Ester Ledecka : « Intérieurement, je me sens à moitié snowboardeuse, à moitié skieuse »

Double championne olympique à PyeongChang 2018 en snowboard et ski alpin, Ester Ledecka a déjà rempli la moitié de sa mission à Beijing 2022 en étant encore sacrée en snowboard. « Je peux même réaliser un triplé ou un quadruplé », a affirmé la polyvalente Tchèque dans un entretien exclusif à Olympics.com.

7 minPar Alessandro Poggi
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(2022 Getty Images)

Skieuse ou snowboardeuse ? La désormais triple championne olympique Ester Ledecka se considère toujours comme une « double menace ».

« Intérieurement, je me sens à moitié snowboardeuse, à moitié skieuse », confiait-elle en octobre 2021 lors d'une journée média de son équipementier Atomic.

Il y a quatre ans à PyeongChang 2018, la polyvalente Tchèque a écrit l'histoire en devenant la première femme à remporter deux médailles d'or dans deux disciplines différentes aux Jeux Olympiques d'hiver.

Outsider quasi-inconnue, elle a battu toutes les spécialistes de la vitesse pour devenir championne olympique de Super-G en ski alpin. Sept jours plus tard, la Slovaque a assumé son statut de favorite pour gagner le slalom géant parallèle en snowboard.

Aux Jeux Olympiques d'hiver de Beijing 2022, Ester Ledecka s'aligne encore sur les deux disciplines. Cette fois, le snowboard était la première épreuve de son programme (8 février) et elle a à nouveau été sacrée !

Dans trois jours, le 11 février, elle disputera sa première course de ski alpin, le Super-G où elle tentera de défendre son titre.

(GETTY IMAGESMaja Hitij/Getty Images)

L'athlète de 26 ans a avoué que cette planification « pouvait être un avantage ».

« Je veux juste faire les choses simplement. Je suis là pour profiter », a confié Ester Ledecka qui avoue vouloir combiner les deux sports. « Ça dépendra de mes sensations au moment voulu. Si je sens que j'ai envie de faire du snowboard, alors je vais faire du snowboard et rien ne pourra m'arrêter. C'est aussi vrai dans l'autre sens ! »

Ester Ledecka cherche aussi à continuer sa progression en ski. Depuis le début de la saison 2019-20, elle est montée sur six podiums en Coupe du monde avec notamment deux victoires à la clé. Mais elle veut aussi s'améliorer en snowboard après deux saisons où elle n'a pu s'aligner que sur trois courses (deux victoires, une deuxième place).

Visiblement, cela ne l'a pas perturbée puisqu'elle a à nouveau été sacrée championne olympique en parallèle géant de snowboard, le mardi 8 février, à Beijing 2022. Un doublé est-il encore possible à Pékin ? « Je peux même réaliser un triplé ou un quadruplé » clame-t-elle. « Il y a encore de la place pour progresser ».

Ci-dessous, découvrez cette interview exclusive d'Ester Ledecka qui a été légèrement éditée pour plus de clarté.

Une carrière toujours partagée entre le snowboard et le ski alpin

OC : En 2020-21, vous n'avez participé qu'à une course de snowboard avec une victoire en slalom géant parallèle à Cortina d'Ampezzo. Pourquoi ?

EL : Ce n'était pas le plan initial. J'ai eu quelques problèmes avec mon dos. Je ne voulais pas trop en faire alors je suis plutôt restée dans le ski.

Mais j'ai vraiment travaillé pendant tout l'été pour me muscler, ce qui ne m'a pas trop aidé la saison dernière. J'espère que cela va aider à protéger mon dos cet hiver et ma santé de manière générale pour pouvoir passer d'un sport à l'autre sans aucun problème.

OC : Ces dernières saisons, vous avez participé à plus de courses en ski qu'en snowboard. Est-ce que votre attention se concentre plus sur un sport ?

EL : Intérieurement, je me sens toujours à moitié snowboardeuse, à moitié skieuse. En fait, je voulais découvrir ce que j'étais capable de faire dans le classement général de la Coupe du monde de ski alpin. Alors on a décidé que j'allais faire plus de ski pour que je puisse voir si j'ai les capacités d'intégrer le top 10 dans certaines disciplines ou dans le classement général. On ne savait pas si c'était possible et j'ai appris que ça l'est.

Le problème est que si je veux essayer d'y arriver, c'est encore plus difficile de le faire coïncider avec le calendrier des courses de snowboard car elles ont lieu en même temps. Si je veux m'aligner dans les deux sports, je dois renoncer à certaines courses de ski et cela veut dire perdre beaucoup de points pour le classement général.

Par exemple, pour pouvoir viser un globe en ski, je dois vraiment être très forte et participer à un maximum de courses possibles dans les disciplines de vitesse. Cela dépend vraiment de comment les courses seront programmées cette saison.

(2018 Getty Images)

Une progression en ski alpin

OC : En 2020-21, vous avez constamment intégré le top 10 de la Coupe du monde dans les épreuves de vitesse. Qu'est-ce que cela implique de viser les globes ou les médailles dans les grands rendez-vous ?

EL : Je pense que si quelqu'un regarde ma carrière, étape par étape, saison par saison, il verra que je progresse. Ce n'est pas comme si je faisais le yo-yo entre le haut et le bas du classement comme avec cette course à PyeongChang. Si vous regardez la saison en intégralité, cette année-là aussi, j'étais en progression. Je n'étais juste pas au niveau qui aurait pu me permettre d'atteindre le podium plus d'une fois dans la saison.

La saison suivante, j'ai fait un pas en avant. Puis un autre, puis un autre. Je sens que je vais dans la bonne direction, c'est une certitude. Même si je suis désormais une bien meilleure skieuse, avec plus d'expérience, je n'ai toujours pas l'expérience suffisante pour être en mesure de gagner chaque course.

J'essaye d'y arriver et pour ça, j'apprends à chaque entraînement, à chaque virage.

OC : Qu'est-ce que cela fait d'être aux Jeux Olympiques d'hiver en sachant que le doublé réalisé il y a quatre ans et peut-être déjà le plus grand moment de votre carrière ?

EL : Il y a deux choses. Tout d'abord, je pense que je suis encore capable de réaliser un triplé ou un quadruplé. J'ai encore une grande marge de progression. Ensuite, c'est un sentiment incroyable de se présenter aux Jeux Olympiques d'hiver en tant que double championne en titre. C'est quelque chose que personne ne pourra m'enlever.

Je n'ai même pas besoin de finir ma manche, je serai toujours championne olympique, ce qui est cool. Je vais faire de mon mieux pour aller au bout et être la plus rapide pour y arriver. Je vais faire de mon mieux pour en profiter. C'est juste du bonus que j'ai déjà accumulé.

OC : Quelle est votre devise pour cette saison ?

EL : Je ne suis pas quelqu'un qui m'inspire de citation. Toute ma vie, je veux juste essayer de faire ce que j'ai et je veux en profiter au maximum. Si cela arrive cette saison et que je perds chacune de mes courses, mais que je prends du plaisir, ça me suffit.

Ne pas parler des Jeux Olympiques d'hiver

OC : C'est vrai que vous avez interdit votre staff d'utiliser le terme « Jeux Olympiques » avant PyeongChang 2018 ?

EL : Oui... J'ai juste le sentiment que c'est une manière très particulière de voir la saison de cette manière pour ne pas penser chaque jour, "OK, on va aux Jeux Olympiques d'hiver"...

Je vois que pas seulement les athlètes autour de moi, mais aussi beaucoup d'entraîneurs pensent aux JO tous les jours. Je veux juste que ça ne devienne pas comme une "angoisse olympique". Je veux que tout le monde soit concentré sur toutes les autres courses et pas seulement sur celle-là. Cette manière de faire m'aide à donner le meilleur de moi-même à chaque départ, que ça soit aux Jeux Olympiques d'hiver ou sur le circuit FIS.

C'est pour cette raison que je fais des allergies quand quelqu'un de mon staff me dit, "OK, on doit faire ça ou ça pour la préparation des Jeux Olympiques."

OC : Comment est-ce que votre staff fait référence aux Jeux Olympiques d'hiver sans les nommer ?

EL : Je ne sais pas comment le traduire. En tchèque, on les appelait "la course coréenne de l'amitié" (rires). Il y a beaucoup d'amis dans les autres équipes, beaucoup d'amis dans les autres sports alors c'était "la course coréenne de l'amitié". Et cette année, ça sera "la course chinoise de l'amitié".

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