Eric Moussambani : « Cela a totalement changé ma vie »

Après avoir disputé sa série du 100m nage libre bouclée en 1:52, le 19 septembre 2000 à Sydney, Eric Moussambani est instantanément devenu célèbre. Sa vie n’a plus jamais été la même.

Eric Moussambani : « Cela a totalement changé ma vie »
(Getty Images)

« Je viens de la Guinée Equatoriale, un petit pays au centre de l’Afrique. J’ai commencé à nager en sortant du lycée. Nous n’avions pas de piscine, nous n’avions rien, et je m’entraînais dans le bassin privé d’un hôtel qui mesurait, je crois, 13 m. Je m’y entraînais seul, je n’avais aucune expérience de la natation. Le bassin était disponible de 5h à 6h du matin, je ne pouvais m’entraîner que 3h par semaine. Mais je nageais aussi dans les rivières et à la plage. Là, les pêcheurs m’expliquaient comment utiliser mes jambes, comment nager. Rien de professionnel » raconte Eric Moussambani.  

La découverte

A 22 ans, il participe aux Jeux Olympiques de Sydney 2000. « Je n’avais jamais entendu parler de Sydney ou de l’Australie, c’était la première fois que je sortais de mon pays. Le voyage a duré trois jours, avec de nombreuses escales »

Arrivé sur place, Eric Moussambani est émerveillé par le Village Olympique (« si grand ! ») puis découvre la piscine de Homebush Bay, la première fois qu’il voit un bassin de 50m. « J’étais effrayé ! C’était le bassin dans lequel j’allais courir ! ».  Comme ses horaires d’entraînement correspondent avec ceux des nageurs américains, il les observe, tente de comprendre comment plonger, comment coordonner ses gestes. Il reçoit l’aide d’un entraineur sud-africain qui commence par lui demander s’il est bien un nageur, s’il est bien là pour disputer une course, puis lui prête un maillot de compétition, une paire de lunettes, et lui consacre du temps pour l’aider à se forger une technique.

« Je l’ai fait ! »

Enfin, le matin du mardi 19 septembre 2000, c’est l’heure. Eric Moussambani entre dans la piscine olympique pour courir la première série du 100m nage libre, en compagnie de deux autres nageurs, le Nigérien Karin Bare et le Tadjik Farkhod Oripov. Tous deux font un faux départ alors qu’Eric reste calé sur son plot. Ils sont disqualifiés, et le voilà seul à la ligne 5 pour disputer sa course.

« J’ai très bien nagé les premiers 50m » se souvient-il. « J’ai utilisé toute mon énergie en pensant dans ma tête : « go, go, il faut finir ! » Je savais que tout le monde me regardait,  ma famille, mon pays, ma mère, ma soeur, mes amis. C’est pourquoi je me disais qu’il fallait faut continuer, qu’il fallait finir, même si j’étais seul dans la piscine. Je ne me préoccupais pas du chrono, mais seulement de compléter ce 100m ».

Dans la deuxième longueur, Eric Moussambani commence à payer sa débauche d’efforts. Les jambes deviennent dures, il a le sentiment de faire du sur-place, de ne plus avancer. « Et puis j’ai commencé à entendre le public hurler, m’encourager «  go go go ! », cela m’a donné la force de finir. Quand j’ai touché le mur, je me suis dit « Oh, je l’ai fait ! ».  J’étais le premier nageur de mon pays à disputer un 100m nage libre dans une compétition internationale.  J’étais si heureux de l’avoir fait ! Mon chrono de 1:52 était mauvais, mais l’esprit olympique, ce n’est pas que la compétition, c’est aussi participer, et cette force, cet esprit que l’on transmet aux gens, c’est je crois ce qui m’a rendu célèbre ». 

Un tourbillon médiatique

En effet, et à son plus grand étonnement, après avoir été applaudi à tout rompre par le public australien, puis entouré et félicité à sa sortie du bassin, Eric Moussambani est emporté dans un tourbillon médiatique. Le monde entier veut en savoir plus sur le nageur de la Guinée Equatoriale. Dans le village olympique, il signe des autographes. « Puis j’ai commencé à me voir et à voir ma course sur toutes les télévisions, CNN, les grandes chaines internationales. J’ai aussi donné de nombreuses interviews. Cela a totalement changé ma vie ».

Eric Moussambani n’a plus disputé les Jeux, mais il a porté le record national du 100m à 57 secondes. La Guinée Equatoriale possède aujourd’hui deux bassins de 50m et il est le manager de l’équipe nationale de natation. « J’essaye de promouvoir la natation dans mon pays. J’essaye d’aider les jeunes qui veulent devenir de bons nageurs. Je veux les encourager à nager, à faire du sport » explique-t-il en préparant son équipe pour les Jeux de Rio 2016.

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