Jeux Paralympiques de Paris 2024 - Yannick Noah : « On fait du sport pour les émotions »

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Photo de KMSP

Dernier vainqueur Français du tournoi de Roland-Garros en 1983, Yannick Noah a été nommé capitaine de l’équipe de France Paralympique masculine, en décembre dernier avec pour objectif les Jeux Paralympiques de Paris 2024. Huit mois pour préparer l’échéance d’une vie pour certains, à la maison.

Ce vendredi, il s’est confié après la défaite des Bleus en finale pour le bronze et ne retient que le positif de cette expérience aussi belle qu’enrichissante.

« Bien sûr, je suis déçu. Je suis attaché à ces gars-là, je nous voyais avec une médaille… » a déclaré l’intéressé, très ému en zone mixte après la rencontre.

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Le clan Français n’a pas ramené de médaille, mais pourtant tant d’émotions …

« En simple, on a été un peu surclassés, on perd contre plus fort que nous. Mais en double, en demie et aujourd’hui, il y avait une place. Forcément, c’est plus facile à dire quand on est assis sur le bord du terrain. On a vraiment rêvé, on a vécu ensemble une aventure tellement puissante depuis un an, avec cette montée de pression pendant la cérémonie d’ouverture, les matchs ici à « Roland », je n’avais jamais des matchs en « para » ici avec autant de monde, je ne sais pas si ça nous arrivera encore une fois dans nos vies. On savait qu’on vivait un truc unique et c’est pour ça qu’on avait des ambitions décuplées. On perd aux portes d’une médaille, mais la vie continue. »

Que retiendrez-vous de cette expérience unique ?

« Je suis dans le tennis depuis que je suis môme. J’ai vécu des choses, le tennis m’a donné vraiment beaucoup, c’est mon ADN. Mais vivre cette expérience, l’acceptation des joueurs, du staff, de la famille, c’est une des plus belles expériences de ma vie. Grâce au tennis, ça je ne l’oublierai jamais. »

Avez-vous le sentiment d’avoir appris aux côtés de ces para athlètes ?

« Oui, c’est la raison pour laquelle j’ai accepté cette aventure. Être dans l’équipe, participer, être aux entraînements, c’est quelque chose. Dans mon coaching, il y a de l’affect. Je ne peux pas coacher quelqu’un que tu n’apprécies pas humainement, en tout cas moi ça ne m’intéresse pas. Et oui, j’ai donné tout ce que j’ai pu. Ils m’ont donné beaucoup, vraiment. Je suis plein de gratitude. »

Alors vous continuez l’aventure avec l’équipe de France masculine ?

« C’est difficile de prendre une décision à chaud, c’est beaucoup d’émotions. Vous savez, quand on vit un truc comme ça… Certains se sont mis au tennis en pensant aux Jeux. Vous imaginez quand la lumière s’éteint ? Donc on va tous avoir un réveil un peu compliqué. Il va falloir gérer ça. J’ai déjà vécu ça et c’est quelque chose qu’il faut anticiper, on va tous avoir notre espèce de gueule de bois puissante, chacun va la gérer comme il pourra. Mais en tout cas, je serai là pour cet atterrissage. Il ne faut pas voir que l’équipe de France… Voir Roland-Garros plein, avec des gens qui découvrent le tennis en fauteuil, pour la grande majorité, l’objectif c’est vraiment que des gamins qui sont dans des situations aient pu voir ces matchs. Certains sont venus, j’en ai vu beaucoup. Qu’ils puissent se dire que le tennis est une belle thérapie. Si on a réussi ça, quelques soient les joueurs, quelques soient les pays, c’était le but du jeu. »

À quel point le public, les enfants, le soutien présent pendant toutes ces journées vous ont porté ?

« On s’est entraînés beaucoup, on a fait des stages, mais c’était entre nous. La première compétition à laquelle j’ai participé c’était les championnats du monde, en Türkiye, on a joué les demi-finales devant 40 personnes, dont 20 personnes du staff (rires). Je peux dire que quand je suis arrivé à « Roland » que je connais depuis toujours… J’ai aussi vécu Roland-Garros avec les “para”, on jouait sur des courts annexes, il y avait très peu de monde, c’est normal, les gens ne savent pas. Mais ce qui m’a plu, c’est déjà rentrer sur le court, c’était un vrai spectacle. On fait du sport pour les émotions, pas pour autre chose. Il y en a des émotions et surtout avec des gens qui ont eu une vie pas simple. C’est plein de leçons en fait, mais à la fin c’est du tennis, il y a des balles de break, des balles de match, un public avec une grande majorité de gens qui reviennent de vacances et des gamins qui applaudissent des papas et des mamans qui sont en train de jouer en fauteuil. J’ai pas de mots, c’est tout ce qu’on aime. C’est tout ce que j’aime. »