Bikila s'en va, les pieds nus, vers un triomphe héroïque au marathon
Considéré par la suite comme l’un des plus grands marathoniens de tous les temps, Abebe Bikila ne doit sa présence à Rome 1960 qu’à un coup de pouce de la chance. Non sélectionné à l’origine dans l’équipe éthiopienne, il est en effet appelé à la dernière minute pour remplacer Wami Biratu, blessé lors d’un match de football.
Mais là encore, la carrière athlétique de Bikila ne sera jamais un long fleuve tranquille. Fils d’un berger, il est membre de la garde impériale éthiopienne lorsque son potentiel athlétique est repéré pour la première fois. Très vite, il va montrer de belles promesses à l’entraînement.
Sa sélection en équipe nationale reste cependant une surprise et lorsqu’il arrive à Rome, il ne trouve pas de chaussures à sa taille. Il essaie bien de courir avec une paire pas vraiment adaptée à ses pieds, mais les chaussures ne lui conviennent pas et le jour du marathon, il choisit de courir à nouveau pieds nus, comme il en a l’habitude à l’entraînement.
Son entraîneur lui a dit de surveiller le Marocain Rhadi Ben Abdesselam, censé porter le dossard 26. Mais au lieu de cela, Rhadi se présente avec le dossard 185, ce qui désoriente Bikila qui continue à observer le numéro 26, alors que le Marocain est juste derrière lui.
La course est peu commune dans la mesure où elle s’élance en fin d’après-midi, se termine dans l’obscurité et ne finit pas au stade olympique, mais elle ne manque pas de suspense et d’intensité. Bikila, pieds nus, ne distance en effet Rhadi que dans les 500 derniers mètres, au prix d’un sprint si dévastateur qu’il lui permet de s’imposer avec 25 secondes d’avance et de battre ainsi le record du monde. Lorsqu’on lui demande pourquoi il a décidé de courir pieds nus, il répond : « Je voulais que le monde sache que mon pays, l’Éthiopie, a toujours vaincu avec détermination et héroïsme. »
Cette victoire fait de lui le premier athlète subsaharien à devenir champion olympique et ouvre la voie à une période de domination des grands coureurs de fond africains qui continue à ce jour.
Bikila remportera une deuxième médaille d’or quatre ans plus tard, dans un style époustouflant, peu après s’être remis d’une crise d’appendicite.