Skieuse junior aux prédispositions évidentes pour le ski de fond et le saut à ski, Tara Geraghty-Moats était la candidate idéale pour se spécialiser en combiné nordique ; problème, cette épreuve n’existait pas à l’époque…
En effet, si le combiné nordique masculin figurait au programme olympique depuis 1924, l’épreuve féminine dut attendre 2016 pour être reconnue comme discipline au niveau international.
“J’ai toujours voulu faire le combiné nordique, depuis toute petite, mais je n’en ai pas eu l’occasion ; à 16 ans, j’ai donc dû choisir entre le ski de fond et le saut à ski”, explique la jeune fille de 26 ans originaire du New Hampshire aux États-Unis. “C’était vraiment dur ; j’ai continué à naviguer entre les deux disciplines jusqu’au jour où, il y a un an et demi, j’ai enfin pu pratiquer le combiné nordique au niveau international”.
Malgré des débuts tardifs, le combiné nordique féminin est en plein essor depuis 2016. D’après Tara Geraghty-Moats, il est en progression de 40 % lors des deux derniers hivers de l’hémisphère nord car les pays, pressentant une nouvelle source de médailles potentielle, commencent à investir dans cette discipline naissante.
Cela s’explique notamment par l’inscription du combiné nordique féminin au programme des Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) d’hiver de 2020 à Lausanne avec des épreuves individuelles masculine et féminine et deux épreuves par équipes mixtes. À noter que la représentation hommes-femmes respecte l’engagement pris par le Comité International Olympique de garantir l’égalité des sexes aux Jeux.
Comme l’explique Tara Geraghty-Moats, athlète modèle de Lausanne 2020, ces JOJ marqueront un tournant décisif en termes d’égalité des sexes sur la scène olympique.
“C’est vraiment un moment historique, il s’agit de la première épreuve olympique d’hiver (junior ou senior) lors de laquelle l’égalité des sexes sera respectée”, explique-t-elle.
“Quand cela arrive, c’est énorme. J’occupe une position assez unique car le combiné nordique féminin connaît un tel essor qu’il y a de très jeunes athlètes qui évoluent sur le circuit des coupes continentales. En fait, j’ai concouru avec certaines des filles qui seront à Lausanne, donc ce sera vraiment un moment très spécial que de les voir écrire une nouvelle page de l’histoire, les encourager et les guider”.
Tara Geraghty-Moats est actuellement le visage emblématique de cette discipline après une saison 2018/2019 époustouflante lors de laquelle elle a remporté la Coupe continentale du combiné nordique féminin après avoir raflé 10 des 11 titres en jeu.
“En fait, je sens tout simplement que j’ai les prédispositions génétiques pour être bonne en termes de morphologie”, ajoute-t-elle. “En y réfléchissant, c’est assez fou de combiner ski nordique et saut à ski. On peut comparer ça au biathlon qui unit deux sports complètement opposés pour en faire une discipline plus intéressante et variée. Le ski de fond requiert de l’endurance et vous utilisez bien davantage les muscles à rotation lente tandis que pour le saut à ski vous voulez de l’explosivité et des muscles à rotation rapide. Pour pouvoir combiner les deux, il faut vraiment privilégier la qualité par rapport à la quantité pour le ski de fond de manière à conserver la vitesse et l’explosivité pour le saut à ski”.
Après s’être essayée au biathlon et avoir participé au circuit de coupe du monde de saut à ski, Tara Geraghty-Moats est unique en son genre dans le monde du combiné nordique féminin, ce qui lui donne un ascendant crucial sur bon nombre de ses rivales. Elle est en outre persuadée que le boom que connaît cette discipline permettra à de nombreuses futures vedettes d’être tout aussi polyvalentes.
“Ce que j’aimerais que les prochaines générations retiennent, c’est qu’une petite fille de huit ans qui veut faire du combiné peut désormais simplement s’entraîner comme skieuse de combiné et rêver de participer aux Jeux Olympiques. C’est ce que je voudrais voir se réaliser, c’est l’objectif ultime”.
Il n’y a pas que le combiné nordique féminin qui fera ses débuts à Lausanne 2020 ; le double féminin en luge, où les duos dévalent des pentes séparément, la victoire revenant à l’équipe ayant le temps combiné le plus rapide, fait également son entrée au programme. Cela fait suite à l’introduction du double masculin à Innsbruck en 2012. Autre nouveau venu, le tournoi par équipes multi-CNO 3x3 en hockey sur glace, vivant et palpitant, qui se mettra en scène aux Jeux avec des épreuves masculines et féminines par équipes.
Les athlètes en lice espèrent bien que Lausanne 2020 servira de rampe de lancement pour faire connaître leur discipline auprès d’un nouveau public et, à terme, obtenir une place aux Jeux Olympiques d’hiver.
“Lausanne 2020 est l’une des étapes que le sport est prêt à franchir. Les Jeux Olympiques d’hiver sont un événement très très spécial et pas quelque chose qui adopte juste un sport de plus. La raison pour laquelle nous respectons autant les JO, c’est leur niveau d’excellence inégalé. Vous ne pouvez donc tout simplement pas y ajouter un sport qui reste peu développé.
“Ceci dit, je pense que le combiné nordique féminin est sur la bonne voie et qu’il y a de bonnes raisons d’espérer qu’il sera inclus”, conclut-elle.