Nadia Comaneci : Uchimura est le meilleur gymnaste de tous les temps
En réussissant une réception en douceur impeccable, à l’image de son enchaînement de haut vol et à haut risque à la barre fixe, le gymnaste japonais Kohei Uchimura n’a pas seulement remporté sa deuxième médaille d’or olympique consécutive du concours général individuel. De l’avis de Nadia Comaneci, légende de la gymnastique, il est également devenu le plus grand gymnaste masculin de tous les temps.
Il y a quatre ans à Londres 2012, Comaneci avait estimé après avoir assisté à la démonstration victorieuse d’Uchimura qu’il était prématuré de le considérer comme le meilleur. Et ce, bien qu’il eût également réussi un triplé sans précédent de titres mondiaux.
Pourtant, lorsqu’Uchimura a poursuivi sur sa lancée en décrochant les trois titres mondiaux suivants, avant de devenir le premier gymnaste depuis son compatriote Sawao Kato en 1972 à conserver son titre olympique du concours général, la Roumaine a déclaré que le débat était clos.
« Uchimura est le plus grand de tous les temps », a affirmé la petite fée de Montréal, saluée elle-même en son temps comme la plus grande gymnaste féminine de tous les temps. « Regardez ce qu’il a réussi depuis si longtemps. Il est invaincu depuis huit ans (aux Championnats du monde et aux Jeux Olympiques). C’est l’héritage qu’il laisse. »
Dans une compétition de grande qualité, dénuée de chutes et de faux pas pour ce qui concerne des meilleurs, l’Ukrainien Oleg Verniaiev a pris la tête du classement après la troisième rotation et a conservé 0,901 point d’avance sur le crack japonais avant le passage au dernier agrès.
Il aura fallu un enchaînement à couper le souffle pour hisser finalement « Supermura » au-dessus de la meute de ses poursuivants, avec un avantage infime de 0,099 point. « Ce fut la meilleure compétition de gymnastique de l’histoire olympique, a déclaré Comaneci. Cinq ou six gars auraient pu décrocher l’or », a ajouté la Roumaine, qui reste la championne la plus adulée de la discipline, quarante ans après avoir récolté la première note parfaite de 10 aux Jeux Olympiques.
« Uchimura a dû prendre des risques à la barre fixe… Réaliser cela au dernier agrès, avec autant de pression, c’est vraiment exceptionnel. Il a réalisé une réception parfaite. S’il avait bougé ne serait-ce que d’un iota, il aurait perdu l’or, et nous ne serions pas là à débattre pour savoir s’il est le plus grand. »
Jusqu’au triomphe le plus récent d’Uchimura, plusieurs autres gymnastes masculins auraient pu raisonnablement prétendre au titre de plus grand de tous les temps. Kato est ainsi passé à moins d’un point d’un triplé de titres olympiques du concours général en 1976. Au cours de trois Jeux, il a amassé 12 médailles, dont 8 d’or. Il y a eu ensuite le Soviétique Nikolai Andrianov, l’homme qui a privé Kato d’une troisième couronne du concours général avant de devenir le gymnaste le plus récompensé de l’histoire olympique avec 15 médailles dont 7 d’or. Enfin, cerise sur le gâteau, est arrivé Vitaly Scherbo, champion olympique du concours général en 1992, qui a obtenu le total incroyable de six médailles d’or à Barcelone et dont l’entraîneur se nommait… Nikolai Andrianov.
Par contraste, Uchimura n’a récolté que trois médailles d’or olympiques sur les sept qu’il a remportées en trois participations aux Jeux Olympiques. Mais le Japonais compense plus que largement ce déficit chiffré par son style et son élégance. Uchimura, c’est le Roger Federer du monde de la gymnastique. Chaque fois qu’il prend possession d’un agrès, il hypnotise le public par son talent pur et son élégance puissante.
« Sa gymnastique est extraordinaire », conclut Comaneci. « Parfois, lorsque je regarde son exécution, je constate qu’il n’y a absolument aucun défaut, pas le moindre. »