La Canadienne Cynthia Appiah pense à la diversité et à l’or en monobob

La pilote canadienne et star du monobob veut inspirer les « enfants et les jeunes, surtout la jeunesse noire » pour ses débuts olympiques d’hiver à Beijing 2022.

5 minPar Will Davies
Canada bobsleigh monobob pilot Cynthia Appiah
(2017 Getty Images)

Lorsque la Canadienne Cynthia Appiah prendra le départ de la nouvelle épreuve de bobsleigh, le monobob, des Jeux Olympiques d’hiver de Beijing 2022, ce sera l'aboutissement de quatre années éreintantes et d'une carrière faite de sacrifices, de combats et de triomphes.

De plus, ce sera l’occasion de faire deux débuts : l’un pour la discipline du monobob et l’autre pour l’athlète, qui avait reçu une nouvelle bouleversante deux semaines avant PyeongChang 2018.

Juste avant ces Jeux, la jeune femme alors âgée de 27 ans apprenait qu’elle ne serait que remplaçante de l’équipe du Canada, n’ayant donc pas sa chance de concourir.

« C’était plus que déchirant », déclare l’ancienne spécialiste de l’athlétisme à Olympics.com.

« Il n’existe pas de mots pour décrire les sentiments que j’ai éprouvés. À la fin de la saison précédente, j’avais fait l’épreuve-test pour PyeongChang avec Alysia Rissling et nous avions terminé troisième sur cette piste ».

« C’était très douloureux de voir le rêve olympique que je pensais avoir atteint m’échapper des mains. C’était très difficile de regarder tout cela depuis la touche. Il n’y a pas eu un jour où je n’ai pas pleuré, mais cela m’a montré qui j’étais ».

« Une fois que j’ai traversé cette épreuve et que j’ai ramassé les morceaux cassés, j’ai dû décider ce que je voulais faire et ce pourquoi j’étais dans le bobsleigh. Je ne suis pas heureuse d’être passée par cette expérience, mais ce que j’en ai appris m’a rendue meilleure. Je suis revenue avec un nouvel état d’esprit ».

D’une piste à l’autre

Auparavant athlète dévouée au lancer du poids et du marteau, Appiah a découvert le bobsleigh en tant que freineuse pour Kaillie Humphries et Rissling.

Après avoir manqué de faire ses débuts aux Jeux Olympiques en 2018, elle s’est retrouvée à la croisée des chemins et a même envisagé de tout plaquer.

« Quand j’ai décidé de revenir dans ce sport, je savais que j’allais soit continuer en tant que pilote, soit tout remballer et rentrer à la maison, car je ne voulais plus rester au poste de freineuse », déclare-t-elle à ce sujet.

« Il n’y avait pas de retour en arrière possible et j’ai trouvé cela très amusant. Il y avait beaucoup de chutes, surtout que Lake Placid (pour l’école de pilotage) est l’une des pistes les plus difficiles du monde, mais c’était une expérience formidable à laquelle je suis très heureuse d’avoir participé ».

L’athlète de 31 ans est aujourd’hui l’une des meilleures athlètes de monobob au monde, elle qui a terminé troisième du classement général des séries mondiales de monobob en 2021/22.

Cynthia APPIAH

Canada
Bobsleigh

Appiah est motivée par bien plus que son rêve de devenir olympienne.

« Je veux toujours être la meilleure que mon sport ait jamais connu. Je crois que j’en suis pleinement capable, mais je veux vraiment être l’incarnation de ce que les athlètes noirs peuvent accomplir », raconte-t-elle à Olympic.ca en 2021.

« Je veux être une représentation visuelle pour les enfants et les jeunes, en particulier pour la jeunesse noire, pour montrer que nous avons notre place dans tous les sports, y compris les sports d’hiver ».

Fille d’immigrants ghanéens, Appiah voit la famille comme un puissant facteur de motivation, elle qui a grandi dans un logement communautaire.

Auprès de CBC, diffuseur canadien, elle est revenue sur ses liens familiaux et la place centrale occupée par ses parents dans son parcours, de l’athlétisme au bobsleigh jusqu’à Beijing 2022.

« Mes deux parents ont travaillé très dur pour venir du Ghana au Canada. Ils nous ont vraiment inculqué que l’éducation était un élément très important et qu’ils espéraient que nous pourrions obtenir de meilleurs emplois qu’eux, vivre de meilleures vies qu’eux », se souvient-elle.

« Mais lorsqu’ils ont compris à quel point j’étais passionnée par le bobsleigh et que le succès a commencé à arriver, ils sont devenus mes plus grands fans. À tel point que c’en était presque gênant ».

« Toute ma famille s’est vraiment ralliée à moi. Je suis super reconnaissante de tout le soutien que j’ai reçu de ma famille au fil des ans ».

Cette nature si soudée de sa famille a justement rendu les sacrifices, parfois, plus difficiles, avec des retrouvailles, des fêtes et des anniversaires manqués, des déménagements loin de la maison et plusieurs emplois occupés pour économiser afin de pouvoir concourir.

En revenant sur son parcours, Appiah décrit à CBC le feu qui brûle en elle dans sa quête d’atteindre ses objectifs et de surmonter la déception née il y a quatre ans.

« Il y a eu tellement de choses qui sont entrés en jeu pour expliquer pourquoi. Une partie de moi, aussi loin que je veuille remporter une médaille et que je pense pouvoir le faire, une partie de moi voulait revenir et prouver aux gens qu’ils ont fait une erreur en 2018 », clame-t-elle.

« Je sais que cela peut sembler un peu contre-nature de penser comme ça pour une Canadienne, mais une partie du projet était de se dire ‘Je vais vous montrer à quel point vous vous êtes trompés en 2018’ ».

« J’ai participé à l’épreuve-test pour Pékin en octobre et j’en suis repartie avec une médaille de bronze, que j’espère transformer en or ».

« Mais pour moi, le succès ultime serait de pouvoir poser le pied sur la ligne de départ et de me désigner officiellement olympienne ».

« Cela m’aidera à me valider moi-même, car je me suis sentie comme un imposteur au cours de ces quatre dernières années. Je n’étais pas capable de voir en moi une olympienne, car je ne le suis pas encore ».

« Une grande victoire pour moi serait de pouvoir ajouter officiellement ces trois lettres à côté de mon nom à la fin de ces Jeux ».

Le monobob féminin commence avec un entraînement officiel ce jeudi 10 février au Yanqing National Sliding Centre.

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