Déclaration de consensus du CIO sur la triade de la femme athlète
Protéger la santé de l'athlète est le but principal que s'est fixé la commission médicale du Comité International Olympique. Si l'on exhorte les athlètes à viser l'excellence, les entraîneurs, médecins d'équipe, prestataires de soins de santé, Fédérations Internationales et organismes sportifs dirigeants ont pour leur part l'obligation de reconnaître les contraintes, manœuvres et situations susceptibles de porter atteinte à la santé des athlètes. Bon nombre de sportives doivent ainsi faire face à la pression que représente le fait d'atteindre un poids ou une masse grasse irréalistes. Pour ce faire, certaines se lancent dans des régimes alimentaires draconiens et déséquilibrés, au risque de sombrer peu à peu dans de graves troubles de l'alimentation comme l'anorexie mentale ou la boulimie. Ces dérèglements alimentaires peuvent à leur tour déboucher sur une faible disponibilité en énergie (à savoir un apport énergétique qui ne suffit pas à répondre à la dépense d'énergie), ce qui peut perturber le cycle de reproduction et entraîner une aménorrhée. L'association entre troubles de l'alimentation et cycles menstruels irréguliers finit par provoquer une diminution des oestrogènes endogènes et autres hormones, ce qui occasionne une baisse de la densité minérale osseuse, d'où l'expression de "triade de la femme athlète".
Répercussions de la triade de la femme athlète sur la santé et les performances des sportives
Enfants et adolescentes
La puberté est une étape cruciale de la croissance. L'augmentation du taux d'oestrogènes est liée à d'importantes modifications cliniques (croissance des os et augmentation du contenu minéral osseux) ainsi qu'à la fusion de l'épiphyse. La pratique régulière d'exercices est essentiel au développement optimal de l'enfant tant sur le plan physique que psychique. Cependant, une alimentation inadaptée (en particulier un faible apport énergétique) fait que les jeunes sportives risquent d'être davantage sujettes à un retard de croissance et de maturation, à une aménorrhée primaire et à une baisse de performances, auxquels pourraient s'ajouter par la suite une insuffisance staturale, une faible densité minérale osseuse et une aménorrhée secondaire. Une modification de leur régime alimentaire et/ou un allègement de leurs programmes d'entraînement permettraient de rattraper le retard constaté au niveau de la longueur et de la masse des os et de relancer le développement pubertaire, ce qui pourrait alors réduire les déficits de croissance. Quoi qu'il en soit, si la maturation est gravement retardée ou l'épiphyse proche de la fusion, la taille définitive de ces jeunes sportives pourra s'en trouver altérée. Aussi est-il recommandé de suivre l'alimentation, la croissance et le développement de toutes les jeunes athlètes, notamment lorsqu'elles pratiquent un sport où l'apparence physique ou la maigreur présentent un avantage en terme de performances.
Athlètes adultes
Une faible disponibilité en énergie, associée à des comportements pathogènes en termes de maîtrise du poids, prédispose les femmes athlètes à des dysfonctionnements menstruels, une diminution de la densité minérale osseuse, un risque accru de fractures de fatigue et une hausse potentielle du risque d'ostéoporose précoce et de maladies cardiovasculaires. Les troubles de l'alimentation s'accompagnent souvent de problèmes psychologiques (perte d'estime de soi, angoisse et dépression notamment), lesquels influent considérablement sur les performances. Lorsque les trois facteurs qui composent la triade de la femme athlète se produisent simultanément, leurs répercussions sur le plan de la santé sont plus graves; la vie des athlètes peut s'en trouver menacée.
Identification de la triade de la femme athlète
Une identification précoce des sportives susceptibles de développer la triade de la femme athlète est importante si l'on veut prévenir l'évolution de ces affections et améliorer le pronostic. Aussi serait-il bon de soumettre les athlètes qui présentent des symptômes de troubles alimentaires et/ou menstruels à un bilan approfondi réalisé par un prestataire de soins de santé. Par troubles de l'alimentation on entend notamment le recours à des méthodes de contrôle du poids excessives, l'hyperphagie boulimique et/ou la restriction alimentaire. La triade de la femme athlète ne se manifeste pas nécessairement chez des sportives qui sont minces; la triade de la femme athlète peut toucher des femmes de toute taille.
Les médecins, prestataires de soins de santé et entraîneurs devraient être informés des facteurs de risque existants, à savoir : cultures qui associent minceur à popularité et succès; antécédents de troubles de l'alimentation; et sports où la maigreur ou un poids particulier sont importants. L'entraîneur a également un rôle de premier plan à jouer en identifiant les athlètes "à risque" ou présentant des symptômes.
Traitement de la triade de la femme athlète
Traiter efficacement la triade de la femme athlète exige une équipe pluridisciplinaire composée d'un nutritionniste, d'un psychologue et/ou d'un psychiatre et dirigée par un médecin spécialiste du sport. Le but du traitement est de reconstituer l'équilibre énergétique, de réintroduire de bonnes habitudes alimentaires, de restaurer la santé mentale, de rétablir les cycles menstruels et d'améliorer la santé osseuse. Les conseils en nutrition sont l'un des aspects essentiels du traitement. Si la sportive est dans l'incapacité de suivre les recommandations du médecin et du nutritionniste, il faut alors l'adresser à un psychologue ou un psychiatre spécialisé dans les troubles du comportement alimentaire. Une hausse de l'apport nutritionnel, qui s'accompagnera d'une prise de poids, entraînera la réapparition des règles et une augmentation de la densité minérale osseuse. Un allègement des entraînements pourrait également s'avérer nécessaire. Les athlètes aménorrhéiques sont souvent traitées par hormonothérapie, même si les preuves scientifiques à l'appui de cette méthode sont peu probantes. L'éducation des sportives, de leur entraîneur et de leur entourage est un autre aspect crucial du traitement. Les athlètes qui souffrent d'anorexie ou de boulimie devraient être exclues des compétitions. Les entraîneurs doivent bien faire comprendre aux jeunes femmes dont ils s'occupent que c'est leur bonne santé – et non leur poids – qui leur permettra de réaliser les meilleures performances. Si l'entraîneur apporte son soutien au traitement prescrit, la sportive sera encouragée à le suivre.
Prévention de la triade de la femme athlète
Prévenir les troubles de l'alimentation permettra de prévenir la triade de la femme athlète. Il est crucial que les entraîneurs sensibilisent davantage leurs athlètes à ce problème en leur expliquant mieux les principes nutritionnels de base et leurs effets sur la santé et les performances. Les sportives, leur entourage et les professionnels de la santé devraient se voir offrir la possibilité de suivre des programmes de formation. Les tests de dépistage annuels réalisés avant la pratique d'une activité sportive devraient comprendre des questionnaires et des examens physiques capables de déceler les premiers signes de la triade de la femme athlète. Les diverses rencontres médicales organisées pourraient également servir à cette fin. Il convient enfin d'encourager les Comités Nationaux Olympiques, les Fédérations Internationales et les fédérations nationales de sport à créer des programmes de sensibilisation à la triade de la femme athlète pour les entraîneurs et les médecins d'équipe et, dans la mesure du possible, à modifier les règlements afin de réduire les effets de la course à la minceur et des mauvais comportements alimentaires qui en découlent.
En cas de divergence entre la version anglaise de la déclaration de consensus et les traductions proposées, la version anglaise fait foi.
Position du CIO sur la triade de la femme athlète
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