoirs, pleine de certitude.
« Dès le premier coup de pied, j'ai senti qu'elle criait, qu'elle avait l'intensité, elle a totalement pris le dessus » explique Magda Wiet-Hénin, se remémorant ce souvenir douloureux, mais terriblement formateur.
Elle poursuit : « Je pense que les Jeux de Tokyo 2020, je les attendais tellement pour pouvoir parler et libérer ma parole que ça m'a perturbée. C'était toute cette pression en me disant : quand j'aurai gagné, je pourrai enfin délivrer et dire ce que j'ai vécu. »
À l’issue de ces Jeux Olympiques, Magda Wiet-Hénin libère sa parole et confie avoir été victime de violences sexuelles. La voix posée, elle revient sur cette révélation difficile, mais salvatrice.
« Avant, je n'étais pas prête (à le dire). J’avais peur qu’on me juge, que tout le monde puisse savoir ce qui me rend faible, je pense que ça me faisait peur, alors que je fais tout, pour être la meilleure, être la plus forte et me montrer que peu importe ce que j'ai vécu, je peux gagner, je veux être une championne. »
« Le dire à tout le monde, on dit que ça demande beaucoup de courage, mais moi, c'est juste que ça m'a vraiment fait beaucoup de bien. Je me sens mieux. »
À l’image de son profil Instagram, accueillant son visiteur avec de larges sourires, Magda Wiet-Hénin rayonne désormais.
« Ça fait un petit moment que je me sens épanouie dans ce que je fais, ça a du sens. Je me fixe des objectifs sportifs qui permettent de grandir dans mon sport, mais aussi à côté. En ce moment, je suis en plein kiff dans ma vie ! »
La confiance en soi, les doutes, le mental, des problématiques qui parlent à chacun. Les sportifs, malgré leur succès, ne sont pas étrangers à ces combats intérieurs. Forte de son expérience, Magda Wiet-Hénin en est consciente.
« Le mental, c'est mon point fort et mon point faible. Quand je me sens bien, il ne peut vraiment rien se passer. Mais quand je me sens pas bien, je peux vraiment perdre contre n'importe qui. Il reste beaucoup à travailler jusqu'aux Jeux pour que ça soit un point fort. »
Alors, la championne du monde met un accent particulier sur cet aspect longtemps délaissé par le monde sportif. Un enseignement de sa déception tokyoïte ?
« Je travaille mon mental au quotidien. […] Après, je n’ai pas énormément de confiance en moi. Mais, je pense que le fait que je me remette souvent en question me permet de continuer d’avancer. En tous cas, j'essaye d'aller chercher des petits trucs à modifier pour être la meilleure pour les Jeux. »
Numéro 1 de sa catégorie et championne du monde en titre, Magda Wiet-Hénin sera scrutée plus que jamais à Paris. Une cible dans le dos qui lui aurait fait peur auparavant mais qui, désormais, la motive plus que jamais.
« Les Jeux, c'est ce que j'attends depuis toujours »
Et si c’était dans l’élimination prématurée lors des Jeux de Tokyo 2020 que se trouve la clé d’un futur succès aux JO de Paris 2024 ? À cette équation, certes basique et simpliste, se cache peut-être un début de vérité pour Magda Wiet-Hénin.
« Je suis contente d'avoir eu cette première expérience parce que je pense que faire des premiers Jeux à Paris en étant numéro 1 et championne du monde, ça aurait été une pression que je n'aurais pas pu supporter. C'est une pression qui est totalement différente de toutes les autres compétitions. On peut se faire sortir par n'importe qui »
« J'espère pouvoir me servir de cette expérience pour me sentir bien sans penser à la peur. J'ai vraiment envie de pouvoir combattre à 100 % et prendre du plaisir plus que tout, pas me sentir frustrée comme la dernière fois où j'avais tout dans les jambes et je n'ai rien fait. »
À l'issue de la finale du Grand Prix de taekwondo 2023 à Manchester, les cinq meilleurs athlètes dans chaque catégorie de poids au classement olympique de World Taekwondo obtiendront chacun un quota pour leur Comité National Olympique. Numéro 1 des -67 kg avant cette ultime échéance, Magda Wiet-Hénin est donc en très bonne position.
La Nancéienne de 28 ans compte bien tirer profit des mois à venir pour préparer les Jeux Olympiques de manière optimale, aussi bien sur le plan physique - « ça permet aussi de préserver mon corps parce que je fais moins de compétitions » - que sur le plan mental - « il faut que je me dise aussi que c'est un moment unique et il ne faut pas non plus penser qu'à la performance parce que quand tu penses aux résultats, c'est là où tu peux stresser. Les Jeux c'est ce que j'attends depuis toujours. [...] Je vais être une lionne enragée ».
Si elle s’autorise à viser la médaille d’or et n’a pas peur de le déclarer, elle n’en fait pas une fin en soi. Pas de pression inutile, la Magda Wiet-Hénin cru 2023-2024 est arrivée à maturité.
« Je ne vois pas l'intérêt de le dire. Il reste du temps, il reste des compétitions, et surtout, je ne me sens pas encore prête à être championne olympique. Si c'était demain, je ne serais pas prête. Il reste du travail à fournir. »
Magda Wiet-Hénin sait que le chemin est encore long jusqu’aux Jeux Olympiques de Paris 2024. Perfectionniste et passionnée de son sport, elle énumère, en cette fin d’interview, les (nombreuses !) choses qu’elle souhaite travailler avant la compétition de sa vie.
À Paris, Magda Wiet-Hénin pourrait devenir la première championne olympique française de taekwondo. Pas mal, pour une personne « sans talent ».
*Les Comités Olympiques Nationaux (CNO) étant les seules autorités habilitées à déterminer qui représentera leur pays aux Jeux Olympiques, la participation de chaque athlète aux Jeux de Paris 2024 sera de fait du ressort desdits CNO, qui sélectionneront leur délégation nationale respective à Paris.
LIRE AUSSI - Comment se qualifier aux Jeux Olympiques de Paris 2024 en taekwondo