Le relais universel 4x100m, symbole du paralympisme
C’est LE rendez-vous que le public attend ! Indécis, virevoltant, collectif, le 4x100m universel est la seule épreuve de relais en Para athlétisme ! Créé en 2018, il a la particularité de regrouper sur la piste quatre athlètes ayant quatre handicaps différents.
Pas de place pour l'improvisation
Sur la piste comme dans le réglèment, le relais universel 4x100m est soumis à diverses règles que chaque équipe se doit de respecter sous peine de mise hors course.
De ce fait, chaque formation se doit d'être mixte avec deux femmes et deux hommes dont les départs sont organisés de la manière suivante :
Le relais est démarré par un athlète déficient visuel, puis c’est au tour d’un sprinteur amputé de poursuivre la course. En troisième position, on retrouve une personne en situation de handicap moteur cérébral dont le rôle est de mettre sur orbite le dernier étage de la fusée constitué d’un athlète en fauteuil. Charge à l’entraîneur de trouver la combinaison parfaite en sélectionnant les sprinteurs et sprinteuses les plus complémentaires pour couper la ligne d’arrivée en première position !
Comme chez son homologue olympique, le passage du relais est un moment charnière durant la course. Sur ce 4x100m universel, vous ne verrez pas de bâton témoin dans les mains des coureurs puisque le passage de relais s'effectue à la touche dans une zone dédiée de 40 mètres pour les athlètes en fauteuil et de 30 mètres pour les autres.
La première médaille paralympique pour les USA
Pour la première finale paralympique de l’histoire de ce relais universel en 2021, les Américains avaient dominé leurs adversaires et établi un nouveau record du monde en 45"52. Seront-ils capables de rééditer l’exploit à Paris ? Quelle que soit la nation titrée, le relais universel 4x100 m sera à coup sûr une épreuve attendue et plébiscitée par le public qui y retrouve, encore plus qu’ailleurs, les valeurs du paralympisme : détermination, égalité, inspiration et courage.
Sylvie Talmant, entraîneuse de l’équipe de France de Para athlétisme, répond aux questions de Paris 2024
- Est-il simple de composer un relais ?
Le relais universel 4x100 m est une course complexe en elle-même mais être l’entraîneuse du relais l’est tout autant (rires). La première donne, et qui n’est pas des moindres, c’est que nous devons composer avec les athlètes qui sont qualifiés pour les Jeux. En fonction de cela, nos choix se restreignent. Sans parler des conditions imposées concernant la mixité et les quatre types de handicaps. Quand on réunit toutes les conditions pour ce relais, on se rend compte qu’il n’y a pas 150 options possibles ! Il faut ensuite savoir jongler avec les objectifs individuels de chaque athlète. Le relais arrivant souvent assez tard dans la programmation, il est parfois compliqué pour certains d’être à 100 % de leurs capacités physiques car ils sont émoussés par leurs courses respectives. Mais une fois qu’ils sont dedans, on sent cette cohésion. Chacun a un rôle à jouer et le prend à cœur.- **Comment vous préparez-vous ?**Sur le plan de la préparation, nous avions établi des regroupements spécifiques relais. On en profitait pour tester toutes les compositions possibles, tels des mathématiciens. Ces rassemblements avaient pour but de travailler sur les aspects techniques du relais : habileté et attitude. Car il n’y a pas de secret. Le relais, ce sont des automatismes, des habitudes. Voir son partenaire arriver, apprécier la vitesse, c’est une multitude de détails qui est à appréhender pour pouvoir gagner un maximum de temps sur nos adversaires. En France, nous avons la chance d’avoir ce qui se fait de mieux au monde en la matière grâce à Jo Maisetti (entraîneur du relais universel 4x100 m) qui avait décroché le record du monde avec l’équipe de France d'athlétisme en 1990.
- **Comment se déroule le passage de relais ?**Le passage de relais, comme chez les valides, est un moment crucial durant la course même s’il se fait à la touche et non pas avec un témoin. Il faut savoir s’adapter au handicap de chacun pour perdre un minimum de temps dans le processus. Par exemple, Angelina Lanza (spécialiste du 200 m, catégorie T47, handicapée au bras gauche) doit prendre et donner le relais avec son bras droit ce qui, d’un point de vue technique, n’est pas le “bon côté” puisqu’il est du côté extérieur de la piste. Le dernier passage de relais est aussi délicat car il faut que la trajectoire soit optimale pour lancer l’athlète en fauteuil. Bref, il faut jouer avec le handicap de chacun pour avoir un maximum de fluidité.
- **Peut-on voir le relais français sur le podium des Jeux Paralympiques ?**L’ambition est évidemment d’aller décrocher une médaille. Ce serait super pour les relayeurs mais surtout pour l’ensemble de l’équipe de France. Cette ambition de médaille, nous la jugeons crédible même si ça reste du relais avec toujours cette part d’incertitude. Mais c’est aussi ça qui fait la beauté de cette course !
- Quels sont les athlètes qui composeront le relais ?*
**Il va dans un premier temps falloir qualifier le relais pour les Jeux ! Du reste, nous avons déjà en tête des noms qui composeront ce relais mais nous ne pouvons pas encore les communiquer car des minimas sont encore à réaliser pour certains. Mais nous avons anticipé.- **Quelle place le relais universel a-t-il réussi à se faire en Para-athlétisme ?**Preuve de l’attrait de cette course, il arrive parfois que des athlètes se proposent d’eux-même pour y participer. On voit également de plus en plus de nations mettre des relais lors des compétitions. Cette course plaît ! Il y a eu un réel engouement depuis qu’il a été créé en 2018. Il possède ce côté unificateur qui rassemble certes quatre athlètes mais on se rend compte que cela influence jusqu’à l’ensemble de l’équipe de France qui pousse toujours très fort derrière.
Elles ont déjà participé au relais universel 4x100m et ont adoré !
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Nantenin Keita, championne paralympique sur le 400m en catégorie T13 à Rio
"J’ai eu une superbe expérience avec le relais lors des championnats d’Europe 2021 (NDLR: une médaille de bronze à la clé). Me concernant, tout ce qui est en équipe, j’adore ! Alors bien évidemment que ça me tenterait de revivre cette expérience ! Je signe tout de suite s’il le faut ! (rires) Cela reste une discipline qui est jeune et qui doit faire sa place mais elle fonctionne déjà très bien". -
Mandy François-Elie, championne paralympique du 100m en catégorie T37 à Londres
"J’ai beaucoup aimé cette expérience (NDLR : elle a obtenu deux médailles aux championnats d’Europe). Après, il faut savoir que ce n’est pas facile de créer une coordination parfaite avec ses trois partenaires mais vous le savez aussi bien que moi, il faut s’entraîner et s’entraîner encore. Le relais universel est une course un petit peu à part. Techniquement surtout avec le passage de relais qui est délicat. Surtout moi qui ai du mal avec mes bras mais avec de la répétition, on s’améliore ! Quant à une participation au relais universel cet été, oui bien-sûr que je suis candidate !". -
Angélina Lanza, championne d'Europe du 200m et en saut en longueur en catégorie T47
"Mes expériences avec le relais ont toutes été belles. Surtout que c’est tout nouveau pour nous puisque la course existe depuis seulement 2018. Il faut savoir qu’il est complexe pour nous de travailler ce relais tout au long de l’année car chacun a ses propres objectifs personnels. C’est d’ailleurs très particulier de jongler entre le personnel et le collectif lors des compétitions car certains athlètes, dont je fais partie, enchaînent les épreuves. Au final, on voit très peu nos partenaires, on n’a pas trop le temps de réaliser ce qu’il se passe. On est tous dans nos bulles. Les stages “France” nous permettent de nous perfectionner sur cet exercice mais cela reste épisodique. Et puis, ce relais est une occasion de plus d’éduquer le public qui peut avoir du mal à suivre avec les nombreuses classifications".