Championnats du monde de lutte 2023 : Ibrahim Ghanem, une détermination sans faille pour représenter la France au niveau international
Né en Égypte, Ibrahim Ghanem est venu dans l'Hexagone pour participer aux Championnats de France de deuxième division. Six ans plus tard, le lutteur vise une médaille d'or aux Championnats du monde de lutte.
Ibrahim Ghanem a une place à part dans l’histoire de la lutte française depuis le 23 avril dernier.
Ce jour-là, il est devenu le premier Français à atteindre la finale des Championnats d’Europe en lutte gréco-romaine au XXIe siècle. La médaille d’argent gagnée après sa défaite de justesse contre l'Azerbaïdjanais Ulvi Ganizade (7-7) est venue récompenser ses efforts, ses sacrifices et sa détermination.
Le -72 kg aurait pu voir son parcours dans le sport de haut niveau s’arrêter à plusieurs reprises, mais son obstination en a décidé autrement.
En Égypte, son pays natal, il s’est retrouvé dans une impasse après les Championnats du monde 2017 malgré son statut d’international avec deux victoires aux Championnats d’Afrique. Ses premiers Mondiaux s’étaient terminés avec une prometteuse huitième place, mais le destin a décidé que sa carrière allait se poursuivre à plusieurs milliers de kilomètre de là où il a découvert la lutte avec son frère.
Ce rendez-vous planétaire se déroulait à Paris, la ville qu’il n’allait pas tarder à rejoindre pour y vivre.
« À l’époque, franchement, je ne m'imaginais pas quitter l’Égypte. Je n'aurais jamais imaginé vivre en France et lutter pour la France », se rappelle-t-il.
Au moment de répondre aux questions d’Olympics.com, c’est pourtant bien à l’INSEP (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance à Paris) qu’il se trouve, un survêtement de l’équipe de France sur le dos et en français dans le texte.
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Ibrahim Ghanem s’est donné un an pour réussir en France
Il a suffi d’une opportunité et qu’Ibrahim Ghanem prenne le risque de l’accepter pour relancer sa carrière sportive et entamer une nouvelle vie. Le club d’Aulnay-sous-Bois l’avait sollicité pour combattre aux Championnats de France par équipes deuxième division.
Sans parler le français, il a relevé ce défi en sachant que c’était peut-être l’option qui allait lui permettre de poursuivre sa carrière sportive au plus haut niveau. Son potentiel de médaillé de bronze des Championnats du monde juniors 2014 n'avait pas encore été pleinement exploité. Le soutien de ses proches et sa ténacité l'ont incité à saisir la chance qui pouvait lui permettre d'y arriver. C'était ce qu'il voulait et rien ne pouvait l'en empêcher.
« Je venais pour la lutte parce que c’était un beau challenge. Je me suis dit : fais le maximum possible pendant un an et regarde les opportunités que cela peut t’offrir. Si ça ne marche pas, tant pis, je travaille et fais ma vie. Mais d’abord, je voulais tout donner pour avoir la possibilité de continuer dans la lutte de haut niveau », explique celui qui a eu besoin de trouver des petits boulots grâce à des connaissances égyptiennes pour gagner sa vie à son arrivée dans l’Hexagone.
Son sérieux lui a permis d’aller encore plus vite que ce qu’il espérait. Dès 2018, après seulement six mois, l’INSEP lui a ouvert ses portes en tant que partenaire d’entraînement. Ibrahim Ghanem était tellement dévoué qu’il s’entraînait jusqu’à trois fois par jour à cette période.
Malgré les obstacles qu’il commençait à surmonter, tout n’a pas été simple car d’autres se présentaient à lui. Une fois devenu interne à l’institution située au bois de Vincennes, la problématique de la naturalisation arrivait avec beaucoup plus de questions que de réponses.
« J’ai eu beaucoup de moments de doute, j’ai eu souvent peur que ça ne marche pas. Il y avait toujours de l’incertitude, mais je gardais le cap : ‘un an à fond, et si ça ne marche pas ciao’ », avoue celui dont l’armure semble pourtant infaillible.
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Ibrahim Ghanem reste sur une victoire contre le champion du monde en titre
Les démarches ont finalement pu se dérouler sans trop d’encombre et, en 2019, le passeport français lui était accordé.
Deux ans après ses dernières apparitions sur la scène internationale, Ibrahim Ghanem pouvait y faire son retour. L'homme n'était plus le même, mais le lutteur avait toujours ses mêmes qualités d’endurance. Seul le rythme lui manquait.
Le besoin de renouer avec la compétition puis la pandémie de Covid-19 ont retardé ses premiers succès sous le maillot français, mais il en aurait fallu bien plus pour décourager celui qui s’est tellement battu pour pouvoir à nouveau lutter.
Le désormais triple champion de France a finalement goûté à la gloire internationale avec sa performance aux Championnats d’Europe 2023. Et ce n’est que le début.
Cinquième des Mondiaux 2022, il vise le titre planétaire lors de l'édition 2023 qui a débuté du côté de Belgrade ce samedi 16 septembre. En plus de la force qu’il tire de son parcours unique, Ibrahim Ghanem peut compter sur la confiance engrangée lors du rendez-vous continental où il a battu Ali Arsalan, le champion du monde en titre serbe, en demi-finale.
« C’est important dans l’optique des Championnats du monde. »
Lutter pour une première médaille mondiale en seniors dans la catégorie -72 kg pourrait lui permettre de poursuivre sa progression avant d’entamer un nouveau chapitre, beaucoup moins radical que le précédent, mais qu’il espère au moins aussi fructueux : combattre en -67 kg.
Sa catégorie de poids n’étant pas olympique, il prévoit de descendre dans celle d’en dessous pour tenter de décrocher un quota pour les Jeux de Paris 2024 lors des futurs Tournois de qualification olympique.
Son prochain objectif ? Les JO. Et même si le challenge est de taille, sa détermination est encore plus grande.
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