Paavo Nurmi complète sa moisson record de titres à Amsterdam en 1928
Il y a eu plusieurs "Finlandais Volants" au cours de l'histoire du sport et des Jeux Olympiques, mais le plus grand de tous est Paavo Nurmi, neuf fois champion olympique, ce qui constitue toujours le record en athlétisme aux Jeux. Il remporte sur 10 000 m son neuvième titre le 29 juillet 1928 dans le stade olympique d'Amsterdam au terme d'un énième duel de légende avec son compatriote Ville Ritola.
Ils sont les "Finlandais Volants". Ils ont illuminé les épreuves de demi-fond, fond, cross et steeple des Jeux de Paris 1924. Ils se nomment Ville Ritola et Paavo Nurmi. Alors que Ritola a gagné quatre titres olympiques dans la capitale française, Nurmi a commencé sa moisson d'or plus tôt. Il a remporté le 10 000 m, le cross individuel et celui par équipes des Jeux d'Anvers en 1920. À Paris, il a gagné le 1 500 m, le 5 000 m, à nouveau les cross individuel et par équipes ainsi qui le 3 000 m par équipes. Lors de ces Jeux de 1924, l'encadrement finlandais lui a demandé de ne pas disputer le 10 000 m considérant qu'il était déjà engagé dans un trop grand nombre de compétitions. Un peu plus d'un mois plus tard, le 31 août 1924 chez lui à Kuopio, il a établi en 30:06.2 un record du monde de la distance qui tiendra durant treize ans.
Au moment de disputer ses troisièmes Jeux à Amsterdam 1928, il totalise déjà huit titres olympiques, plus que tout autre athlète. Adulé dans son pays, il est une immense star internationale qui a notamment effectué une tournée triomphale faite de meetings et de courses d’exhibition aux États-Unis durant cinq mois en 1925. Il détient simultanément les records mondiaux du 1 500 m, du mile, du 3 000 m, du 5 000 m et du 10 000 m.
Amsterdam 1928, les derniers feux olympiques de Paavo Nurmi
Nurmi, Ritola et leur grand rival suédois Edvin Wide se retrouvent au départ du 10 000 m dans le stade olympique d'Amsterdam le 29 juillet 1928, au lendemain de la cérémonie d'ouverture des Jeux de la IXe olympiade. Il n'y a pas de séries, les 20 concurrents disputent la finale. Sur les premières foulées, l'Américain Joie Ray imprime la cadence à l'avant. Après 1 500 m, Ville Ritola accélère, suivi par Nurmi et Wide. À mi-course, les trois coureurs ont plus de 100 m d'avance sur le reste du peloton. Au bout de 6,5 km, Wide finit par décrocher et laisse les deux Finlandais Volants s'expliquer pour la victoire. Ritola conserve les commandes mais Nurmi reste sur ses talons. À l'entrée de la ligne droite finale, Paavo Nurmi attaque par l'extérieur. Ritola tente de répondre, mais son rival et coéquipier est un meilleur sprinter, et il passe la ligne d'arrivée détaché avec trois bons mètres d'avance, en 30:18.8. C'est la neuvième médaille d'or de Paavo Nurmi, un record de titres en athlétisme qui ne sera égalé que par l'américain Carl Lewis en 1996.
Mais le plus grand athlète finlandais de tous les temps n'en a pas fini avec les Jeux d'Amsterdam. Le 31 juillet, il dispute sa série du 5 000 m où les quatre premiers se qualifient pour la finale. Il laisse l'Américain Macauley Smith s'imposer devant Edvin Wide et le Britannique Herbert Johnston mais n'autorise pas l'Allemand Otto Kohn lui chiper la quatrième place qualificative. Le 1er août, il s'aligne dans les séries du 3 000 m steeple, et passe près de la catastrophe en accrochant la barrière devant la rivière et en chutant sur le dos, se blessant à la hanche et à la cheville. Mais il se relève et gagne sa course.
Le 3 août, c'est l'heure de la finale du 5 000 m. Quatre ans plus tôt, sur la distance, il avait battu son compatriote Ritola sur la ligne d'arrivée (2/10e de seconde d'avance !). Mais cette fois, dans une réplique inversée du final du 10 000 disputé une semaine plus tôt, c'est Ritola qui se montre le plus fort dans la dernière ligne droite et l'emporte alors que Nurmi doit puiser au plus profond de ses réserves pour préserver la médaille d'argent face au retour d’Edvin Wide, restant ensuite longtemps assis dans l'herbe, terriblement fatigué et souffrant de sa hanche.
Le lendemain, 4 août, c'est la finale du 3 000 m steeple. La stratégie des coureurs finlandais, Nurmi et Ritola compris, est claire : protéger leur leader dans la spécialité, Toivo Loukola. Ainsi, quand ce dernier s'échappe au bout de 2000 m, Nurmi se contente de contrôler le peloton, alors que Ritola ne termine pas la course. Loukola passe la ligne d'arrivée 9 secondes avant Nurmi, établissant un nouveau record du monde en 9:21.8, et Ove Anderson vient compléter un triplé finlandais.
Le n° 1 de l'athlétisme aux Jeux pour toujours ?
Trois médailles d'or et une d’argent à Anvers en 1920, cinq gagnées à Paris en 1924, une en or et deux en argent à Amsterdam en 1928 : douze médailles en tout qui font encore à ce jour de l'immense Paavo Nurmi le n°1 de l'athlétisme aux Jeux Olympiques. Il ne le sait pas encore, mais le 3 000 m steeple dans la capitale des Pays-Bas a été sa dernière course aux Jeux.
Il effectue une nouvelle tournée aux États-Unis en 1929 et ne cache pas franchement son côté lucratif, ni le fait qu'il reçoive des payements pour s'aligner dans des meetings où il chasse les records sur des distances variées. Alors qu'il se prépare pour un dernier défi, disputer le marathon des Jeux de Los Angeles 1932 et réaliser ainsi le même exploit que son idole de jeunesse Hannes Kolehmainen (vainqueur sur les 42,195 km à Anvers en 1920 après avoir été sacré champion olympique du 5 000 m et du 10 000 m à Stockholm en 1912), Paavo Nurmi est suspendu à vie par la Fédération internationale de l'athlétisme amateur (IAAF) au printemps 1932 pour faits de professionnalisme.
L'athlète qui a révolutionné son sport, notamment en initiant de nouvelles méthodes d'entraînement basées sur une rigueur inédite, une adaptation aux distances choisies, précurseur dans l'intensité, la fréquence et les cadences qu'il s'est imposées, met fin à sa carrière sportive en 1934. Il fait ensuite fortune dans l'immobilier, avant d'avoir l'honneur d'être le dernier porteur de la flamme et d'allumer la vasque olympique lors des Jeux d'Helsinki en 1952. Il disparaît à 76 ans le 2 octobre 1973 à Helsinki. Icône sportive et culturelle dans son pays, de nombreuses statues honorent sa mémoire, notamment dans la capitale et dans sa ville natale de Turku. Un bronze de Wäinö Aaltonen le représentant en action est également présent devant le Musée Olympique à Lausanne. La légende de Paavo Nurmi est éternelle.