Connolly numéro un pour l'éternité
Le programme d’athlétisme d’Athènes est dominé par les athlètes des États-Unis, qui remportent neuf des 12 épreuves. Le 6 avril 1896, l’un d’entre eux, James Connolly, obtient le privilège de devenir le tout premier champion olympique de l’ère moderne, après sa victoire au triple saut.
Né dans une famille d’immigrants irlandais modestes, Connolly grandit à Boston où il montre rapidement un talent naturel pour divers sports, notamment le football américain et le cyclisme. Après avoir arrêté l’école avant d’entrer au lycée, il va devenir plus tard autodidacte et finit par obtenir en 1895 une bourse d’études en lettres classiques à l’université d’Harvard.
Il garde néanmoins une passion pour le sport, et un an plus tard, il demande une autorisation d’absence à l’université, afin de pouvoir participer aux Jeux d’Athènes. Il essuie néanmoins un refus et décide d’abandonner ses études et de s’embarquer avec la plupart des autres athlètes américains pour Athènes, à bord du Barbarossa, un cargo allemand. À l’époque, ses talents de sprinter le hissent en bonne place parmi les favoris. Toutefois, après avoir débarqué à Naples, il va se faire voler son portefeuille.
La police locale lui demande de rester et de porter plainte contre son voleur. « Ils me retenaient pratiquement par le bras pour que je reste », confiera-t-il plus tard. Mais Connolly est déterminé à aller à Athènes. Laissant tout tomber, il court pour attraper le train pour Brindisi qui était déjà en train de quitter la gare et plonge carrément. « Trois bons copains m’ont agrippé afin que je ne tombe pas à la renverse, et ils m’ont hissé dans le compartiment par la fenêtre, explique-t-il. Je ne le savais pas encore, mais si j’avais raté ce train, je n’aurais pas pu arriver à Athènes à temps pour participer aux épreuves des Jeux que j’avais choisies. »
Le triple saut – ou « hop, step, jump » (un saut à cloche-pied, une enjambée et un saut) comme on l’appelait à l’époque – est la première finale au programme du premier jour d’athlétisme. Connolly, âgé de 27 ans, surclasse tous ses adversaires avec un triple bond à 13,71 m, soit plus d’un mètre plus loin que son plus proche rival. Il devient ainsi le premier champion olympique sacré depuis 385 av. JC. Connolly saute en dernier et lorsque vient son tour, il fait quelques pas le long de la fosse de réception, enlève sa casquette et la jette sur le sable, près d’un mètre après la meilleure marque. Le public n’en revient pas et le regarde attentivement souffler dans ses mains (les journaux du lendemain raconteront qu’il a prononcé une prière), puis essuyer son flottant avant son essai. Il s’élance alors au bout du sautoir, puis effectue les deux premières foulées de son mouvement avant de retomber au-delà de la casquette. Les spectateurs se lèvent alors d’un bond en criant : « C’est un miracle ! »
Dans la foulée, Connolly finira deuxième du saut en hauteur avec un saut à 1,65 m qui lui permet de terminer ex aequo avec son compatriote Robert Garrett, derrière leur coéquipier américain Ellery Clark. Il prendra également la troisième place du saut en longueur (5,84 m), à nouveau derrière Clark.
Après avoir servi dans les rangs du 9e régiment d’infanterie du Massachusetts lors du siège de Santiago en 1898, Connolly reviendra sur la scène olympique deux ans plus tard, lors de la deuxième édition des Jeux à Paris. Malgré une performance meilleure qu’à Athènes, il perdra son titre du triple saut au bénéfice de son partenaire Meyer Prinstein.
Il sera également présent aux Jeux de 1904 à St Louis, mais cette fois en tant qu’envoyé spécial du Boston Globe. Il fera ensuite autorité dans le domaine maritime, passant plusieurs années en mer, et publiera plus de 200 nouvelles et 25 romans.
Il mourra à New York à l’âge de 88 ans.