Escrime : Manon Apithy-Brunet et Boladé Apithy, le couple qui transforme l'amour en médailles | Grand Prix de sabre d'Orléans 2023

« On s’aime. »

À la question « comment vous rendez-vous meilleurs ? », Boladé Apithy a répliqué avec autant de justesse que sur une piste. Dit en riant et en faisant rire Manon Apithy-Brunet, sa femme, sa réponse a été rapidement étayée.

« Je dis l’amour en rigolant un peu, mais c’est la vérité. Quand tu es bien dans ta vie extérieure, c’est plus simple d’être fort dans ton sport », explique-t-il dans une interview exclusive avec Olympics.com.

Le couple de sabreurs peut compter sur un quotidien en parfaite harmonie pour exceller en escrime. Mariés depuis 2021, ils vivent sur un rythme plus simultané que n'importe quelle touche. Mêmes objectifs, même planning, même club, même arme et même classement mondial en décembre 2023, cinquième : l'union des deux athlètes basés à Orléans dépasse largement le cadre légal.

« Quand on rentre de l'entraînement, il n'y a personne qui dit 'vient, on va au cinéma à la séance de 22 h 30'. On est tous les deux sur la même longueur d'onde, c'est aussi du soutien au quotidien, de la motivation. Quand il y en a un qui n'est pas bien, l'autre peut l'aider parce qu'il est déjà passé par là », avoue le récent vainqueur de la Coupe du monde d’Alger.

Et si la baisse de régime est aussi partagée, ils connaissent une solution pour y remédier : voyager. C'est une des autres passions communes de ce couple qui fait en sorte d’être « normal » en sortant de la salle.

Cette plénitude a un impact sur leurs performances sportives, selon Manon Apithy-Brunet. Et une compétition l'a prouvé : les Jeux Olympiques de Tokyo 2020.

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Manon Apithy-Brunet : « Boladé m’a un peu sauvée quand même »

Le 26 juillet 2021, Manon Apithy-Brunet est montée sur son premier podium olympique en terminant troisième du sabre individuel femmes. Aurait-elle pu obtenir ce résultat sans celui qui est devenu son mari quelques mois plus tard ?

« Je ne pense pas », assume-t-elle.

Après un début de journée maîtrisé, son rêve de médaille d’or s’est envolé avec une défaite aux portes de la finale face à Sofia Pozdniakova (10-15).

Un énorme coup dur qui a fait remonter le spectre de sa quatrième place à Rio 2016.

Aucune pensée et aucune parole ne pouvait lui faire passer l'envie de pleurer à ce moment-là. C'est finalement un coup de fil de Boladé Apithy qui lui a redonné la motivation de chercher la médaille de bronze.

« Je pense qu’il m’a un peu sauvée quand même. »

Dix minutes au téléphone pour lui conseiller de s’amuser, de se battre et de lâcher prise pour ne rien regretter ont changé son humeur.

Et son destin.

« Il a fini par une petite phrase magique. ‘Si tu veux me prouver que tu m’aimes, va sur la piste et amuse-toi, on s’en fout du résultat’, du coup j’ai rigolé », se rappelle-t-elle avec émotion.

La native de Lyon a alors trouvé les ressources nécessaires pour battre Anna Marton (15-6) et chercher cette médaille d'accomplissement synonyme de soulagement.

« Quand je suis montée sur le podium, je me suis rappelé une fois, on était en vacances ensemble, on était sur une plage paradisiaque et il m'a dit 'Attends, arrête-toi et regarde cet endroit, regarde comme c'est beau et profite de ce moment'. Sur le podium olympique, je me suis dit que c'était comme la plage paradisiaque, il fallait que je profite de ce moment. »

Comme l'étendue de sable fin, son conjoint était alors à des milliers de kilomètres. Il avait pourtant tout fait pour être présent au Makuhari Messe Hall.

En compétition ou à la maison, Manon Apithy-Brunet et Boladé Apithy passent du temps ensemble

Manon Apithy-Brunet et Boladé Apithy ont vécu les Jeux Olympiques de Tokyo 2020 ensemble, mais pas les cérémonies de remise de médailles.

En ces temps de Covid-19 et de protocole sanitaire, le sabreur avait dû quitter le Japon dès le lendemain de sa compétition, non sans avoir tout tenté pour être aussi proche des yeux que du cœur.

« Il a même négocié en disant qu’il voulait me demander en mariage » ironise celle qui a aussi gagné l’argent par équipes.

Cinq ans plus tôt, ils avaient déjà vécu Rio 2016 ensemble. Boladé Apithy n’était alors pas sélectionné mais présent en tant qu’entraîneur de Yemi, son frère qui était qualifié sous les couleurs du Bénin.

« Il était déjà fou dans les gradins », rigole Manon Apithy-Brunet, avant la confirmation de son mari.

Cette connexion entre les deux amoureux est vraiment unique. Depuis la piste, celle qui est plus calme en tant que supportrice le voit parfois sauter, courir et même tomber de sa chaise en tribunes.

« On vit le truc à fond, mais pas pour soi, c’est très spéciale comme sensation. Quand je la regarde, j’ai l’impression que je vais faire une syncope. C’est hyper stressant et dur », détaille le natif de Dijon qui reconnait parfois devenir acteur de quelque chose dans sa tête et moins stresser quand sa femme est menée.

« Tu es bizarre, toi », se moque-t-elle en l’apprenant.

Un tel moment de complicité est même possible entre deux matchs quand ils sont en lice le même jour, sur une même épreuve.

Si le programme le permet, les deux Français se retrouvent entre leurs passages sur la piste.

« On passe du temps ensemble, comme à l’entraînement » détaille Noune.

« Comme à la maison » précise Biboun.