Londres reprend le flambeau d'une Italie meurtrie
La quatrième édition des Jeux Olympiques modernes a été remarquable en ce qu’elle a été organisée en moins de deux ans par la Grande-Bretagne, après que Londres ait repris le flambeau de Rome, ville hôte à l’origine.
La capitale italienne avait été choisie par le CIO qui lui avait accordé les Jeux en 1904. Mais les doutes croissants quant aux préparatifs italiens ont atteint leur paroxysme lorsque la tragédie frappa, le 7 avril 1906. L’éruption du Vésuve qui domine Naples, la ville du sud, a tué plus de 100 personnes et causé de gros dégâts qui ont nécessité des fonds, au titre de l’aide et de la reconstruction. Le gouvernement a donc décidé de réaffecter le budget alloué pour la IVe Olympiade et l’Italie a annoncé son intention de se retirer. Qui allait pouvoir reprendre le flambeau ? Le CIO a donc sollicité l’Association olympique britannique (BOA, British Olympic Association), et le 19 novembre, lors d’une réunion présidée par Lord Desborough – son président et ancien escrimeur talentueux – une résolution fut adoptée : Londres organiserait les Jeux de 1908.
« Comme ce pays est le berceau de tant de variétés de sports athlétiques », a écrit Lord Desborough dans une déclaration publiée huit jours plus tard dans la presse nationale, « il est absolument essentiel que les Jeux Olympiques, s’ils ont lieu en Angleterre, y soient organisés d’une manière digne d’une grande nation sportive. » Et d’ajouter, requête quelque peu inhabituelle : « Le comité accueillerait avec plaisir toute suggestion dont vos lecteurs auraient la gentillesse de nous faire profiter, du fait de leur expérience. »
Il allait s’avérer par la suite que l’aide extérieure ne serait pas vraiment nécessaire. De nombreuses infrastructures existaient déjà, même s’il manquait encore un stade, puisque Lord Desborough et ses collègues avaient déjà entamé des négociations avec les organisateurs de l’exposition franco-britannique, prévue elle aussi en 1908. Ils proposèrent que l’exposition abrite un stade d’athlétisme à proximité de son site, situé à l’ouest de Londres. Un accord fut signé le 14 janvier 1907, accord qui, selon le rapport officiel des Jeux « stipulait que le Comité organisateur de l’Exposition construirait à ses frais les pistes et les bâtiments nécessaires à la tenue de Jeux Olympiques, fournirait tous les équipements, personnels, annonces publicitaires, etc., et qu’il effectuerait une avance de 2 000 livres sterling à l’Association olympique britannique pour couvrir ses dépenses de fonctionnement ». L’Exposition récupérerait en contrepartie un tiers des bénéfices des Jeux, mais cela est resté comme une remarquable démonstration de négociation et d’opportunisme du BOA.
Cela aboutit à la construction en seulement 10 mois du stade olympique dont le premier poteau fut implanté le 31 juillet 1907. Le Stade de White City – qu’on appelait à l’époque le Grand stade – était une grande arène pouvant accueillir 66 288 spectateurs. Il pouvait même en accueillir le double sur ses terrasses. Les Jeux, qui n’avaient pas bénéficié d’autant de publicité qu’espéré à Saint-Louis, allaient être organisés dans une infrastructure qui allait rester debout durant 77 ans, et s’avérer un miracle d’ingénierie.
De nouvelles médailles furent également frappées. Ces médailles (d’or, d’argent et de bronze récompensant les trois premiers d’une épreuve) arboraient sur une face l’effigie de St George, le saint patron de l’Angleterre, et sur l’autre, l’image d’un athlète couronné entouré de deux visages féminins emblématiques. Cette dernière face était censée être reproduite sur les médailles de tous les Jeux Olympiques suivants.