Paavo Nurmi, la légende finlandaise qui a battu deux records olympiques à 2h d'intervalle
Les Jeux Olympiques regorgent de champions, de records et de merveilleuses histoires mais le plus grand événement sportif du monde a également été le théâtre de scènes très originales, étranges, émouvantes, tristes ou cocasses. Chaque semaine, nous vous sortons des archives l’une de nos meilleures histoires. Aujourd’hui, voici celle de Paavo Nurmi le « Finlandais volant » qui a remporté deux médailles d'or avec deux records olympiques dans des courses espacées de seulement deux heures.
Le contexte
Avant même les Jeux Olympiques de Paris de 1924, le Finlandais Paavo Nurmi était déjà considéré comme l'un des meilleurs coureurs de demi-fond de tous les temps. Quatre ans plus tôt, aux Jeux d'Anvers, Nurmi avait réalisé un triplé impressionnant en remportant l'or sur 10 000 m, en cross-country individuel et par équipe. Mais les Jeux Olympiques d'Anvers ont également été marqués par un autre événement : la médaille d'argent qu'il a remportée sur 5 000 m, où il a été battu par le Français Joseph Guillemot. C'était la seule la seule finale olympique qu'il perdait face à un coureur d'une autre nationalité.
Et les finales a venir été nombreuses.
Vers la fin de 1923, un an avant les Jeux Olympiques de Paris, Nurmi détenait trois records du monde sur piste : le mile, le 5 000 m et le 10 000 m.
Cet exploit n'avait jamais été réalisé auparavant, et n'a jamais été réédité depuis.
Il est donc juste de dire que pour les Jeux de Paris, Nurmi était favori pour l'or. Mais, pour des raisons indépendantes de sa volonté, Paris 1924 sera tout sauf un voyage facile pour le Finlandais.
Les finales
Nurmi est arrivé à Paris avec un plan sans précédent.
« Six mois avant, j'avais décidé de participer à toutes les courses olympiques entre 1 500 m et 10 000 m », a expliqué l'athlète finlandais dans une interview publiée dans le livre de l'histoire officielle des Jeux Olympiques.
Cependant, inquiets de voir leur athlète vedette souffrir d'épuisement, le staff finlandais a convaincu Nurmi d'abandonner ses plans sur 10 000 m. Même sans cette course, Nurmi était aligné sur cinq épreuves : le 1 500 m, le 5 000 m et le cross-country individuel, ainsi que le 3 000 m et le cross-country par équipe.
Mais le plus grand défi pour Nurmi cette année-là est peut-être venu des organisateurs de la compétition eux-mêmes : les finales du 1 500 m et du 5 000 m étaient prévues le même jour, à moins de deux heures d'intervalle.
Le 10 juillet, sous une chaleur étouffante, Nurmi a commencé sa quête pour gagner deux médailles d'or olympiques le même jour. Sur les 800 premiers mètres de la finale du 1 500 m, il a couru trois secondes plus vite que son propre record du monde. Il a gagné après que son principal concurrent n'abandonne à l'avant-dernier tour.
Au final, il a battu le record olympique de plus de trois secondes.
Moins de deux heures plus tard, Nurmi a dû faire face à un défi encore plus grand. Il a également dû affronter la seule personne capable de le défier pour la victoire : son compatriote Ville Ritola, qui avait déjà remporté le 3 000 m steeple et le 10 000 m.
Espérant l'intimider, Ritola a entamé la finale du 5 000 m à une allure proche du record du monde, mais Nurmi a accepté le défi, rattrapant le leader de la course avant de s'assurer l'or avec un nouveau record olympique.
Au final, la course a semblé être un jeu d'enfant depuis les tribunes, et The Guardian est allé jusqu'à décrire la victoire comme ayant été obtenue « sans effort apparent ».
Les conséquences
Les Jeux olympiques de Paris 1924 n'étaient pas encore terminés pour Nurmi.
Le samedi suivant, il s'alignait sur le cross contre 42 concurrents sous une lourde chaleur. Seuls 12 athlètes ont terminé le parcours valloné de 10 000 m et les autres ont été « ramassés inconscients en cours de route ». Un des athlètes français qui est parvenu à atteindre le stade était si désorienté qu'il a couru directement vers les tribunes, perdant conscience dans les derniers mètres.
Mais Nurmi n'a pas rencontré de telles difficultés. Il a gagné avec plus de 90 secondes d'avance sur son plus proche rival, avant de remporter une nouvelle médaille d'or avec un autre record olympique sur le cross-country par équipes, de 3 000 m, le dimanche.
En 1928, à Amsterdam, Nurmi a enfin réalisé son souhait de courir à nouveau le 10 000 m. Une fois de plus, il a remporté l'or, battant de plus de six secondes le record olympique de son compatriote Ritola - établi dans la course à laquelle il n'avait pas été autorisé à participer quatre ans plus tôt.
Mais cette victoire sera la dernière pour l'incroyable « Finlandais volant ». Sur 5 000 m, il a été battu par son rival Ritola, remportant « seulement » l'argent et sur 3 000 m steeple, il a de nouveau pris la deuxième place, cette fois-ci derrière son compatriote Toivo Loukola.
Après les Jeux Olympiques de 1928, Nurmi avait prévu de participer au marathon des Jeux Olympiques de Los Angeles de 1932. Mais avant d'avoir pu ajouter un nouveau chapitre à sa propre légende, le Finlandais a été interdit de compétition après avoir été accusé par le Comité Olympique Suédois d'être athlète professionnel.
Ce fut la fin d'un parcours olympique incroyable pour le Finlandais qui a battu des records avec une grande facilité.