C’est du cyclisme, oui mais pas que…
Qu’il s’agisse de trouver un coéquipier d’urgence, de prêter du matériel ou tout simplement « d’aimer le vélo », le petit peloton des Jeux Olympiques de la Jeunesse est uni dans un esprit de coopération.
Le Néo-Zélandais Cailen Calkin est sur les rotules. Habituellement coureur de BMX, son corps est entraîné pour des petits démarrages en anaérobie. Il reconnaît lui-même qu’il n’a « vraiment aucune endurance ».
Samedi, il a néanmoins participé à un contre-la-montre en vélo et dimanche, à la course sur route, discipline sportive considérée généralement comme l’une des plus exigeantes. Il n’a cependant bouclé qu’un seul tour sur les neuf à parcourir. Mais il continue de s’accrocher dans cette épreuve cycliste étalée sur cinq jours, qui se termine mercredi. Alors pourquoi est-il présent ? Tout simplement parce que l’épreuve combinée par équipes se dispute par équipes de deux coureurs et que peu avant les Jeux Olympiques de la Jeunesse de Buenos Aires 2018, le partenaire initial de son coéquipier néo-zélandais Max Taylor s’est blessé et a dû déclarer forfait.
« Cela signifiait que je pouvais tirer un trait sur le voyage en Argentine, à moins de trouver très vite un remplaçant », indique Max Taylor, 17 ans. « J’étais dégoûté, mais quelqu’un a alors décidé de demander à Cailen. Il a participé au BMX plus tôt dans la semaine. C’est sa spécialité et il y excelle. Mais il a décidé de tenter aussi le coup, afin que je puisse concourir. C’est vraiment fabuleux qu’il ait fait ça pour moi. Je ne l’oublierai jamais. On ne s’était jamais rencontrés avant, mais on est devenus de super potes. »
Âgé de 16 ans, Cailen Calkin ressent assurément le contrecoup de son beau geste dans les jambes. « Ce que j’ai eu mal, j’ai vraiment souffert », a-t-il expliqué lundi après l’épreuve de cross-country à élimination. « Je n’ai pas un physique fait pour ce genre de vélo. Dans la course sur route, je n’ai tout simplement pas pu m’accrocher au peloton. »
« Et dans le court contre-la-montre, je ne me sentais pas bien au départ et mes jambes ont commencé à me brûler dans la dernière ligne droite. C’était épouvantable. J’étais l’athlète le moins bien préparé, car mon entraîneur ne me permet pas de travailler l’endurance. C’est contradictoire avec les efforts que je dois faire en BMX. C’était malgré tout sympa d’être dans le peloton pendant un petit moment. J’ai été en tête pendant les 50 premiers mètres ! »
Toute plaisanterie mise à part, Cailen Calkin ne regrette pas sa décision. « Je devais le faire », dit-il. « On ne pouvait pas sacrifier Max. Je suis très content d’avoir contribué à sa venue ici, parce que c’est un type génial. Mais je pensais faire du BMX la première semaine, puis me détendre à Buenos Aires la semaine suivante. Je vais sans doute être la personne la plus fatiguée de la planète. D’habitude, je ne dors pas en avion, mais cette fois, je pense que je vais roupiller jusqu’en Nouvelle-Zélande. »
Cet esprit de camaraderie s’est propagé à travers le petit peloton des JOJ. Ainsi, lorsqu’elles ont appris que l’Érythrée, l’Éthiopie et l’Égypte étaient arrivées sans VTT, les autres équipes se sont concertées pour s’assurer qu’elles auraient des vélos.
« L’équipe d’Argentine m’a trouvé un VTT parce que je n’en avais pas », explique l’Éthiopien Zayid Hailu. « Je suis très content et je lui en suis reconnaissant. Tout le monde est si gentil et serviable ici. Ils sont là pour gagner, mais dès qu’ils descendent de vélo, ils constituent une famille. »
L’Érythréen Biniam Hailu, lui, a fait contre mauvaise fortune bon cœur : « Le vélo ne me convient pas du tout. Nous n’y sommes pas habitués, ils ne sont pas à nous et ils ne sont pas bien réglés. Mais au moins, on a pu rouler. Nous apprécions beaucoup l’aide qui nous a été apportée. Ces gens venus du monde entier sont des amis. »
C’est un sentiment partagé dans le peloton. « Le cyclisme est absolument convivial », souligne le Britannique Harriet Harnden. « On apprend à se connaître et c’est vraiment cool, parce que le vélo nous unit. Je n’ai jamais eu l’impression en course que les coureurs étaient très individuels, ou qu’ils ne pensaient qu’à eux. »
« Les médailles ne comptent pas », renchérit le Néo-Zélandais Phoebe Young. « L’important, c’est d’aimer le vélo, d’aimer être sur son vélo. »
Alors, quelle sera la prochaine casquette que coiffera Cailen Calkin, le pilote de BMX devenu marathonien du deux-roues ? « Je vais peut-être essayer le tennis », dit-il.