Plonger dans son imagination profonde pour viser dans le mille. L’idée peut paraître étrange mais elle est pourtant très pertinente. En tir sportif, le mental est roi et l’athlète doit tenter d’en être le maître. Sauf que pour le contrôler, il n'est pas possible de se rendre à la salle de gym ou sur le stand de tir pour s’entraîner. Il faut passer par d’autres types de préparation.
Brian Baudouin, vice-champion d’Europe de tir à 10 m 2019 et médaillé de bronze aux Championnats d'Europe par équipe cette année, a choisi l’hypnose.
« En préparation mentale, il y a beaucoup d’options. La programmation neuro-linguistique (PNL), l’hypnose, la cohérence cardiaque, la visualisation, l’imagerie mentale… » énumère le tireur français de 25 ans.
« L’idée est de trouver celle qui nous convient le mieux et de l’optimiser au maximum. Mais l’hypnose a l’avantage de solliciter la visualisation et l’imagerie mentale. »
« Recréer la gestuelle parfaite »
Il ne s’agit pas de l’hypnose de spectacle lors de laquelle les sujets entrent dans un état inconscient, mais de l’hypnose thérapeutique. Dans le sport, elle se pratique avec un préparateur mental ou un psychologue et l’idée est de plonger dans une relaxation intense, musculairement et mentalement, pour visualiser des situations ou des gestes que l’athlète veut travailler.
« On s’allonge, on ferme les yeux et on suit les paroles de la psychologue », amorce Brian Baudouin, qui a suivi les séances dans le cabinet de Caroline Quenel à Paris.
« Ensuite, on se concentre sur son corps en faisant une sorte de scan corporel de bas en haut : pieds, genoux, mollets, cuisses, basin, dos, bras, épaules, cou et tête. Une fois cette phase terminée, on essaye de visualiser une situation, une compétition en l’occurence, toujours en suivant les paroles de la psychologue. On essaie de recréer la gestuelle parfaite en l'harmonisant avec un fort sentiment de confiance. »
Une méthode qui paie
Le tireur français a débuté une thérapie par l’hypnose en novembre 2018 jusqu’en mars 2019 pour améliorer sa « concentration pendant les finales ». Un mois plus tard, il remportait la médaille d’argent lors des Championnats d’Europe 2019 de tir à la carabine à 10 m, derrière le Russe Vladimir Maslennikov, médaillé de bronze aux Jeux Olympiques de Rio 2016.
« Après ma thérapie, j’ai ressenti une montée en puissance particulière. J’avais la sensation d’être à l’aise dans mon tir et tout se passait comme je l’avais prévu. »
C’est la première fois que j’ai ressenti cette sensation.
Cependant, l’hypnose est peu courante dans le tir. « Je ne connais que deux tireurs ayant fait de l’hypnose, notamment l’Italien Lorenzo Bacci. La veille de la finale [des Championnats d’Europe de tir à 50 m 3 positions 2019], il a réalisé une séance d’hypnose avant de finir quatrième avec sa qualification pour les Jeux Olympiques en poche ».
« À 0,3 mm près »
Brian Baudouin n’est pas encore qualifié pour les Jeux Olympiques de Tokyo 2020. L’année dernière lors de la Coupe du monde 2019 de Pékin en Chine, il avait manqué d’atteindre la finale, où il aurait pu obtenir une qualification pour les Jeux, pour seulement 3 dixièmes de points sur un total de 627,3. Sur 60 coups, tout s’était joué sur un seul tir. « À 0,3 mm près ».
De la précision, il en aura donc besoin lorsque viendra l’occasion de jouer une qualification pour Tokyo 2020. Pour retenter sa chance, lors d’un tournoi qualificatif dont les dates ne sont pas encore connues, il devra patienter quelques mois. Du temps qu’il pourra mettre à profit pour se replonger mentalement dans des situations à haute pression et « pourquoi pas reprendre le travail d’hypnose commencé ».