Marcel Hirscher, Mikaela Shiffrin, la Suisse et la Suède en vedette à Yongpyong!

Les épreuves techniques de ski alpin ont notamment consacré l'Autrichien Marcel Hirscher, le meilleur skieur de la décennie 2010 qui est enfin devenu champion olympique, et doublement, dans le combiné alpin et en slalom géant. Mikaela Shiffrin a ajouté un 2e titre à sa collection, le géant après le slalom en 2014 et a pris l'argent du combiné derrière la Suissesse Michelle Gisin. Les slaloms sont revenus aux Suédois, en forme de couronnements d'illustres carrières pour Frida Frida Hansdotter et pour Andre Myhrer, et la formation suisse s'est imposée dans la nouvelle épreuve par équipes mixtes.

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Marcel Hirscher, Mikaela Shiffrin, la Suisse et la Suède en vedette à Yongpyong!
(2018 Getty Images)

Super favori du slalom, attendu au sommet en géant, Marcel Hirscher répare finalement une anomalie dès sa première course à PyeongChang le 13 février. Excellent 12e de la descente à Jeongseon, le champion autrichien découpe littéralement la manche de slalom malgré les fortes bourrasques, pour s'imposer devant deux Français, Alexis Pinturault à  23/100e et Victor Muffat-Jeandet à 1:02.

« C’est un rêve qui devient réalité pour moi" s’exclame le nouveau champion olympique. "C’est une grosse surprise. J’ai réussi la meilleure descente de ma carrière. Alexis était le grand favori et ça a été super serré. Je suis vraiment super heureux d’avoir obtenu cette médaille. En Autriche, tout le monde attendait ça. Et tout le monde me disait :  "Belle carrière, mais il manque encore l'or olympique!'. C'est donc parfait, c'est incroyable."

Victor Muffat-Jeandet, vainqueur d’un combiné à Wengen au début du mois de janvier n’a pas très bien réussi sa descente sur un parcours pourtant raccourci en raison des fortes rafales de vent qui balayaient le sommet de la piste. 29e, il s’élance en deuxième position dans la manche de slalom. Avec un style rageur, il prend la tête pour de longues minutes. Il reste longtemps en tête, et n'est finalement dépassé que par l'ogre autrichien qui effectue ne performance éblouissante sur une piste excessivement glacée et balayée par le vent, puis par son compatriote Alexis Pinturault, le meilleur spécialiste du combiné de ces dernière années.  

Mikaela Shiffrin en mode géante

Mikaela Shiffrin a presque 23 ans, un visage toujours enfantin, mais c’est une véritable ogresse, jamais rassasiée de victoires. Médaillée d’or en slalom lors des jeux de Sotchi alors qu’elle n’avait que 18 ans, elle débute idéalement son aventure coréenne en remportant le slalom géant, initialement programmé le 13 février à Yongpyong, mais reporté à ce jeudi 15 en raison du vent violent.

3Le géant est une discipline avec laquelle j’ai une relation amour-haine", expliqué-t-elle après sa victoire. Cela rend ce succès encore plus savoureux. J’ai toujours du mal à trouver le bon rythme dans cette discipline. C’est pour cela qu’il faut que je m’entraîne beaucoup. Il faut que je trouve le bon tempo pour être agressive.3

Dans des conditions idylliques sur une piste assez variée mais très raide dans sa partie médiane, la "Mozart du ski" fait parler son évidente supériorité technique sur ses rivales en délivrant deux manches de très haut niveau. Un petit peu plus crispée sur le premier tracé sur lequel elle finit deuxième derrière l’Italienne Manuela Mölgg, partie avec le dossard 1, elle se libère et se délivre telle la reine des neiges qu’elle est depuis bien longtemps, lors de la deuxième manche.

Sur une piste assez dégradée par le passage des 28 premières concurrentes, Shiffrin démontre sa capacité à rester équilibrée et à faire glisser les skis avec souplesse et fluidité pour prendre la tête avec 39 centièmes d’avance sur la Norvégienne Ragnhild Mowinckel, auteure de deux manches solides et qui va terminer médaillée d'argent. Manuela Mölgg, dernière partante, ne parvient pas à signer une deuxième manche propre. 23e temps sur ce tracé, elle recule de la première à la huitième place.

L’Italienne Federica Brignone complète le podium à 46/100e mais pourra se mordre les doigts des multiples petites erreurs commises dans le mur final de cette piste assez exigeante. Les deux autres reines de la spécialité  sont un peu décevantes. La Française Tessa Worley prend la 14eme place de la première manche, hypothéquant ses chances de finir sur le podium. Malgré le deuxième temps de la deuxième manche derrière le Suédoise Estelle Alphand, elle se contente de la huitième place. Alors que Viktoria Rebensburg, la championne olympique 2010, vient mourir à une très frustrante quatrième place après voir terminé 8e sur le premier tracé.

La consécration pour Frida Hansdotter

Souvent abonnée aux deuxièmes places, la Suédoise Frida Hansdotter obtient la consécration à l’âge de 32 ans en se parant de l’or olympique. C’est elle qui arrache la médaille d’or du slalom féminin le 16 février sur la très belle pente du stade de Yongpyong, avec cinq petits centièmes d’avance sur la Suissesse Wendy Holdener, victorieuse de la première manche et la toute jeune Autrichienne Katharina Gallhuber, 20 ans, qui obtient le bronze sans avoir jamais terminé sur le podium d’une course de coupe du monde.

Frida Hansdotter est une opportuniste. En 2016, elle avait réussi à conquérir le petit globe du slalom en profitant de l’absence temporaire de Mikaela Shiffrin, la reine incontestable de la discipline. Cette fois, sa rivale, fatiguée, n’a pas pu défendre pleinement ses chances au lendemain de sa victoire en géant. la Suédoise de 32 ans s’offre le plus beau succès de sa longue carrière en arrachant de haute lutte la médaille d’or du slalom;

"J’ai été surprise aujourd’hui parce que je n’étais pas très nerveuse" a explique la Suédoise. J’avais envie de profiter de cette journée et j’avais le sourire. J'avais simplement envie de skier aussi vite que possible."

Reporté de deux jours en raison du vent violent, le slalom féminin offre un très beau spectacle sur la pente assez raide de Yongpyong sous un soleil radieux et une température avoisinant les 0°. Parti avec le dossard n°1 en première manche, la Suissesse Wendy Holdener, deuxième des championnats du monde l’an passé, en profite pour prendre la tête et n’en partira pas. Deux Suédoises sont en embuscade : Frida Hansdotter, 2e à 20 centièmes et Anna Swenn Larsson, 3e à 40 centièmes. Mais la première sensation est la quatrième place de l’immense favorite Mikaela Shiffrin qui skie beaucoup plus durement que d’habitude et se retrouve reléguée à 48 centièmes de la tête

La deuxième manche est tout aussi intense. C’est d’abord la petite Autrichienne Katharina Gallhuber qui fait sensation en s’installant en tête. Neuvième de la première manche, elle signe le meilleur temps sur le deuxième tracé en 48.83. On apprend sur NBC que Mikaela Shiffrin, souffre d’un virus et qu’elle a vomi juste avant de prendre le départ. Sa petite forme se confirme en deuxième manche où son ski n’a pas la puissance habituelle. Elle vient mourir à huit centièmes de Gallhuber et ses espoirs de doublé s’envolent.

Mais ensuite, Frida Hansdotter s’élance avec une rage inhabituelle. Elle qui a collectionné les deuxièmes places tout au long de sa carrière prend tous les risques avec une maîtrise technique éblouissante. Elle prend le commandement avec 27 centièmes d’avance. La dernière à s’élancer est la Suissesse Wendy Holdener, championne du monde du combiné alpin, l’année dernière, et deuxième en slalom. Sa manche est plus que solide, elle fait jeu égal avec Hansdotter à tous les intermédiaires mais elle allume finalement du rouge dans l'aire d'arrivée, à cinq petits centièmes de la médaille d’or.

Victoire "géante" de Marcel Hirscher et 2e titre à PyeongChang  

En dépit de sa taille modeste (1,73 m), Marcel Hirscher est en train de s’affirmer comme un des plus grands champions de sa discipline. Alors qu’il n’avait jamais remporté de titre olympique avant d’arriver à PyeongChang, il s’offre une deuxième médaille d’or en écrasant la concurrence. Le Norvégien Henrik Kristoffersen, deuxième, est à 1.27 et le Français Alexis Pinturault, prend la troisième place à 1.31 du vainqueur.

On pouvait imaginer que Marcel Hirscher, le meilleur skieur actuel, était arrivé à PyeongChang avec un certain poids sur les épaules, n’ayant jamais gagné de médaille d’or olympique. Ni à Vancouver (4e en géant) , ni à Sotchi (argent en slalom), il n’avait réussi à s’imposer. Mais en Corée, il a réparé cette anomalie dès le combiné alpin, et ce dimanche 18 février, à Yongpyong, il skie totalement libéré pour surpasser ses adversaires, lors d’un géant disputé sous un beau soleil et une température assez clémente. "La médaille d’or en combiné était une grande surprise", indique-t-il. "Aujourd’hui, tout le monde et particulièrement les médias espéraient et attendaient une autre médaille d’or. Il ne faut jamais trop anticiper dans le sport professionnel. Mais aujourd’hui ma confiance et ma vitesse étaient très grandes".

Parti avec le dossard 5 peu après 10 heures, le skieur d’Annaberg met tout le monde d’accord dès le premier acte. Dans son style tout de punch et de souplesse, il se montre aussi à l’aise dans la partie plate du début que dans le mur final où il bondit de porte en porte comme un félin. Le Français Alexis Pinturault, parti avec le dossard n°1 est deuxième à 63 centièmes alors que la troisième place est occupée par le surprenant Norvégien Leif Christian Nestvold-Haugen à 66 centièmes.

Mais c’est dans l’après-midi que tout se dénoue lors d’une deuxième manche dessinée par l’entraîneur des Français, Fred Perrin. C’est d’abord Henrik Kristoffersen, 3eme du slalom de Sotchi, qui frappe un grand coup. Dixième seulement sur le premier tracé, sa seconde manche est impressionnante de fluidité et de vitesse. Dans le mur final, il joue les équilibristes pour signer le meilleur chrono et entamer une remontée fantastique jusqu’à la deuxième place. Personne ne parvient à l’égaler. Le Français Alexis Pinturault, deuxième de la première manche, prend tous les risques, il se fait alléger sur le haut de la piste mais ne désarme pas. Tout comme à Sotchi, il y a quatre ans, il est médaillé de bronze dans cette discipline mais peut avoir quelques regrets. Il manque l’argent pour quatre petits centièmes.

Mais le trentième à s’élancer est l’ogre Hirscher. Et même s’il possède 1.31 d’avance sur Kristoffersen, il est totalement à l’attaque et parvient encore à augmenter l’écart avec le Norvégien.  Sur le mur final, il perd quelques centièmes mais s’impose finalement avec un énorme écart d’1.27 au total des deux manches. Il est tout simplement le meilleur et il l’a prouvé une nouvelle fois.

Andre Myhrer en opportuniste dans le slalom masculin

Quel scénario ! Aucun pronostiqueur n’aurait pu imaginer un double effondrement des grands favoris Marcel Hirscher et Henrik Kristoffersen. C’est pourtant ce qui se passe sur la difficile piste de YongPyong le 22 février.

En route pour une troisième médaille d’or à PyeongChang 2018, Marcel Hirscher s’élance peu après 10 heures sous un beau soleil. Mais très vite, son rythme est un peu haché et après deux erreurs successives qui le font partir en arrière, il se retrouve éjecté du parcours. Dans les gradins s’est un cri de stupéfaction. L’Autrichien ne parviendra pas à égaler Toni Sailer et Jean-Claude Killy, triples médaillés d’or olympiques dans cette discipline à Cortina et à Grenoble.

Avec une première manche gagnée avec 21 centièmes d’avance sur Andre Myhrer, Henrik Kristoffersen semble bien parti pour s’offrir une première médaille d’or aux Jeux après le bronze du slalom à Sotchi et l’argent du géant à PyeongChang. Sur le deuxième tracé, très technique avec des conditions un peu moins ensoleillées et beaucoup plus de vent que le matin, tout le monde prend des risques.

Michael Matt, l’Autrichien, le frère du champion olympique de Sotchi, douzième de la première manche est parfait d’attaque et de fluidité, il signe le meilleur temps de la manche en 47.66. Il est devancé quelques instants plus tard par le géant Ramon Zenhäusern, 2 mètres, qui marque les esprits en signant un chrono qui l’installe en tête un long moment. C’est finalement le Suédois Andre Myhrer qui va lui prendre la première place avec la régularité qui le caractérise. A 35 ans, même s’il a gagné le classement de la coupe du monde de la spécialité en 2012, il n’a jamais particulièrement brillé lors des grands championnats. Une seule médaille de bronze obtenue à Vancouver est un résumé un peu succinct pour un tel talent et une telle longévité.

Henrik Kristoffersen s’élance alors mais comme Hirscher, on le sent en surrégime et très vite il part à la faute. Incrédule, il hésitera même à remonter mais c’est trop tard. Le champion olympique est Suédois et non Norvégien. Zenhäusern et Matt encadrent Myhrer sur le podium.  

Au bas de la piste, le roi de Suède Charles XVI de Suède n’en rate pas une miette. Il sera un des premiers à féliciter le nouveau héros qui succède à Ingemar Stenmark, le dernier Suédois sacré en ski alpin à Lake Placid en 1980. Du haut de ses 35 ans, Andre Myhrer devient le slalomeur le plus âgé à remporter l’or olympique après les 34 ans de Mario Matt, il y a quatre ans. "Je pense que l’expérience a joué en ma faveur. Ce sont mes quatrième Jeux et j’ai une certaine routine, a-t-il expliqué. Aujourd’hui, j’ai essayé de prendre du plaisir et de laisser mon cœur sur la piste."

Les sœurs Dominique et Michelle Gisin forment une famille en or

Après la médaille d’or obtenue en descente par Dominique Gisin lors des Jeux de Sotchi en 2014, c’est sa petite sœur Michelle qui parvient à monter sur la plus haute marche du podium du combiné alpin à  Jeongseon le 22 février, après une descente et un slalom de toutes beautés. Les stars américaines sont battues : Mikaela Shiffrin prend la deuxième place à près d’une seconde de la Suissesse et Lindsey Vonn sort du tracé en slalom après avoir signé le meilleur chrono de la descente. La médaille de bronze est pour la championne du monde de Saint Moritz 2017, l’autre Suissesse Wendy Holdener.

Sous les yeux de sa sœur Dominique, qui avait partagé le titre de la descente avec Tina Maze il y a quatre ans, Michelle Gisin réussit le cocktail parfait entre vitesse et technique pour s’offrir la victoire. Alors qu’elle avait débuté sa carrière en coupe du monde comme une pure slalomeuse, elle a démontré depuis la saison dernière qu’elle avait de très bonnes aptitudes avec des longs skis au pieds. Deux fois sur le podium cette saison lors de la descente de Lake Louise et du Super G de Garmisch, elle a fait jeu égal avec les meilleures spécialistes sur la descente matinale ne s’inclinant que face aux deux médaillées de la veille : Lindsey Vonn (1e en 1.39.37) et Raghnild Mohwinckel (2e en 1.40.11).

Dans le slalom, Wendy Holdener réussit une belle remontée depuis son 10e chrono  en descente,  mais s'arrête à la 3e place. Mikaela Shiffrin, la meilleure slalomeuse du monde, la dépasse grâce une manche solide sans affoler le chronomètre. Juste après c’est au tour de Michelle Gisin de s’élancer. La skieuse d’Engelberg skie avec beaucoup de sécurité, prend de la hauteur par rapport aux portes et reprend même du temps à Shiffrin sur certains passages. En 40.76, elle signe le 4eme temps du slalom et s'assure le titre avec une avance de 97/100e au total sur Shiffrin.

"J’étais beaucoup plus nerveuse hier pour la descente" explique la nouvelle championne olympique. J’avais tout ce calme en moi comme si j’avais senti que c’était mon jour. J’ai donné tout ce que j’avais. J’ai fait de mon mieux de tout mon cœur et je suis tellement heureuse que cela ait fonctionné. Le rôle de ma sœur a été très important. Elle est restée avec moi tout l’après-midi et toute la soirée, répondant aux messages. Elle m’a mise au lit, elle m’a retiré le téléphone et elle a organisé les soins." Il faut préciser que Michelle était tombée assez lourdement sur la tête dans l’aire d’arrivée de la descente la veille

La Suisse ouvre le palmarès du "team event"

Pour sa première apparition au programme des Jeux Olympiques d’hiver, l’épreuve par équipes mixte qui clôture le programme du ski alpin le 24 février à Yongpyong voit la Suisse s’imposer brillamment en finale face à l’Autriche sur le score de trois victoires à une. Devant un public enthousiaste et sous un ciel voilé, Denise Feierabend, Wendy Holdener, Ramon Zenhäusern et Daniel Yule font parler leur explosivité pour arracher une superbe médaille d’or à la nation forte du ski alpin et à son équipe composée de Katharina Gallhuber, Katharina Liensberger, Marco Schwarz, et Michael Matt. La jeune Katharina Liensberger signe la seule victoire autrichienne en finale, face à Denise Feierabend.

L’équipe de France, championne du monde en titre, composée de Adeline Baud-Mugnier, Tessa Worley, Alexis Pinturault et Clément Noël parvient à se hisser en demi-finale où elle est battue 3-1 par la Suisse. Dans le match pour le bronze, la Norvège devance la France de douze centièmes de seconde. Sebastian Foss-Solevaag et Leif Kristian Nestvold-Haugen battent respectivement Alexis Pinturault et Clément Noël tandis que Kristin Lysdahl et Nina Haver-Loeseth s’inclinent face à Tessa Worley et Adeline Baud-Mugnier. À deux victoires partout, la Norvège l'emporte au temps.

« C’est génial de participer à quatre épreuves et de repartir avec trois médailles" sourit Wendy Holdener. "Pour moi, c’est clair que les médailles individuelles sont plus importantes mais j’adore ce format et j’avais envie de courir." Double médaillé dans ces Jeux, Ramon Zenhäusern renchérit : "C’est un rêve qui continue. J’adore ces slaloms parallèles. J’espère qu’il y en aura plus dans le futur. Pour le public, c’est vraiment intéressant et aujourd’hui l’ambiance était bien meilleure dans l’aire d’arrivée que pour le slalom.".

La Suède, grande favorite pour le titre avec dans ses rangs les champions olympiques Frida Hansdotter et Andre Myhrer, a été sortie dès le deuxième tour par l’équipe d’Autriche.

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