Paris 2024 : la folle histoire derrière les médailles olympiques et paralympiques

Par Marion Theissen
7 min|
Sketches of Olympic and Paralympic Games Paris 2024 medals
Photo de Thomas Deschamps

Les athlètes qui disputeront les Jeux de Paris 2024 ont désormais une raison supplémentaire de partir à la quête d’une médaille : en plus de ramener l’or, l’argent ou le bronze chez eux, ils emporteront aussi une petite partie de Paris, matérialisée par un morceau de Tour Eiffel intégré dans chaque médaille. Découvrez l’histoire derrière cette création inédite.

Tout a commencé par un brief un peu particulier. Une idée créative pour donner encore plus de sens à un objet classique et pourtant incontournable des Jeux Olympiques et Paralympiques.

Comment rendre la médaille encore plus exceptionnelle ? Comment sortir de l’historique conventionnel d’un élément aussi traditionnel que les médailles ? En y ajoutant la France à l’intérieur - littéralement.

La maison Chaumet a donc mis en œuvre son expertise mondialement reconnue pour prendre ce concept et l’emmener dans un autre univers, afin de le magnifier, de le sublimer et de donner vie à une idée aussi insensée que différente. Cette fois-ci, ce n’était pas un diamant que les designers devaient travailler, ce n’était pas un rubis non plus, mais une matière qui a vieilli. Cependant, ils ont décidé de le penser et le travailler comme tel : la Tour Eiffel au cœur d’un bijou d’exception.

Chaque médaille fabriquée pour cette édition de Paris 2024, révélée ce jeudi 8 février, contient un morceau de fer d’origine de la Tour Eiffel, avec un certificat d’authenticité à l’appui.

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L'hexagone, le rayonnement et le sertissage comme symboles forts des médailles de Paris 2024

Une fois le brief exposé et la décision de traiter ce vieux métal comme une pierre précieuse prise, les experts joailliers étaient libres de l’interpréter à leur manière.

« On est allés chercher l’inspiration dans notre patrimoine », explique Clémentine Massonnat, directrice de création à Chaumet lors d’une visite de l’atelier de confection à laquelle Olympics.com a participé.

« Nous avons consulté le service des archives autour de deux idées principales qui étaient de traiter ce morceau de Tour Eiffel en forme d’hexagone, pour représenter la France et de le placer au centre de la médaille et au centre d’un travail de rayonnement et de facettage d’or. »

Consulter les archives est une pratique courante dans ce cadre de commandes très spéciales, afin de trouver une partie d’inspiration dans l’histoire de la France. L’idée de rayonnement est venue de l’une des spécialités de la maison : les bijoux de tête.

« Les diadèmes induisent l’idée de rayonnement personnel », apprend-t-on pendant cette présentation. « Ça fait rayonner la personne qui le porte et il y a un parallèle très intéressant avec les médailles. Elles sont aussi un objet qui fait rayonner l’exploit de la personne qui l’accompli. »

Habitués à travailler les pierres précieuses, les designers de la maison Chaumet se sont donc ensuite heurtés à la difficulté de travailler une nouvelle matière qui a vieilli, qui a vécu : le fer de la Tour Eiffel.

« On a d’abord réalisé des croquis autour de ce concept d’hexagone au centre et de rayonnement autour », reprend Massonnat. « Le rayonnement, c’était pour le rayonnement de la France pendant les Jeux, le rayonnement des athlètes, mais c’était aussi pour donner vie à cet objet statique, comme un bijou. Lorsque la lumière vient taper dessus, la médaille prend vie. »

Un hexagone qui rayonne, sans oublier une petite touche d’originalité supplémentaire avec un sertissage « griffe », traditionnellement utilisé pour sertir les pièces de haute-joaillerie et qui rappelle les rivets de la Tour Eiffel.

Le symbole est trouvé, les croquis validés. Avec une petite particularité : « Pourquoi ce rayonnement est-il totalement irrégulier ? » interroge Benoît Verhulle, le chef des ateliers. « C’est justement pour que la lumière joue de façon non précise et que cela mette encore plus l’athlète en valeur. Dans le brief initial, il y avait surtout Paris et il fallait vraiment que par cette médaille, on ressente à première vue que c’était Paris. Et pour nous, c’est la Ville lumière donc c’était logique aussi que le rayonnement soit sur cette face de la médaille », conclut-il.

C’est donc par l’application de ces trois éléments que le projet a été respecté et validé : un hexagone de Tour Eiffel serti au centre d’une médaille parsemée de rayons. Le tour était joué, ou presque.

D'autres particularités ont ensuite été pensées et peaufinées. Après tout, un bijou de qualité se doit d’être considéré sous toutes les formes.

Médailles de Paris 2024 : des détails qui font toute la différence

« On l’a réfléchi comme un bijou », martèle une nouvelle fois Benoît Verhulle. « Généralement on a une petite bélière qui sort de la médaille, où le ruban vient passer dedans. Là, on a fait un autre système. » Une manière novatrice d’intégrer le ruban à l’intérieur même de la médaille, parce que pour un objet pareil, rien ne peut être laissé au hasard.

Comme pour chaque édition, la renaissance des Jeux en Grèce est racontée sur l’autre face de la médaille olympique. Figure traditionnelle des médailles, la déesse de la victoire Niké est représentée au premier plan, devant le stade Panathénaïque, là où les Jeux Olympiques ont connu leur renouveau en 1896. Mais l’édition 2024 a eu le droit à sa propre exception : l’ajout d’une Tour Eiffel de l’autre côté du stade.

Sur la face des médailles paralympiques, par volonté d’accessibilité, le nom de l’édition a été inscrit en braille, autour d’une Tour Eiffel avec une vue un peu particulière : « C’est un point de vue moins commun mais qui en même temps est très graphique et reconnaissable », explique Massonnat. Comme la Tour Eiffel était vraiment au cœur de ce projet, sur cette face-là, on a décidé de la remettre, mais avec une vue du dessous, en élévation, en regardant vers le ciel. »

Encore deux petits clins d’œil à l’héritage tricolore puisque Louis Braille, l’inventeur de ce système d’écriture dédiés aux personnes souffrant de céssité, était français. De la même façon que cette face historique de la médaille olympique avec la Tour Eiffel peut être considérée comme une allusion aux Jeux de Paris mais aussi à Pierre de Coubertin. D'autres évocations qui tissent des liens encore plus forts entre la France et les médailles qui seront décernées aux futurs champions.

Autre anecdote qui rend un peu plus légitime encore le choix de la maison Chaumet dans la création de ces objets uniques : Gustave Eiffel a toujours été un client très fidèle. Dans un registre comptable très ancien, on peut y voir une commande à son nom : « Un achat fait par Gustave Eiffel en 1890 », explique-t-on à Chaumet.

« L’exposition universelle de 1889 qui a présenté la Tour Eiffel au monde entier vient de se terminer, Gustave Eiffel est au summum de sa notoriété et il a aussi eu le bonheur de marier sa fille Valentine à ce moment-là. Pour l’occasion, il pousse la porte de la boutique Chaumet et vient acheter un collier de perles pour sa fille. »

Ses enfants seront ensuite clients pendant de nombreuses années et aujourd’hui, l’œuvre pour laquelle il est devenu mondialement connu est érigée au cœur des médailles qui représenteront Paris 2024.

Ultime relais dans cette étape capitale de la préparation des médailles : la monnaie de Paris, un établissement français habituellement chargé de la production de la monnaie nationale. Après validation de l’esthétique par Paris 2024, ils sont désormais chargés de reproduire les 5 084 médailles qui seront attribués aux différents athlètes sur les podiums des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.