Surf – Exclusif, Kauli Vaast raconte les secrets de sa finale olympique : « Et là, l'océan s'est mis à ne plus fonctionner... »

Premier champion olympique de surf français et fraîchement décoré de la Légion d'honneur, Kauli Vaast est revenu sur son exploit en exclusivité pour Olympics.com, délivrant les clés de son succès sur ses terres. 

8 minPar Florian Bouhier
Kauli Vaast of Team France poses for a photo with his medal
(Getty Images)

À ceux qui pensent que l'expérience olympique s'arrête au podium, Kauli Vaast en est le parfait contre-exemple.

Après son titre olympique décroché chez lui à Tahiti, le jeune surfeur de 22 ans n'a pas chômé, comme le trahissent ses petits yeux perçants en ce doux après-midi de septembre à Paris.

« C'est un marathon depuis la finale, mais j’ai vécu des expériences inoubliables qui ont marqué ma vie à jamais. La cérémonie de clôture, l’ambiance du Club France, surfer sur la Seine, c'est fou. Et samedi dernier, la Parade des Champions avec la remise de médaille et la Légion d'honneur, c'était incroyable. »

Si la Ville Lumière commence progressivement à tourner la page des Jeux Olympiques de Paris 2024, Kauli Vaast reste lui sur son petit nuage, n'arrivant pas encore à réaliser qu'il est champion olympique de surf.

« Je mettrais du temps à savoir pourquoi j'ai gagné cette médaille et ce qu'elle veut vraiment dire. Mais pour l'instant, je ne m'en rends pas compte, je suis encore aux JO, je suis encore à la cérémonie de clôture, je suis encore à la vague. C'est magnifique. Tu n'as pas envie de lâcher tout ça. »

Énergie spirituelle, sessions de pêche et préparation mentale, Kauli Vaast s'est confié à Olympics.com sur « la plus belle compétition de ma vie. »

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Teahupo’o était avec lui

« C'était chaud deux ou trois fois, mais c'est passé jusqu'en finale. »

La suite ?

L'éclat doré de sa médaille posée délicatement près de lui et son sourire sont là pour en témoigner, elle fut triomphale. Une finale maîtrisée dès les premiers instants, avec deux tubes d'exception réussis coup sur coup. Tout sauf un hasard.

« Cette première vague, mon 9,50, ça faisait longtemps que je n'avais pas commencé de cette façon », se rappelle-t-il, quelques jours avant son retour à la compétition lors du Quiksilver festival dans les Landes, du 21 au 29 septembre. « J'étais en totale confiance et je me souviens de toute la vague où je me disais 'ça va sortir, ça va sortir, si je sors c'est un gros score' : C'est le plus beau moment de la finale pour moi. »

À la suite de ce magnifique tube, Kauli Vaast va enfoncer le clou avec un très bon 8,17, laissant son adversaire Jake Robinson, dos au mur. Puis, plus rien. Le calme, la quiétude après un début en fanfare. Aucune vague exploitable pour son concurrent au titre olympique, les dieux des océans étaient du côté du Français.

« Je me suis retourné, je me suis dit 'Wow, je suis à la maison, je viens de faire deux gros scores et ça va aller de mon côté, c'est impossible que ça change' », raconte Kauli Vaast, les souvenirs encore vivaces imprimés dans sa mémoire.

« Il n'y a rien eu jusqu'à la fin, mais le stress était très présent. Parce que tu es en finale olympique, tu es à 20 minutes de pouvoir réaliser ton rêve, et là, l'océan s'est mis à ne plus fonctionner, il s'est éteint et c'est comme ça. »

Un coup de pouce du destin en faveur du surfeur local ? Difficile de ne pas y croire.

Ces bonnes vibrations, Kauli Vaast les a senties à chaque fois qu’il a affronté la vague de Teahupo’o. Cette force sacrée, appelée Mana, l'a aidé à ne jamais perdre confiance, même lors de moments plus délicats avant son moment de gloire du 6 août 2024.

« Le Mana, c'est l'énergie spirituelle propre à notre culture, c'est l'énergie que tu perçois, que tu reçois et que tu partages également. Pour moi, c’est l'amour pour la chose que tu ressens, le bien-être, les vibrations. »

« Lors de cette compétition, j'ai eu un Mana avec Teahupo'o parce qu'il y a eu beaucoup de signes comme quoi il pouvait y avoir un gros truc à la fin, que c'était écrit. Quand tu regardes le bilan, tu peux te dire que le Mana a vraiment été avec moi. »

« Pendant vingt minutes, pour que l'océan soit plat en finale olympique après un 9 et un 8, c'est très rare. Déjà dix minutes de plat… mais là, il y avait vraiment vingt minutes. »

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La préparation mentale ? « Je me disais que c'était une perte de temps, jusqu'au moment où... »

En remportant le titre olympique sur sa vague « préférée », celle qu'il connaît par cœur depuis son enfance, Kauli Vaast a ravi tout un peuple, toute une communauté qui rêvait d'une victoire à domicile d'un surfeur tahitien.

« On était deux, avec Vahine (Fierro), c'était tout simplement incroyable », assure le natif de Vairao, dans la commune de Taiarapu-Ouest, évoquant sa compatriote éliminée au troisième tour après une défaite contre la future médaillée de bronze Johanne Defay. « Chaque jour, il y avait de plus en plus de monde pour nous soutenir. Au fur et à mesure, ils étaient tous là, à hurler, à me féliciter, à m'encourager. Ça fait plaisir de voir autant de personnes heureuses et avoir des paillettes dans les yeux en regardant ce que tu as accompli. »

Mais qui dit soutien populaire, dit également pression de réussir devant ses proches. Un stress dont s'était préparé Kauli Vaast depuis deux ans avec une préparatrice mentale.

« Je me disais que c'était une perte de temps, jusqu'au moment où, en fait, pas du tout. Tu es obligé de te recentrer et de comprendre, c'est primordial. »

Conscient de l'importance de ce travail de fond, malgré son jeune âge, Kauli Vaast travaille donc son mental pour faire du stress une chose positive et réussir à transformer ce soutien populaire en une force.

« J'ai essayé de donner le maximum dans ma préparation mentale. Travailler sur ça, c'était compliqué, surtout de gérer le stress. Beaucoup de stress pour ne pas décevoir la famille, la population, tout le monde. Il fallait visualiser, il fallait exactement savoir ce qui allait se passer. »

Kauli Vaast, le 17 septembre 2024 à Paris en France.

(IOC/Florian Bouhier)

« Le soutien du public était hallucinant ! »

Sur sa planche, berçé par les vagues qui ont rythmé sa vie, Kauli Vaast pouvait sentir les pulsations du public, qui le soutenait depuis le rivage : « Le soutien du public était hallucinant, on l'entendait carrément dans les bateaux. C'est la plus belle des représentations de l'amour que le peuple a pour un athlète de chez nous. »

C'est à quatre ans que Kauli Vaast s'est essayé pour la première fois au surf, en compagnie de son père, dans les eaux polynésiennes.

« J'ai eu la chance d'être né et grandir là-bas, donc tous les jours, j'allais à l'eau au moins une fois. Il fallait que je teste mes limites et c'est comme ça que j'ai progressé. J’ai commencé à l'âge de quatre ans avec mon père qui me poussait. J'avais encore les petits brassards sur le longboard… »

Presque vingt ans plus tard, cet océan l'a sacré Roi de Teahupo’o, cette vague si « parfaite », que Kauli Vaast ne se lasse pas de la raconter.

« Elle offre un paysage unique. Pouvoir voir autant la beauté de la nature, les montagnes, la mer, l'eau turquoise, le récif, c'est trop beau. Cette vague est parfaite aussi dans sa configuration, dans ce qu'elle offre comme manœuvre. Le tube, c'est la manœuvre la plus prisée par les surfeurs, celle que tout le monde veut faire. Quand tu te fais recouvrir par la vague, que tu es à l'intérieur du rouleau et le but est de rester le plus longtemps et sortir. Teahupo’o, c'est juste parfait pour ça. »

Un mois plus tard, son père Gaël toujours à ses côtés, Kauli Vaast recevait la Légion d'honneur sur l'avenue des Champs-Élysées. Cette fois-ci, une autre vague a fait son apparition. Celle de l'amour des supporters français qui n'avaient pas eu la chance de le supporter à Tahiti.

« La remise des médailles de la Légion d’honneur m’a marqué. Sinon, à Tahiti, entre les épreuves, je me souviens, on regardait Léon Marchand, Teddy Riner… ça m'a poussé aussi à me dire qu'eux, ils ont eu la médaille d'or, donc moi aussi, je peux le faire. »

Avant de révéler son ultime secret à la toute fin de cet entretien avec Olympics.com, d'un œil malicieux.

« Je pouvais aller pêcher entre-temps, c'était absolument magique. J'ai eu de la chance que ce soit à la maison. »

Et cette maison a eu de la chance d'avoir un surfeur comme Kauli Vaast.

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