Johan Clarey : « À 41 ans, je prends beaucoup plus de plaisir »
Johan Clarey va tenter de décrocher la première médaille olympique de sa carrière. Pour y arriver à Beijing 2022, lors de sa quatrième participation aux JO d’hiver, le skieur de Tignes peut compter sur son expérience, mais aussi sur des résultats qui lui ont permis d’entrer dans l’histoire du ski alpin avec un record du monde.
Johan Clarey est comme le bon vin, il se bonifie avec le temps.
C’est à 40 ans que le skieur français a terminé sa première saison dans le top 5 de la Coupe du monde de descente pour la première fois de sa carrière. Au passage, le natif d'Annecy s'est classé deuxième à Kitzbühel. Ce résultat lui a permis de devenir le plus vieux skieur de l’histoire à monter sur un podium en Coupe du monde de ski alpin.
Ce n’était pas la première fois que le Français marquait l’histoire de sa discipline. En 2013 à Wengen, il était le premier skieur à franchir la barre des 160 km/h en Coupe du monde. Un record de vitesse qui tient toujours…
Records, longévité, ambition pour les Jeux Olympiques d’hiver de Beijing 2022 où il va commencer par disputer la descente, le dimanche 6 février : le quadragénaire s’est confié à Olympics.com.
« Skier encore à 40 ans, même si dans la tête, je ne les ai pas, c'est incroyable. On m'en parle souvent, c'est plutôt sympa d'être le doyen du circuit. »
Après les retraites de Julien Lizeroux et Hannes Reichelt l’été dernier, Johan Clarey a débuté la Coupe du monde de ski alpin avec l'étiquette de plus vieux skieur en activité. Le 8 janvier dernier, le skieur de Tignes a fêté son 41e anniversaire. Et cela ne l’a pas empêché de s’aligner en descente à Wengen moins d'une semaine plus tard, où il a fait 14e le 14 janvier et 18e le 15 janvier.
Dans la station suisse, le descendeur est retourné sur la neige où il a marqué l’histoire de sa discipline pour la première fois de sa carrière. En 2013, Johan Clarey y a établi un record de vitesse en Coupe du monde qui tient toujours : 161,9 km/h.
« C'est un très bon moment parce que j'ai fait une bonne course. Wengen est une piste exigeante où j'ai pris un plaisir fou parce qu'elle était vraiment hyper agréable à skier et c'est pour ça qu'on est allé aussi vite. L'arrivée au fond de ce trou des Autrichiens était incroyable. Ce jour-là, les conditions étaient parfaites pour atteindre des vitesses folles et depuis, ils ont essayé de nous freiner un peu. »
Un petit regret accompagne quand même cette performance historique.
« Ce jour-là, j'aurais préféré gagner la course ou gagner une course et ne pas avoir ce record-là », avoue celui qui a terminé cinquième de la descente durant laquelle il a fait tomber une barrière encore plus symbolique pour les Anglo-saxons : celle des 100 miles à l’heure.
Dix-sept saisons en Coupe du monde mais aucune victoire
Johan Clarey a peut-être inscrit son nom dans le livre des records, il n’a toujours pas de victoire en Coupe du monde à son palmarès. Mais le quadragénaire peut espérer y remédier. Depuis trois saisons, il ne cesse de progresser. L’hiver dernier (2020-21), il a même terminé dans le top 5 de la Coupe du monde de descente pour la première fois de sa carrière.
Sur la mythique descente de Kitzbühel, Johan Clarey aurait même pu s’imposer sans un incroyable Beat Feuz. Le Français a terminé deuxième. Ce résultat lui a permis de battre un nouveau record : celui du plus vieux skieur à monter sur un podium en Coupe du monde de ski alpin. Un record qu'il a prolongé en 2021-22 avec une deuxième place, encore à Kitzbühel, le 21 janvier 2022, derrière le Norvégien Aleksander Aamodt Kilde.
Il avait déjà obtenu cet honneur aux Championnats du monde deux ans auparavant. À Are en 2019, il avait décroché sa première médaille planétaire avec l’argent en super G. Avec de tels accomplissements sur le tard et son vécu, le Tricolore relativise sa quête de succès.
« J’y ai pensé pas mal. Maintenant, ce n'est pas un objectif absolu. Ça ne devient pas une obsession, je suis très fier de ma carrière. Si elle vient, c'est que c'était écrit. Si elle ne vient pas, il y aura quand même eu de très belles choses dans ma carrière. »
« C'est mon histoire qui est particulière »
Une victoire viendrait tout de même récompenser l’incroyable longévité de Johan Clarey. Le skieur aux 221 départs en Coupe du monde a fait sa première apparition au plus haut-niveau en novembre 2003. Si le natif d'Annecy a connu des débuts difficiles avec de nombreuses blessures, il a su en tirer une fraîcheur mentale qui lui permet de continuer les efforts, même après 40 ans.
« À partir de 30 ans, je me suis beaucoup moins blessé et je prends beaucoup plus de plaisir maintenant. J’avais encore pas mal de choses à prouver et pas mal d'envie. C'est ce qui fait que je suis encore plutôt performant. Je me suis dit que ce n'était pas fini et j'ai fait mes plus belles années entre 35 et 40 ans, ce qui est assez incroyable », a expliqué celui qui s’est rompu les ligaments croisés des deux genoux 2009. Aujourd’hui encore, être revenu après cette blessure est l’exploit dont il est le plus fier.
Après avoir voulu griller les étapes durant ses jeunes années, Johan Clarey a su positiver et se mettre moins de pression pour atteindre les sommets.
Sa maturité a peut-être été tardive, mais elle est caractéristique de ce personnage à part.
« C'est mon histoire qui est particulière. J'ai accompli beaucoup de choses tard dans ma vie : marcher, faire mes dents d’après ma mère, me marier. Donc il fallait que je fasse ma carrière très tard. »
À LIRE AUSSI : Les différences entre les épreuves du ski alpin
Une histoire mouvementée avec les Jeux Olympiques d’hiver
Et si c’était aussi juste avant le crépuscule de sa carrière que Johan Clarey décrochait une médaille olympique ? À Beijing 2022, ça sera son ambition.
À Pékin, il va participer aux JO d’hiver pour la quatrième fois de sa carrière. Mais ce n’était pas prévu. Après des résultats décevants à Sotchi 2014, le Français avait prévu de prendre sa retraite l’année suivante. Il a obtenu son meilleur résultat à PyeongChang 2018 avec un 18e place en descente, mais il ne pensait pas aller jusqu’à Beijing 2022. « [Le fait d']y être, je trouve ça tellement incroyable que je ne sais pas trop quoi en penser. »
« J'espère que la dernière expérience sera la meilleure. Je pense que psychologiquement, je vais mieux les aborder, j'ai plus d'armes que les dernières fois pour faire des bons résultats », avoue celui pour qui la découverte des JO d’hiver à Vancouver 2010 reste son meilleur souvenir sur la scène olympique.
Même des années plus tard, Johan Clarey était encore « à des années-lumières » de s’imaginer que sa carrière allait l’emmener aussi loin et aussi haut.