Denis Gargaud-Chanut veut arriver à Tokyo par la grande porte

Champion olympique en titre du canoë monoplace slalom (C1), Denis Gargaud-Chanut a profité de la longue période d'arrêt de sa pratique due à la pandémie de COVID-19 pour comprendre à quel point il aimait son sport, la compétition et les Jeux Olympiques. Présélectionné pour les Jeux qui devaient se dérouler cette année, il sait maintenant que tout est à refaire et s'en réjouit, car c'est "par la grande porte" qu'il veut aller défendre son titre à l'été 2021.

Denis Gargaud-Chanut veut arriver à Tokyo par la grande porte
(Getty Images)

Cela fait longtemps que Denis Gargaud-Chanut pagaye au plus haut niveau dans le circuit international du canoë slalom, expliquant notamment : "Cela fait plus de dix ans que je ne suis pas sorti du top 10 mondial", ponctuant son arrivée au sommet avec un titre de champion du monde gagné à Bratislava en 2011. En France à cette époque, le grand nom du C1 est Tony Estanguet, et c'est lui qui décroche le ticket pour les Jeux de Londres 2012 où il s'en va quérir son troisième titre olympique. Mais quatre ans plus tard à Rio, Denis Gargaud-Chanut lui succède au palmarès !

Le champion olympique du C1 2016, provençal et marseillais de cœur, a mis tous les atouts de son côté pour pouvoir gagner sa place aux Jeux de Tokyo, déménageant avec femme et enfants à Pau, pour s'installer à quelques dizaines de mètres du stade en eaux vives de classe internationale qui a été construit là à la fin des années 2000 sous l'impulsion des frères Tony et Patrice Estanguet. Le processus de sélection a duré deux ans et a été brusquement interrompu par la pandémie de COVID-19. Trois pagayeurs français devaient se départager aux Championnats d'Europe de slalom 2020 programmés en mai à Londres.

"En 2019, Martin Thomas a fini médaillé d'argent aux Championnats d'Europe à Pau et Cédric Joly a gagné les Championnats du monde à la Seu d'Urgell. Du coup, nous étions trois athlètes en lice et nous devions donc régler ça aux Championnats d'Europe de Londres, mais ils n'ont effectivement pas pu avoir lieu. La règle de sélection prévoyait qu'au cas où, c'est le classement mondial qui prévaudrait. Or, étant le Français le mieux classé, et c'est là où je suis le plus régulier, j'étais en position d'être sélectionné pour les Jeux de Tokyo 2020."

"Je vis pour les Jeux"

Puis, le 24 mars, la décision est tombée avec le report d'un an des Jeux de la XXXIIe Olympiade. "Sportivement ça a été dur à vivre. J'habite à 50 m du stade en eaux vives de Pau, et j'ai pu pagayer un peu au début du confinement alors que d'habitude je pars m'entraîner en Australie. Étant sélectionné pour les Jeux, il fallait que je maintienne le niveau. Je respectais les règles sanitaires, j'étais tout seul dans le bassin. Je ne savais pas trop ce que je devais faire. C'était compliqué, puis il a fallu couper toute activité et là j'ai vécu un véritable ascenseur émotionnel."

Mais finalement, il explique : "Ce confinement m'a fait prendre conscience de quelque chose que je savais déjà, mais cela l'a vraiment mis en lumière : j'ai besoin du slalom en canoë pour être heureux dans la vie, j'aime mon sport, j'aime la compétition et je vis pour les Jeux. Cette confirmation m'a rendu très heureux. Je suis très content d'avoir pu prendre le temps de comprendre cela. Il y a des fois dans une carrière où on s'auto-persuade qu'on aime ça. Mais parfois, comme tout métier, comme tout investissement important c'est dur. Et là je me rends compte qu'après avoir passé 56 jours sans faire d'eaux vives, j'ai fait un constat très positif qui me remplit d'optimisme pour la suite."

Sa vision du report des Jeux de Tokyo est également très positive : "Je l'ai très bien vécu en tant qu'athlète olympique. C'était la décision à prendre, et il fallait qu'elle vienne du Mouvement olympique plutôt qu'elle nous soit imposée. Je n'ai pas apprécié les interventions des politiques sur ce sujet-là. Le CIO est une institution assez importante pour faire ses choix elle-même. J'ai été content que ce soit le président Thomas Bach qui prenne la décision."

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Et d'ajouter : "Sinon, de mon côté, cela veut dire que pour la sélection, tout est à refaire. Ou plutôt, il faut que nous nous affrontions pour représenter la France, puisque cette épreuve n'a pas pu avoir lieu. Ainsi, si je gagne, j'arriverai à Tokyo par la grande porte et cela correspond à mes valeurs olympiques. Cela fait aussi partie de notre sport. Je suis en fin de compte soulagé que cela ait été reporté et que nous puissions avoir de vraies sélections."

"Repartir de zéro et réaliser quelque chose de nouveau"

Dans l'histoire du slalom en canoë, au programme des Jeux depuis 1972, ils ne sont que deux à avoir été plusieurs fois médaillés d'or : le Slovaque Michal Martikan (1996, 2008) et son éternel rival Tony Estanguet (2000, 2004, 2012). L'actuel membre de la commission des athlètes du CIO et président du comité d'organisation de Paris 2024 est donc le seul à avoir réussi à conserver son titre, des Jeux de Sydney à ceux d'Athènes. Est-ce que cet exploit inspire Denis Gargaud-Chanut ? "Faire un doublé n'est pas ce qui m'anime. Ce que je voudrais, c'est juste essayer de gagner à nouveau. Le doublé a une connotation de répétition et d'addition alors que je préfère repartir de zéro et réaliser quelque chose de nouveau."

Saluant la parité avec l'arrivée du slalom féminin en kayak  (K1) au programme, au détriment du canoë biplace hommes (C2), il souligne : "Le grand projet l’emporte sur le petit, mais je n'oublie pas mes amis du C2 avec qui j'ai passé tant d'années en équipe de France."

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Concernant le futur proche, il remarque : "Je crois qu'aujourd'hui la planification reste en question. C'est une nouveauté. J'essaye de faire en sorte d'avoir une vision sur ce qui pourrait se passer, mais sans m'y attacher, car je sais qu'elle peut être perturbée. Ça nous est tombé dessus en mars 2020, j'aimerais si possible être moins surpris. Il va falloir faire preuve d'adaptation. C'est l'une des qualités d'un athlète. Mais celles-ci ne nous affectent pas que sur un terrain de sport, mais dans la vie. J'ai dit à mon épouse qu'elle aussi devrait faire preuve d'adaptation. Les personnes de notre milieu savent faire. Mais les conséquences sont aussi familiales."

De retour sur l’eau-vive et qu’est ce que c’est bon!...#canoekayak #whitewater

Posted by Gargaud-Chanut Denis - Canoe Slalom Athlete on Thursday, May 14, 2020

À l'heure de reprendre l'entraînement sur le bassin d'eaux vives situé à côté de son domicile palois, Denis Gargaud-Chanut rappelle qu'il s'agit d'un besoin vital, et que la pratique est très importante. "Je me considère comme un soldat de la paix. Nous sommes tous les guerriers pacifiques de nos pays. C'est tellement beau de voir des pays qui s'affrontent selon ces règles. Durant le confinement, j'aurais aimé pouvoir conserver une certaine pratique. Au Jeux, tout le monde a les mêmes règles, mais de mars à mai, je n'ai pas pu pratiquer alors que des concurrents dans d'autres pays ont pu le faire. Il n'y a pas de mal. Sur le coup, ça a été dur à vivre. Maintenant, il va falloir tout rejouer, et si tout va bien, arriver à Tokyo par la grande porte !"

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